Hermano, 15 juillet 2006, Rock Herk, Belgique

Tout amateur de rock belge un peu éclairé vous le dira, le Rock Herk demeure, après 23 ans d’existence, un des « petits » festivals les plus sympas de l’été. De par sa gratuité et son cadre agréable, évidemment, mais surtout grâce à une programmation pointue et toujours riche en découvertes. Au programme de cette édition et en faisant abstraction des scènes Punk/Hardcore et Electro, on trouvera cette fois The Gossip, Animal Collective, The Constantines, Mono, les fabuleux Bellrays et coincé entre tout çà en début d’après-midi, Hermano. Les organisateurs ont en effet réussi à convaincre le gang de Garcia de faire un détour par le parc Olmenhof avant de rejoindre Cologne où ils doivent jouer le soir-même. Quatre concerts en trois jours dont deux en Belgique, on ne comprend pas très bien la démarche mais on ne s’en plaindra pas.

Une évidence s’impose en discutant avec les amateurs de stoner présents en nombre limité : Pour beaucoup, John Garcia représente l’âme du gang de Palm Springs, même s’il n’en a jamais composé un seul morceau, et à ce titre il est considéré comme un demi-dieu, une icône que l’ont vient vénérer. Ce qui laisse de marbre une grande majorité du public pour lequel il demeure un illustre inconnu. On ne se bouscule donc pas devant la scène quelques minutes avant le concert, moment que choisi un Dave Angstrom trépignant d’impatience pour faire un dernier soundcheck, ce qui consiste pour lui à entamer un morceau de Maiden (« The Number of the Beast » si ma mémoire est bonne) avant de rejoindre les autres membres du groupe sur le côté de la scène.


Avec 45 petites minutes pour convaincre, Hermano attaque de front avec « Cowboys Suck » et le ton est donné. Privilégiant les morceaux plus directs du premier album, le groupe a concocté un set explosif, offrant à Angstrom l’occasion de se défouler sans compter. Il faut bien l’admettre, la véritable star, celui qui finit toujours par attirer tous les regards, c’est bien lui, aussi doué pour les riffs assassins que pour les grimaces. Epaulé, par une section rythmique efficace mais discrète, c’est lui qui transforme des morceaux parfois un peu mou du genou sur album en concentré d’adrénaline, insufflant une énergie communicative, à tel point qu’on en oublierait presque la présence d’Olli Smit de l’autre côté de la scène. Facétieux et jamais avare d’un bon mot, il se permettra même de lancer l’intro de « El Rodeo » avant d’interrompre la clameur qui monte du public en annonçant que John Garcia ne désire pas interpréter de morceaux de son ancien groupe … Whithesnake ! Garcia justement, parlons-en. Malgré un certain charisme et une interprétation irréprochable, il reste froid et distant, communiquant peu avec tous ceux qui ne sont là que pour lui. Est-ce parce qu’il n’a jamais vraiment digéré la fin prématurée de Kyuss où parce qu’il refuse d’endosser ce rôle d’icône qu’on s’obstine à lui coller, toujours est-il qu’il n’arborera pas l’ombre d’un sourire. Appuyé sur son pied de micro pendant la majorité du concert (probablement une réminiscence de l’époque Kyuss où cette position lui permettait de ne pas s’effondrer sur scène, ceux qui l’ont vu en ’95 comprendront), il se contentera d’assumer son rôle de chanteur avec professionnalisme, laissant le soin à Angstrom de faire le show pour cinq. Cela n’empêchera le groupe de délivrer des versions furieuses de « 5 to 5 », «Landetta » ou « Alone Jeffe », démontrant une fois de plus qu’Hermano est avant tout un groupe de scène capable de convaincre tous ceux qui restent perplexe face à leurs albums.

Retour vers la scène principale pour voir Mono après un petit détour par le parc et les échoppes, le temps de dégotter le split Om/Current 93. Les conditions ne sont pas vraiment optimales pour assister à un concert du quatuor instrumental japonais qu’on imagine mieux dans une petite salle sombre. Le groupe parviendra néanmoins à instaurer une ambiance propice à la méditation et la rêverie grâce à de longues plages répétitives gagnant progressivement en intensité. Les passages plus débridés (n’y voyez aucuns jeu de mot un peu facile) resteront rares et d’autant plus marquants, Mono proposant plutôt une sorte de post-rock apaisant basé sur des parties de guitares complexes et bourrées d’effets. Le jeu de scène réduit à sa plus simple expression, les musiciens jouant la plupart du temps assis, renforcera le côté hypnotique d’une musique qui sur papier n’a rien pour plaire à un public venu s’enfiler des bières au soleil mais qui au final en séduira plus d’un.

Pour conclure une journée placée sous le signe de l’éclectisme, The Bellrays délivreront une prestation fougueuse dirigée avec classe par une Lisa Kekaula éblouissante. Une grande dame et une grande voix, assurément.

Jihem

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