SOLARIZED – mai 2002


Solarized a sorti il y a quelques mois « Driven », un album rutilant, rock, metal, 70’s, 80’s, 90’s, tout ça en même temps, une vraie rondelle de bonheur en plastique qu’il vous faut vous procurer de toute urgence. En attendant, entretien avec leur leader Jim Hogan …

 

Peux-tu nous présenter rapidement Solarized et nous dire un peu comment, des cendres de Daisycutter, est né le groupe…

Jim Hogan (chant, guitare) : Le groupe est composé de moi, de Regina Satana (batterie), Dave Topolenski (guitare) et Mike Fiore (basse). Reg et moi jouions effectivement dans Daisycutter auparavant. C’était une sorte de cirque un peu dingue, quarante minutes d’un spectacle, qui ressemblait à une sorte de Famille Addams, baigné de lumières stroboscopiques malsaines. C’était une sorte de heavy noise rock brutal, mais il y avait un côté psychédélique étrange. Pur chaos.

En quoi Solarized est différent de Daisycutter ?

Solarized est une réinvention. L’arrêt quasi radical de Daisycutter était inéluctable, nous avions besoin de changer musicalement pour nous adapter à des mélodies vocales ; Daisycutter n’était tout simplement pas fait pour ça. Je pense que la mélodie, surtout par le chant, peut capturer une plus grande variété d’émotions en s’appuyant sur une base plus traditionnelle, et les méthodes les plus traditionnelles sont basées sur le blues. Ceci, mélangé à l’air du temps, est la raison pour laquelle on nous qualifie de « stoner rock ». D’ici quelques années ils appelleront cela différemment. C’est toujours comme ça que ça se passe !

 

Votre premier album,  » Neanderthal Speedway », est sorti chez Man’s Ruin Records ; comment avez-vous vécu la faillite de ce label mythique ?

En fait notre nouvel album « Driven » devait lui aussi sortir chez Man’s Ruin. Ils avaient une assez longue liste d’attente d’albums à sortir, et nous-mêmes nous essayions à l’époque de sortir l’album au plus vite, donc Meteorcity a débarqué et s’est accommodé de notre planning. La banqueroute de Man’s Ruin fut triste, mais ce n’était pas une surprise. Moi-même je dirigeais un label indépendant durant les 80’s et début des 90’s, et je sais trop bien à quel point les contrats de production et de distribution peuvent parfois te mener directement au cimetière. Je le savais par expérience. Le label grandissait, mais leur distribution était faible. Ils cherchaient un meilleur distributeur et ont pensé l’avoir trouvé. Mais apparemment ils n’étaient pas payés, et recevaient plus de retours que prévus. Rajoute à ça les frais de fonctionnement, ils ne pouvaient pas survivre. Je sais pourtant que le propriétaire du label, Frank Kozik, donnait des milliers de dollars de son argent personnel pour payer les frais et les salaires. Mais il est arrivé un jour où il a été obligé de dire stop. C’est vraiment triste. C’était un super label, mené par des individus passionnés.

Comment s’est fait le contact avec Meteorcity après cet épisode ?

Nous avions déjà travaillé avec eux sur le split CD Solarized / Solace appelé « Jersey Devils ». Il s’agit d’ailleurs du CD qui a lancé le ‘buzz’ autour de Solarized à l’époque… Sans l’enthousiasme de Meteorcity envers notre première démo, jamais notre album « Neanderthal Speedway » n’aurait eu un si bon accueil. C’était l’étincelle qui a fait démarrer le feu autour de l’album, et dès lors, quant il fut temps de choisir un label pour distribuer ‘Driven’, Meteorcity était le meilleur choix possible, sans l’ombre d’un doute.

Tu es satisfait de leur travail jusqu’ici ?

Ouais. Jadd Shickler dirige un super label. Meteorcity a considérablement grandi depuis notre première collaboration, mais il reste juste assez petit pour encore donner à chaque groupe l’attention qu’il mérite. Il a une campagne de promotion solide au travers de Earsplit, et a tout fait pour assurer à  » Driven » une sortie en Europe à travers People Like You Records et Century Media. Toutes ces choses sont importantes et nous font aller de l’avant.

 

Vous travaillez beaucoup sur votre site web, y voyez-vous un bon outil de promotion ?

En fait, c’est bien plus qu’un simple outil de marketing. C’est quelque chose qui personnellement me passionne. C’est comme créer une chanson ou un album : un travail créatif. Evidemment, c’est aussi une manière de nous faire connaître, mais c’est bel et bien une entité à part. C’est probablement à ce jour l’un des plus grands sites web sur un groupe de rock. Il y a les rubriques habituelles sur le groupe, des petits trucs plus personnels sur nous, des jeux vidéos, et des milliers de liens vraiment bizarres. C’est plutôt une sorte de complexe de loisirs de la sous-culture moderne, quelque chose comme ça. En tout cas vraiment pas le site web typique d’un groupe de rock.

Vous êtes du New Jersey, et hormis Bon Jovi, aucun groupe de vrai rock de ce coin ne me vient à l’esprit… OK, je retire Bon Jovi, il y a aussi Monster Magnet, mais sérieusement, comment est la scène rock du New Jersey ?

Tu sais comme moi que le point de vue mainstream n’a jamais été une représentation correcte de n’importe quel style. Penser à l’héritage musical du New Jersey en ne pensant qu’à Bon Jovi ou Bruce Springsteen c’est donc faire abstraction de tout le reste. Ce sont pour nous des artistes pop. Bon Jovi est si mielleux et acidulé qu’il filerait du diabète à quelqu’un en parfaite santé ! On ne peut pas le considérer comme un groupe de ‘rock’ ; comment le pourrait-on en sachant que son public est constitué de fillettes de dix ans ?! Bien sûr, il y a plein de groupes ici qui font du vrai rock. Atomic Bitchwax, Lord Sterling, Solace, Core, Shovelhead, Halfway To Gone, Six Sigma… Ils apportent tous quelque chose à cette scène de vrai rock heavy. Prends l’album  » Scene Killer » par exemple, il s’agit d’un collectif de membres de plusieurs groupes, parmi les meilleurs de la région, tous genres confondus. Et tout fonctionne parfaitement bien ensemble, ça jamme, les genres se mélangent, et l’on obtient une sorte de chaos d’un genre inédit. J’ai entendu dire que cet album devrait sortir en Europe, essaye de mettre la main dessus, il déménage !

Il est évident que vous baignez dans cette sorte de ‘pop’ culture américaine des années septante et quatre-vingts, que ce soit au niveau des films, séries TV, etc… A quel niveau cela vous influence-t-il en tant que groupe ?

Effectivement, c’est une réelle influence, mais ce n’est pas tant la « culture populaire » qui nous intrigue, que l’underground et la culture « anti-pop » surtout. Tout ce qui n’a jamais vraiment explosé au grand jour niveau popularité, mais qui était si loin du mainstream qu’il a acquis un public dévoué et un statut culte. C’est la culture déviante, socialement atypique qui nous nourrit. J’ai toujours considéré Solarized comme une sorte de film de série B. Si l’on me donnait le choix entre regarder un grand classique qui a remporté plein d’Oscars et un bon vieux film de kung-fu des années septante au budget minuscule, je prends le film de kung-fu sans hésitation.

Est-ce que cette influence se retrouve aussi dans vos paroles ?

Je pense que oui, au niveau des paroles, ça doit se sentir à un niveau ou à un autre, même si ce n’est qu’au niveau de la suggestion, mais en tous les cas ce n’est pas une volonté consciente, quelque chose que l’on recherche. Quel que soit le genre de parolier que je suis, mes influences se révèlent sans aucun doute inconsciemment ici ou là dans mes paroles, j’en suis persuadé… Je pense que tout artiste met un peu de lui-même dans tout ce qu’il crée.

 

D’où tirez-vous vos influences musicales ?

Nous pourrions te citer des milliers de groupes dans des milliers de genres, mais cela semblerait n’avoir vraiment aucun sens à quiconque a entendu notre musique. S’ils pensent Black Sabbath ou Blue Cheer, nous pensons probablement Black Flag et Killdozer. Nous ne nous attendons vraiment pas à ce que quiconque comprenne nos influences. De toute façon, la plupart sont assez obscures… On s’estime heureux que tant de personnes apprécient ce que nous faisons. Parfois il faut s’en contenter, ne pas aller chercher plus loin. Le meilleur compliment que l’on m’ait fait jusqu’ici a été lorsque l’on a comparé Solarized au Motörhead de la période « boogie-rock » de la fin des 70’s. Pour moi, il ne peut tout simplement pas exister de plus grand compliment.

Justement, en ce début de 21ème siècle, comment définirais-tu ta musique ?

Kick ass rock’n’roll sans compromis. Une éthique punk rock. On se moque des gros contrats de maisons de disques, ou bien des rêves de rock stars au rabais. Trop de groupes tombent dans ce piège. Dès lors qu’un groupe devient saturé et trop exposé, comme ce fut le cas avec le grunge, il semble que les groupes jugent nécessaire de dénoncer toutes les choses qui faisaient que les gens ont commencé à les aimer ! Il y a un besoin constant d’être accepté en tant que groupe « cool », ce qui, comme tout le monde sait, dépend uniquement de la dernière mode. Le problème est qu’il semble être embarrassant de faire partie d’un groupe de rock… Pas pour nous. Peu m’importe comment on appelle le genre, ou quelle est la mode du moment. Tout cela n’a aucune importance pour nous. Solarized est un groupe de rock. En ce qui concerne la musique, tout ce que l’on fait c’est brancher nos instruments et vous faire tomber sur le cul, et tu ne nous verras jamais, jamais nous excuser pour ça. C’est un peu une idéologie de casse-cou, mais ça fonctionne bien en ce qui nous concerne.

 

Je serais curieux de savoir qui joue les parties de guitare solo dans l’album, car on a parfois l’impression que la guitare lead apparaît lorsque le chant s’arrête, et donc joue le rôle d’une sorte de second chanteur… Je sais, ça a l’air bizarre…

Non, ce n’est pas du tout bizarre. La guitare lead et le chant doivent tous deux porter une sorte de mélodie. Dave et moi nous partageons les soli, nous n’avons pas à proprement parler de guitariste solo. On regarde simplement lequel de nous deux a un style qui servira le mieux tel ou tel riff sur lequel le solo intervient, on choisit simplement ce qui sonne le mieux. Ce sont vraiment les chansons elles-mêmes qui définissent tous ces choix.

Quels sont vos plans pour les mois à venir ? Une tournée européenne en vue ?

Un jour ou l’autre, je suis à peu près certain que nous traverserons l’océan, mais pas pour cet album. Suite à notre précédente tournée, des disputes internes ont failli détruire le groupe. Nous étions victimes des prises de bec habituelles au milieu musical. Il semble que ce soit dans la nature intrinsèque de tout groupe de rock de se battre et de travailler comme des malades, et d’imploser dès que l’on atteint enfin un niveau supérieur. Cela a failli nous arriver. Bref, nous avons dû remplacer certains membres du groupe et prendre le temps de nous « retrouver ». Nous avons perdu beaucoup de temps et beaucoup d’opportunités, mais nous avons survécu. Actuellement nous sommes en train de composer un nouvel album, et d’essayer de solidifier ce nouveau line up en tant que force créatrice. Nous devons des chansons à certains labels, alors nous essayons d’honorer ces contrats avant que le paysage musical ne se modifie encore.

Que dirais-tu à quelqu’un qui n’a jamais entendu parler de Solarized pour l’inciter à écouter votre album ?

Si tu cherches un bon album de rock déjanté pour pousser le volume à fond et faire chier tes voisins, alors tu devrais sérieusement envisager de dépenser ton argent si durement gagné en achetant « Driven » !

mai 2002 par Laurent.

Laisser un commentaire

  

  

  

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Se connecter