On s’est construit une relation étrange avec Riding Easy depuis quelques mois. Après une série de premières sorties détonantes, marquées par des découvertes / révélations fulgurantes et solides (Monolord, The Well, R.I.P., The PictureBooks, Holy Serpent…), le label a depuis parfois dilué son aura dans quelques sorties plus faibles, qui avaient du mal à se distinguer. Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain : Daniel Hall reste un grand dénicheur de talent, et on aurait pu passer à côté de ce disque si on ne s’en était pas rappelé…
Alastor, donc, quatuor suédois tout jeune par sa structure (naissance en 2016, quelques titres sortis ici ou là…) mais pas si jeune musicalement : les gaillards trouvent leurs racines dans les meilleures productions qui ont baigné la fin des années 70 / début des années 80. Vous me direz : c’est le cas de bon nombre de sorties des derniers mois / années, et pas toujours la garantie d’une grande réussite musicale en soi. Certes, sauf que là, le résultat est d’une qualité remarquable, fruit d’une synthèse si réussie que l’on croirait nos jeunes loups en provenance directe du siècle précédent.
Le groupe tape dans tous les sens et fait mouche à chaque fois. Insolent. Le doom séminal de “Your Lives are Worthless” traîne sa froide langueur sur presque 10 minutes gorgées en riffs pachydermiques 100% AOC. “N.W 588” convoque les meilleures références du heavy metal des années 80 et y rajoute quelques rasades de fuzz croustillant pour faire bonne mesure. Le morceau titre “Slave to the Grave” rappellera les grandes heures de Pentagram sur une première moitié très doom old school, tandis que sa seconde moitié livre une déclinaison entêtante du master-riff, propice pendant 4 bonnes minutes à un déluge de leads roboratives en enivrantes qui emmène le titre aux portes du space rock le plus trippant. Mais le morceau-maître de cette galette réside sans discussion dans les 17 minutes du délicieux “Spider of my Love”, un pur joyau de vieux doom classique, où les vocaux légèrement nasillards de Dharma Gheddon (!) viennent se caler sur un riff monolithique joué avec une lenteur extrême mais évidente dans le contexte. Le morceau, emmené sur sa longueur par un clavier qui trouve impeccablement sa place, se conclue pendant plusieurs minutes sur une orgie de soli jouissifs. Bon, les 8 min de “Gone”, bluette électro-acoustique terminant sur une section “on tape des mains en rythme au coin du feu”, s’avèrent être le passage facultatif du disque, clairement. Mais sur presque une heure de musique, on ne va pas chipoter non plus !
Le plaisir est au rendez-vous dès les premières écoutes, et les suivantes s’enchaînent sans jamais l’ombre d’un déplaisir. Quel excellent premier album ! On sort de ce disque repu, souriant, avec le sentiment qu’on en a eu largement pour notre argent. Et on n’a qu’une envie désormais : voir le groupe en live.
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