La dolcevita, douceur de vivre si emblématique de l’atmosphère de la légendaire Rome, transparaît à travers chaque mesure, chaque accord, chaque coup de cymbale de ce modestement intitulé album, « The Rise of Beesus ». Enfin, pas vraiment. Plutôt le contraire en fait. La musique du quatuor romain, combo plutôt discret jusqu’ici, qui sort après 5 ans d’activité (morcelés) son premier album, s’apparente plus à une session d’auto-tamponneuses dans une piscine de goudron qu’à une balade en amoureux main dans la main au coucher du soleil sur les bords du Tibre, m’voyez…
Dix titres, 50 minutes, et pas mal de choses à dire ! Bien loin des dizaines de groupes italiens dont on trouvera inévitablement les mots « psyche » et « heavy » dans le genre pratiqué (dans le désordre, et avec d’autres mots au milieu), Beesus trouve plutôt ses influences dans des combos noise old school (on pense plus à Jesus Lizard ou Sonic Youth qu’à un bon vieux Fu Manchu – voir des titres comme « Zenza » ou « Mata la Verguenza »), voire grunge pour un sens de la mélodie assez marqué, le tout, et c’est ce qui fait chaud au cœur, enveloppé dans une belle coquille de son rond et graisseux, copieusement fuzzé. Des fulgurances doom trouvent aussi leur place ici ou là (« Rise of Beesus », la fin de « Zenza »), et les plans stoner « classique » viennent aussi agrémenter certains titres. On trouve aussi des prises de risque (voir ce « Kusa » moitié planant / moitié brutal en milieu d’album), aussi illustrées par des breaks venus de nulle part, des morceaux bi(ou tri-)céphales, des effets saugrenus, etc… Barré ! Tout ne fonctionne pas parfaitement, bien sûr, et on hausse les sourcils plus souvent qu’à son tour. Mais l’enthousiasme du groupe excuse presque tout. Bref : roboratif ! Trouver une ligne directrice claire devient dès lors un exercice de haute voltige, et on ne s’y risque pas. On passe plutôt du temps à écouter ces titres, et finalement tout s’enchaîne avec une impression de chaos pas désagréable – les écoutes s’enchaînent non sans déplaisir, on ne s’ennuie pas.
La prod – ou plutôt le monceau de glaire qui coule des haut parleurs – sied parfaitement au groupe, avec en particulier pour les esthètes du son, un son de basse si gras qu’on pourrait y faire cuire la production de frites du McDo du coin pendant une semaine. On pourrait être un peu rebuté par les beuglements un peu systématiques de Touis, mais on s’y fait, ça convient finalement bien à l’énergie débridée du combo. Au final, les pièces du puzzle vont donc très bien ensemble, et Beesus a beau évoluer dans un environnement musical complètement ravagé et chaotique, on s’y plonge avec envie, et on y revient avec plaisir.
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