Conviction est un groupe français pour le moins discret qui sort aujourd’hui son premier album, après presque huit ans d’existence, emmené par un label italien (no comment…). Une existence “en pointillé” pour cette entité/projet, étant donné que les musiciens sont par ailleurs membres d’autres formations un peu plus “visibles” et actives, en tout cas dans la sphère metal (Ataraxie, Temple of Baal, Mourning Dawn… du nerveux, donc). Quoi qu’il en soit, hormis de discrets singles ici ou là, on a enfin une vraie galette à se mettre sous la dent pour bien découvrir le combo.
Au vu du CV de ses membres, on s’attendait un peu à quelque chose de plus rapide niveau tempo : or hormis quelques segments énervés de “Curse of the Witch” notamment, les 7 morceaux de ce disque (1h de musique quand même) sont TOUS calés sur un tempo lentissime, s’inscrivant de fait dans une vision parfaitement respectueuse du doom old school. Mais le constat est criant sur l’ensemble de la galette, bien au delà du simple choix du tempo des morceaux… Au point que le premier accueil du disque n’est pas forcément des plus enjoués : votre serviteur le reconnaît, après la première écoute, ce qui émerge en premier lieu est cette sensation un peu diffuse “d’ersatz” de toute la vague doom des années 80-90, branche anglo-saxonne. Le vieux Cathedral (le rauque et énervé) rejaillit au détour du moindre riff, on entend du Trouble, du Witchfinder General, du Count Raven…
Puis peu à peu l’identité du groupe se dessine progressivement, et l’album gagne en intérêt propre ce qu’il perd en surprise. A partir du moment où le postulat est assumé (Conviction se revendique de cette vague musicale), ce travail d’honorable artisan du doom se matérialise sur des compos qui devraient contenter la plupart de ceux qui ont fait une parenthèse musicale de deux décennies. Du riff lancinant en veux-tu en voilà, des soli sur tous les morceaux, une batterie le pied sur le frein, qui semble retenir tout le monde dans une démarche frôlant le sadisme doom… Le tout repose sur une prod basique mais efficace, avec quelques gimmicks incontournables (quelques samples de cris d’horreur ici ou là). On pourra exprimer une petite réserve sur quelques arrangements vocaux pas toujours très heureux qui font un peu lever les sourcils (par exemple les harmonies sur le refrain de “Through the Window”, bien travaillées mais un peu décalées, quelques backing vocals un peu “téléphonés” ici ou là…), mais au vu de la place centrale du chant dans ce genre musical (encore un fait saillant qui s’est progressivement perdu dans l’évolution du doom en entrant dans le siècle en cours), on est quand même loin du ratage.
Conviction porte très bien son nom : il en faut une sacrée, de conviction, pour lâcher en 2021 un album aussi anachronique comme un pavé dans la mare musicale doom/sludge actuelle. Mais dans un contexte où le fan de doom old school peut se trouver un peu perdu parfois, noyé dans cette hybridation quasi systématique avec des préceptes sludge un peu trop récurrents, ce retour aux sources fait du bien. Avec Cathedral mort et enterré depuis plus de dix ans, St Vitus qui vire sa cuti musicale tous les ans, les variantes Trouble qui se dispersent, la faillite morale de Pentagram… Qu’il est plaisant finalement de retrouver quelques repères musicaux bien installés, emmenés avec une sincère passion par un quatuor de vrais esthètes du genre.
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