On ne vous apprend rien si vous êtes des habitués de ces pages et de la scène stoner contemporaine en général : l’Australie est devenu, avec la Grèce et la Suède (chacun aura son tiercé, voici le mien), la Sainte-trinité de la scène stoner actuelle. Des groupes par dizaines, tous plus bons les uns que les autres, débarquent à intervalles réguliers pour nous abreuver de rétro-rock savoureux, de stoner psychédélique imbibé ou de doom sépulcral. En 2009, c’est aux antipodes du monde qu’est né Datura4, sorte de super-groupe de l’île-continent renfermant des hauts dignitaires du stoner australien. Tout ce beau monde se réunit pour des gigs dans les bars de la banlieue de Perth avec, à sa tête, un certain Dom Mariani. Le bonhomme, membre du West Australian Hall Of Fame, est une légende dans son pays depuis les années 80 et sa participation au groupe The Stems, une institution australienne comme peut l’être Nirvana pour la ville de Seattle. Après avoir bourlingué avec une dizaine de formations, ce grand fan des Beatles et de Creedence Clearwater Revival roule désormais sa bosse avec Datura4 depuis 2009. Demon blues fut le premier coup de semonce en 2015, Hairy mountain enfoncera le clou en 2016, Blessed in the boogie concluera cette première trilogie de merveilles en 2019. Ce mois-ci, nouvelle offrande du combo avec West coast highway cosmic et sa féérique pochette aux couleurs chaudes.
Dès les premières secondes de « West coast highway cosmic », on est projeté plus de 60 ans en arrière dans le quartier Haight-Ashbury de San Francisco, épicentre du mouvement hippie. Grace Slick et Janis Joplin discutent en terrasse, des chevelus portant de superbes chemises à fleurs vous saluent derrière leurs lunettes roses et Grateful Dead est programmé le soir même au Fillmore. En un seul titre, vous êtes amoureux de cet album et vos oreilles remercient déjà Dom Mariani, le Doc Brown australien, et sa troupe. « Wolfman woogie » délaisse le LSD pour un blues-rock fiévreux parcouru par de subtiles notes d’harmonica, à l’ancienne… « Mother medusa », plus basique dans son approche du genre, est magnifié par le jeu de guitare sublime de Mariani, suivi par un mid-tempo intitulé « A darker shade of brown » qui voit le retour en fanfare des claviers de Bob Patient. La première face (oui madame, le vinyle est de retour depuis quelques années, faut s’y faire…) se termine avec le fantastique « You’re the only one », ballade désertique à écouter au coin du feu entre les cactus et les coyotes. Bon, déjà, avec la face A, on se dit qu’on tient un des albums majeurs de 2020. Et il reste encore une face à découvrir…
La face B s’ouvre en fanfare avec « Rule my world », formidable blues-rock digne des plus beaux méfaits de Clapton avant sa période bibine. La découverte de la caverne aux merveilles se poursuit avec « Give » qui poursuit le rêve éveillé que tout amateur de rock psychédélique vintage vit depuis qu’il a posé la galette sur la platine. On commence à manquer de superlatifs pour évoquer cette musique organique, trippante, jouissive comme peut l’être « You be the fool », véritable déclaration d’amour à un rock psyché suranné et qui sent la cave mais rien de péjoratif là-dedans car c’est souvent à cet endroit qu’on y conserve les meilleurs crus… Allez, dernière ligne droite avec « Get out » et sa rythmique à la Status Quo qui vous fera dandiner sur votre canapé avant un « Evil people pt.1 » planant et musclé au possible.
Avec un tel album réalisé de main de maître, d’une variété et d’une richesse rares dans le milieu et d’une qualité égale du début à la fin (ce qui est assez rare pour être signalé), Datura4 signe là un masterpiece de rock psyché old-school, une petite friandise pour vos oreilles et un soleil éblouissant qui va illuminer et réchauffer votre moral. En ces temps difficiles, c’est bon de se vider la tête et de laisser divaguer son esprit et, avec West coast highway cosmic, vous tenez entre vos mains le compagnon de jeu idéal.
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je confirme, bien que n étant pas né hier , cet album de blues rock austalien est de toute beauté....