Qu’il est sain et rafraîchissant de trouver un groupe cash, pas encore aseptisé et “hypocritisé” par des velléités marketing stériles, dont les symptômes se retrouvent dans des bios boursouflées, enjolivées, ronflantes et prétentieuses… El Cam est direct, selon toute vraisemblance honnête, et est basé dans le nord de la France (ça c’est juste pour rajouter un défaut dans la liste – vanne gratuite, c’est pour moi, cadeau).
Duo guitare – batterie déjà, le combo n’est structurellement pas armé pour faire dans la fioriture. L’influence Karma To Burn abordée en dur dans la bio, ça fait plaisir – musicalement déjà, on va y revenir, mais en terme d’attitude surtout : impossible de cacher l’évidence derrière son petit doigt, l’influence est majeure, omniprésente.
Conceptuellement, notons-le, El Cam fait une proposition formelle assez originale : même s’ils défendent aujourd’hui leur second EP, le-dit EP n’a pas d’incarnation physique, et même pas en fait d’instance « audio only » : les six titres constituant ce « Shaft » sont captés en live… vidéo ! C’est la bande son de cette captation atypique (live sans public, dans un lieu atypique, une sorte de toit de bâtiment industriel en friche…), regroupée en six morceaux Youtube (existent aussi sur Bandcamp, pour ceux qui se foutent de la vidéo) pour une petite demi-heure en tout.
On va quand même vous parler de la vidéo, même si ce n’est pas le sujet : on y trouve une bonne variété de plans (on ne s’ennuie pas), du fixe, du mobile, c’est rythmé et fun, même si au bout de 30 minutes, sans public, un duo qui fait de l’instrumental… scéniquement c’est assez peu diversifié. Mais ça se laisse quand même regarder, rassurez-vous, vous y apprécierez notamment l’ampleur de jeu et la vélocité d’Aurel’ à la batterie. A la gratte, évidemment, c’est forcément un peu statique (un peu d’effets, des pédales) même si ça fait des efforts.
Niveau musique, on vous la refait pas, l’approche K2B est évidente. Ce n’est pas du mimétisme, seulement une intention musicale similaire, un projet « riff-oriented » avant tout : on pose le riff, on le fait monter en tension, et on le cale sur une compo bien rodée. Rien qui dépasse. On a beau croire les gars qui affichent un travail de composition essentiellement basé sur des jams ; une fois qu’elles sont torchées, en revanche, les compos ne bougent plus, on perd pas son temps (et son efficacité) dans des impros sans fin qui risqueraient de diluer l’intention et l’énergie. Après, même s’il manque un peu le groove du trio ricain (un bassiste ?) le niveau d’écriture est bon, même si les riffs sus-mentionnés ne sont pas tous d’un même niveau (c’est aussi le cas chez K2B ces dernières années, notons bien…). Là où « Red Guts » ou « Life in the Ruts » par exemple sont bien catchy, on a des titres un peu moins marquants, à l’image d’un « Reeks of Firedamp » ou d’un « Slag Heap » qui tournent un peu autour du pot. Un travail de « fignolage » dans ses compos et sa prod (conclusions des morceaux abruptes, intros un peu répétitives, changements d’effets un peu “bruts” parfois, le piège du 100% live…) permettra au groupe pour ses prochaines productions de monter encore une marche vers un l’excellence. On les imagine pouvoir la toucher du doigt dans les prochaines années, et en attendant on appréciera de croiser leur route en live, où leur énergie devrait trouver toute sa place.
https://www.youtube.com/playlist?list=PLsA0vEfYP4i1FwA3Dd2GbsNlMQ5Uu9DrQ
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