Le patient du jour se prénomme… Floor… oui c’est bien ça : Floor.
Le patient susnommé présente à la première écoute une forme de trouble de la personnalité multiple. En effet une certaine alternance de personnalités semble se produire au fil des morceaux sans que le patient, ce Floor, ne puisse apparemment le contrôler. Mais ce cas ressemble fortement à un cas plus renommé. Un certain Torche, non ? En effet et pour cause à la genèse de Torche il y avait Floor mené également par Steve Brooks.
Première rencontre discographique avec le groupe pour ma part. Le groupe existe depuis 1992, n’a jamais réussi à sortir quoi que ce soit d’autres que des singles avant 2002, pour splitter en 2003, se reformer en 2010 et sortir un nouvel album en 2014… Ca a de quoi jouer sur les nerfs effectivement.
Et ça commence très fort avec la chanson éponyme de l’album : « Oblation » : riff massif joué à l’unisson par deux guitares sous-accordées, au diable la basse à deux grattes on fera sans aujourd’hui, et une batterie qui matraque. Puis ce qui frappe d’entrée c’est le chant ! Cette voix ! Mais c’est qu’il a une voix claire ! Une voix claire ! On finit par oublier que le chant sonne bien aussi sans glaviots au fond de la gorge, sans whisky pour brûler les cordes vocales, sans fumée pour enrouer la glotte. C’est donc une belle voix claire qui nous accueille. Pas d’une puissance inouïe mais avec ses lignes originales gonflées de mélodies, Steve Brooks, à la guitare et au chant, nous rappelle ainsi que le son « Torche » tient pour beaucoup de lui. Ce décalage pop/sludge unique. Ici plus que du sludge, on lorgne même vers des horizons doom.
Deuxième morceau « Rocinante », on accélère un peu le tempo même si on reste dans la même démarche et on finit sur une pesanteur doomique. On commence par se faire attraper par cette approche qui déroute. Les guitares sont crades mais le son est clair. Ca sonne froid et gras à la fois. La voix est douce et les riffs suintent. C’est pesant et doux en même temps, contraste de mélodies et de plans lourds. On ne sait jamais sur quel pied dansé, bien que danser est certainement la dernière chose que donne envie de faire le trio. Les troubles psychotiques du groupe sont réels, c’est comme si votre meilleur ami était serial killer.
Pour éviter le sentiment de répétition, le groupe sait se jouer de quelques breaks punks, claque des riffs parpaings à tour de bras, pond des mélodies entêtantes, sort des petits interludes instrumentaux et surtout boucle le tout en moyenne en 3 minutes pour chaque morceau. L’efficacité pop au service d’un sludge/doom de derrière les fagots. Ecoutez « Sister Sophia » et vous comprendrez. Néanmoins ça s’enchaine tellement que sans crier gare, les nuances pourraient presque vous échapper. Ca rendrait presque l’album inoffensif pour un tueur en série.
C’est finalement quand le groupe se pose, que la magie est totale. « Sign of Aeth » et ses près de 8 minutes de synthèse d’album. Là l’atmosphère a le temps d’être posé, les breaks le temps de se développer, les riffs le temps de s’appesantir, la voix le temps d’envouter. Quel dommage que l’album ne se clôt pas ainsi, les deux morceaux de fin faisant plus figure de bonus « il y a en a un peu plus, je vous le laisse ».
De par certains arrangements et mélodies, je dirais que Floor fait de la cold wave-sludge. Ce côté désenchanté, un peu mélancolique, fait de contraste. Ca ne s’écoute pas à la fraîche au levé du soleil. C’est un disque entre chien et loup. La pénombre n’est pas totale, il fait encore assez jour pour ne pas avoir besoin de lumière. Mais pour percevoir la richesse qui nous entoure, il faut être attentif. Le nom de l’album fait référence à une offrande, mais ce n’est pas une musique qui se donne si aisément. Attardez vous sur ce patient, c’est un cas d’école.
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