La rosette, les quenelles, le saucisson brioché, la tarte à la praline, la cervelle de Canut… La région lyonnaise n’est pas avare en spécialités culinaires à haute teneur en calories. Des mets qui ont du goût, qui tiennent au corps et qui font instantanément monter votre taux de diabète et de cholestérol en flèche. Mais Lyon est également l’une des grandes capitales du stoner hexagonal, à égalité avec Nantes, Bordeaux et Paris. Le collectif Lyon Stoner Doom s’emploie d’ailleurs depuis plusieurs années à promouvoir la scène stoner de la capitale des Gaules et l’une de ses têtes de gondole se nomme Goatfather.
Goatfather sévit dans nos contrées depuis 2014. 2016 vit la sortie de Hipster Fister, premier coup de semonce qui prouva au monde entier que le stoner hexagonal n’avait rien à envier aux autres scènes européennes et mondiales. De nombreuses dates, notamment aux côtés de Mars Red Sky, Stoned Jesus ou encore Planet of Zeus, ne feront qu’asseoir la réputation des lyonnais. Et en cette rentrée 2021, nos quatre gaillards se font un plaisir de nous balancer à la tronche un nouvel opus, sobrement intitulé Monster Truck, un titre qui en dit long sur les intentions de Goatfather.
Et en effet, dès le titre d’ouverture « Convoy », une seule solution possible : s’écarter du chemin pour ne pas se faire écraser par un rouleau-compresseur sonore. Une mise en bouche idéale pour ouvrir cet album qui continue avec un « Punish the punisher » aux guitares rutilantes. Le propos se muscle, tant au niveau du son que de la voix rauque et velue de Yann (affectueusement surnommé Olaf). On s’imagine aisément au volant d’un énorme truck américain, coude à la portière et pied au plancher sur une highway déserte. Ce n’est certes pas très original mais alors, c’est sacrément efficace, notamment le final qui ne fera aucun prisonnier et mettra à coup sûr le feu à la fosse.
« Blood of my brother » calme (un peu) le jeu avec, toujours, ce son monolithique et pachydermique, marque de fabrique du groupe. Amateurs de solis travaillés et d’effluves psychédéliques, passez votre chemin ! Du moins, écartez-vous du chemin de ce Monster Truck qui n’aura que faire de vos chemises à fleurs et de votre dégaine de hippie ! Goatfather vous filera un T-shirt noir orné d’une belle tête de mort (ou de bouc, du coup !) et vous fera troquer votre combi VW contre un sublime Peterbilt. Le titre éponyme ne ralentit pas la cadence avec, toujours, cette efficacité sonore qu’on pensait réservée aux groupes d’outre-Atlantique (hormis l’accent à couper au couteau de l’ami Olaf !).
Juste le temps de reprendre son souffle et de retourner la galette que « Don’t give up » reprend le rythme de plus belle avec un mid-tempo idéal pour un headbanging entre potes. « Mile after mile » poursuit la route de ce concept-album (car c’en est un, en quelque sorte) pour vous plonger cette fois-ci dans un tunnel sans autre lumière que celle des phares de votre truck filant à toute allure dans la nuit. Puis, comme pour annoncer la fin de cette démentielle virée, « In your face » vous prend par la gorge et fait dévier de sa trajectoire votre semi-remorque à grands coups de riffs dévastateurs et de hurlements sanglants. Ne reste qu’à déguster « Shelter », votre truck ayant définitivement quitté la route pour aller s’écraser au fond d’un ravin avec pour seul compagnon un doux mélange d’effluves de carburant, de sueur et de sang.
Monster truck est donc une redoutable machine de guerre. Goatfather a enfanté un truc tellement lourd et puissant qu’il tient la dragée haute à nombre de groupes internationaux dans un genre embouteillé et dans lequel pour se faire une place, impossible d’y aller en douceur. Il faut jouer des coudes et bousculer la concurrence. Ou leur rouler dessus, c’est encore plus efficace !
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