Je ne sais pas exactement comment on dit « grosse paire de gonades conquérantes » en italien mais si le terme n’existe pas, « Isaak » pourrait être celui-ci. Avec « Sermonize » les transalpins balancent un skeud gros et gras comme un burger trois steaks, une galette luisante dont l’équivalent culinaire serait le kouign-amann breton.
La face A du nouvel album renvoie à une part intéressante de la ville de Gènes, berceau du quartet. Enclavée entre la montagne et la mer, la cité est parcourue de petites routes sinueuses, bordée d’édifices, d’immeubles, envahie de 2 roues, balafrée par la crise industrielle, reine de la culture et de la violence en 2004. Cette voix saturée introductive, dégueulée sur cette guitare nirvanesque, emprunte la même sensation d’étouffement que procure la capitale de la Ligurie. A l’écoute des premiers morceaux, j’ai la même impression angoissante qui m’écrase la poitrine que lors de ma venue dans le port italien. La faute à cette production massive, à ce savoir-riffer dévastateur. On ne respire pas lors de cette première phase. On en prend plein la gueule, on encaisse comme on peut. Ça rock et ça roll à la Lo-Pan. Ça délie velu sur « Fountainhead », ça n’oublie pas ses petits effets de voix 90s sur « Almonds and Glasses ». On pourrait glisser l’intercalaire Isaak entre ses contemporains Desert-Storm et Albatross Overdrive sans peine.
Retourner le vinyle, prendre la peine de respirer ou d’expirer son Yeah (Kyuss) et nous voilà sur la face B.
Que reste-t-il de nos poumons atrophiés après la première partie ? Les italiens vont-ils insuffler un poil plus d’oxygène sur le retour ? Et bien oui, pas immédiatement mais « Lesson N°1 » apporte un groove bien connu et permet de prendre le premier bateau, de quitter le port italien et de voguer vers la lointaine et désertique Amérique. La face B est moins ramassée en production et puissance, elle permet même de reprendre ses esprits. Jusqu’à ce point final étonnant, et, finalement, intéressante porte vers le futur des italiens. « Sermonize » le morceau-titre, est une ballade éthérée, presque acoustique, aux chœurs léchés, à l’intention touchante. La simplicité des arrangements et le dépouillement éclatent après les parpaings massifs précédents, et on se prend à rêver d’un album futur plus imprégné de ce genre d’ambiance.
Au final, le nouvel essai d’Isaak est une réussite, tant au niveau composition que production. Toutefois l’aspect linéaire de l’ensemble, la redite de certains riffs, cette volonté de foncer pied au plancher peut fatiguer. Les codes sont bien assimilés, la technique est juste, reste à ajouter ce petit plus personnel qui fera du prochain album des transalpins un riffing-class-album. Et ce petit plus tient peut-être dans ce titre final. A vous d’en juger. « Sermonize » est donc une belle et importante étape dans la discographie d’Isaak mais pas encore son chef-d’œuvre. Ah, et oui, la pochette, signée Richey Beckett, est l’une des plus belles de cette année. Rien que ça. Une belle étape donc.
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