Les Sudistes sont de retour et quel retour ! Cinq années après Angel Lust, le quatuor de Montpellier nous envoie un album carrément énorme qui souffre toutefois d’un défaut conséquent : il ne comporte « que » 8 titres (et quels titres mes cadets !) et j’aurais bien aimé m’en taper quelques-uns de plus tirés de la même vieille barrique de whisky clandestin.
Pour ce troisième album – toujours sur la structure Head Records – le groupe a carrément pris son temps afin de peaufiner la chose dans le moindre détail et je les remercie des efforts déployés pour me faire remuer les cervicales et/ou battre le sol du pied à chaque mesure. Transpirant le bayou des environs de Nola, So Said The Snake, se consomme d’une seule rasade sans appuyer sur skip, sans enclencher le mode aléatoire et sans y insérer des plages issues d’autres productions aussi bonnes fussent-elles ! C’est un LP élaboré dans les règles de l’art avec la patine des temps jadis ; le temps où l’œuvre des artistes était abordée dans l’ordre comme un tout et pas réduite à un étal à dispo pour y piocher quelques éléments !
Avec ses riffs appuyés, sa rythmique plombée et ses vocaux burinés à l’alcool de contrebande, cette plaque capte l’auditeur de bout en bout en maintenant parfaitement la tension entre le sludge dégueulasse et le heavy blues distordu.
« Useless Prick » et surtout « The Story Of Joe Buck » incarnent merveilleusement le côté plus apaisé de cette costaude pièce en laissant la part belle à des parties chantées, à la limite des plans de crooner déglingué, appuyées par des plans de guitares se déployant dans la retenue avant d’aller dégouliner par tous les pores des enceintes pour envahir le premier plan. Il est tout aussi appréciable de se cogner ces plages à un volume malsain, que compliqué de s’extraire ensuite de la tête les riffs qui tournent tout au long de celles-ci !
Côté plus bourrin, les Lourds vont foncer sur « Fairy Tales », « 777 » ou l’imparable « 7am Zombie » qui est une réussite du genre avec son intro parlée de Charles le gourou sanguinaire californien. Empreinte d’urgence, cette composition blaste sa maman avec un tempo véloce, des refrains collés et un énorme solo de gratte comme on les mitonnait dans les eighties.
Ce disque ne serait toutefois pas ce qu’il est sans son titre le plus long et franchement le plus bandant : « The Snake ». Illustration parfaite de la tension de cet album, cette plage de clôture rivalise avec ce qui se fait de plus mieux à l’international : tournoiement d’accords plaqués hargneusement contre le manche, rythmique grasse voire collante et chants éraillés semblant inviter l’auditeur à s’auto-distribuer des baffes sans s’arrêter pendant des heures ; une réussite comme on dit au pays des charbons ardents !
Ces quatre garçons dans les brumes du bayou des rives de la Méditerranée déploient avec talent l’héritage d’une certaine Amérique glauque et trash en s’inspirant des films de série B, voire Z, ainsi qu’en prenant pour référence un sud des États-Unis aussi rude que rêche. Mudweiser confirme tout le bien que je pense d’eux avec So Said The Snake et ne peut que me faire nourrir des regrets quant à leur absence remarquée en dehors de l’Hexagone.
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