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Mudweiser – The Call

Comme un phénomène cyclique familier et rassurant, tous les quatre ou cinq ans les gars de Mudweiser alignent leurs agendas (remplis pour certains d’entre eux de tournées et d’enregistrements de leurs groupes respectifs), se retrouvent dans un studio, autour de valeurs musicales communes, et sortent un nouveau disque. Même s’il s’agit au final plutôt d’un projet que d’un groupe en tant que tel, Mudweiser existe depuis si longtemps maintenant qu’ils font partie du paysage, une sorte de valeur refuge de notre horizon musical, et en enfournant ce The Call, on espère bien fort qu’il nous laisse la même bonne impression que leurs précédentes publications.

En tous les cas, l’écoute intensive de la galette ne laisse pas longtemps planer le doute sur la ligne directrice de l’ensemble : on est bien dans la continuité de leurs précédents LP, à savoir un stoner rock nerveux et accrocheur, mais jamais monolithique. Le quatuor a le bon goût de ratisser large, et l’on passe sans s’ennuyer de glaviots bien énervés (“High Again”, “Reckless Dream”…) à des mid-tempo mélodiques accrocheurs (“Sister Mary”, “Sad Man”…). Même si l’on pense occasionnellement aux grands noms du stoner californien (sur “Daughters” notamment, en particulier son break central, très malin, ou encore sur “The Hunt” et son riff surgras, option bitume chaud), on revient vite au bercail pour apprécier en tant que telle l’identité propre que se construit le groupe depuis maintenant plus de quinze ans, en s’éloignant de l’ombre de ses aînés (le groupe n’ayant jamais craché sur ses influences pour autant).

Avec plus de recul toutefois, se détache quand même cette impression d’une plus grande colère sur ce The Call, d’une certaine noirceur. Est-ce l’appréciation subjective de votre serviteur, baigné ces derniers temps par un climat mortifère qui influe sur sa perception ? Ou bien est-ce lié à l’approche du groupe, plus sombre et plus coléreux ? Même si ça ne résume pas l’album, cette tendance se confirme : Mudweiser a (un peu) levé le pied sur le groove et les plans plus fun, pour y aller plus franchement sur les passages rageurs et pêchus. Le riff est dru et énervé (voir “Blasted Forever” ou encore le pourtant fun “Invitation” qui donne quand même l’impression de prendre une bonne baffe), et les atmosphères se font aussi plus dark parfois, presque doom comme sur “Daughters” ou “Sad Man”. Cette subtile descente vers des pans musicaux plus obscurs est à la fois le fruit du travail vocal de Reuno (dont le chant naturellement rageur sert impeccablement chaque plage), mais aussi des lignes de basse très présentes de Jay (par ailleurs membre des joyeux lurons de Verdun) ainsi que du retour au bercail de Said (qui reprend le manche de la 6-cordes à Ole, après un intérim de plus de 8 ans et deux albums), qui abat un travail remarquable lui aussi, en rythmique et en lead.

Quoi qu’il en soit, The Call est un album abouti, celui d’un groupe qui a passé sa crise d’adolescence : solide, nerveux, et souvent sérieux, le jeune adulte n’a néanmoins pas complètement perdu son âme d’ado désinvolte, proposant toujours quelques belles pièces groovy plus légères pour faire bonne mesure. Trop courte toutefois (35 minutes c’est un peu frustrant) cette galette saura délivrer quelques moments de grâce aux amateurs d’un stoner rock racé, efficace et intègre. Un plaisir devenu trop rare, dont on n’a pas envie de se priver.

 


Note de Desert-Rock
   (8/10)

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