Le quatuor londonien Poseidon (des anciens de Light Bearer, pas des perdreaux de l’année) proposent leur premier disque, qui sort chez Ripple, un label globalement qualitatif mais décidément pas très sélectif en terme de style musical. Ce Prologue, puisque c’est de lui que l’on parle, justifie doublement son patronyme : il s’agit non seulement du premier disque du quatuor, mais aussi du premier opus d’une série de disques qui détailleront – je cite – « l’effondrement de la civilisation et sa reconstruction, le tout sous la forme d’un opéra de science-fiction post-apocalyptique ». Diantre… Un sacré programme en tout cas qui nous promet potentiellement un paquet d’albums derrière, s’ils veulent détailler le concept en long et en large… le sujet est porteur ! On entame cet ambitieux programme (plan de carrière ?) par une mise en bouche costaude, sous la forme de cette galette forte de quatre gros morceaux – c’est le cas de le dire…
L’album commence sous les meilleurs augures avec ce massif « The Beginning, the End, the Colony », un morceau de doom costaud et saturé, sorte de mix entre Hooded Menace (en moins hargneux), Monolord et le Pallbearer pré-2016… Le titre tourne bien, on ne s’ennuie pas, il vadrouille un peu en tous sens (le groupe n’a pas à justifier l’étiquette « progressive » qu’on accole souvent à son style musical…). Une bonne entame. Quand on propose un album de quatre chansons, on peut considérer plutôt couillue la décision d’en proposer une de huit minutes en électro-acoustique… « Mother mary Son of Scorn » est une balade sirupeuse et, reconnaissons-le, assez catchy. Malheureusement, enrobée de quelques arrangements assez convenus (quelques notes de piano, un solo électrique larmoyant en fond sonore…), elle n’apporte pas grand-chose à l’exercice, si ce n’est de démontrer la capacité du groupe à élargir son spectre sonore. Un peu léger, à tous égards. « Chainbreaker » lui emboîte le pas, un titre un peu bipolaire, avec une première section plutôt lente et quasi-doom, et une seconde tendance power-metal/thrash avec ses riffs tranchants et son chant beuglé avec conviction. Là encore, la chanson est propice à deux points de vue différents : on peut apprécier la démonstration d’une corde supplémentaire à l’arc du groupe, tout comme on peut encore une fois s’étonner du manque de fil conducteur sur cette galette… L’album se termine sur « Omega », un titre tortueux qui développe un doom fortement métallisé, protéiforme en tout cas, avec des accents gothiques parfois qui fonctionnent pas mal. Enfin, c’est quand même pas du Yob…
S’il est une cohérence à trouver tout du long, elle porte sur les pans les plus métalliques de la musique du groupe, qu’ils tendent alternativement vers le doom, le gothique, le heavy… Les fans de stoner les plus classiques seront vertement refroidis par les plans heavy les plus incisifs et le manque de « chaleur » d’une production qui aurait mérité un peu plus de nuance parfois. On sent un groupe ambitieux, qui veut beaucoup montrer sur son premier disque, au risque de se disperser…
Trois quarts d’heure de musique ont défilé finalement sans trop que l’on ne voie le temps passer : Poseidon charge ses compos de tant de matière, structures, sons, riffs, rythmes… que l’on est bien obligé de constater que même après de nombreuses écoutes, on ne s’ennuie pas. Pour autant, on n’est jamais subjugué par ses fulgurances, ni terrassé par la portée de ses riffs : l’album est intéressant mais ne propose pas de vrai moment de grâce. Prologue est toutefois un bon disque, prometteur pour un « nouveau » groupe, et en tout cas la première pierre d’un intéressant projet artistique musical, que l’on suivra avec intérêt sur la sortie de leurs prochains albums ; il est bien possible qu’en ajoutant des strates complémentaires, le prisme dans lequel s’inscrit ce Prologue ne prenne une toute autre dimension. Nous verrons…
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