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Scott Reeder – TunnelVision Brilliance

Pas évident de rester objectif face à un tel album. Scott Reeder, outre le fait qu’il déborde de talent et présente un CV à faire pâlir d’envie n’importe quel bassiste, bénéficie également d’un énorme capital sympathie chez ceux qui connaissent un tant soit peu le personnage.
C’est néanmoins la surprise, voire la déception, qui s’empare de l’auditeur une fois ce CD enfourné. Reeder prend tout le monde à contre-pied en proposant treize titres essentiellement électro-acoustiques à mille lieues de ce qu’il a pu faire avec The Obsessed, Kyuss ou Goatsnake, groupes pour lesquels il n’a néanmoins jamais été qu’un musicien de passage et pas un membre fondateur. Ce qui ne l’a pas empêché de contribuer occasionnellement à l’écriture de certains morceaux, fait d’autant plus remarquables lorsque les leaders s’appelaient Wino ou Josh Homme.
On pourrait trouver mille influences et autant de comparaisons, mais comment un album composé et enregistré sur une période de 18 ans peut-il souffrir ce genre de procédés ? On imagine que sur un tel laps de temps, Scott a du emmagasiner assez de titres pour sortir trois albums, dont un aurait pu être farouchement heavy. Lui a préféré sortir les chansons qui lui tenaient le plus à cœur et on ne peut que respecter ce choix. Par contre, le traitement donné à ces compos est beaucoup plus discutable. On sait que Scott vit depuis quelques années reclus dans sa ferme, consacrant son temps à l’élevage de toute une ménagerie. Ce cadre champêtre aurait pu influencer le son de cet album, lui donner un côté très organique, très dépouillé. Au lieu de cela, on se trouve face à des morceaux parfois surchargés d’effets, la guitare semble horriblement synthétique à quelques exceptions près (« When ») et on regrette souvent l’utilisation abusive de Pro Tool. Quand Scott troque la batterie pour une boîte à rythme et un séquenceur (« For Renee », « Fuck You All »), on se dit que si le mix mettait moins la voix et la guitare en avant, on se retrouverait avec un morceau de Trip-Hop quelconque. Et que dire de « Away » qui sonne comme du Tangerine Dream dans sa période la plus pénible ? On en oublie même qu’on a ici affaire à un dieu de la basse, fort discrète excepté sur « Queen of Greed » pour lequel Scott ne recourt qu’à son instrument fétiche. Au milieu de tous ces titres légers et aériens empreints de mélancolie, seuls « Diamond » et « Day of Neverending » pourraient séduire les inconditionnels de rythmiques qui roulent et de riffs acérés, dont il donne une version très personnelle, alors que le break très court de « The Fourth » constitue le seul passage vraiment heavy de l’album.
Malgré des choix de production pas toujours opportuns, « Tunnelvision Brilliance » comporte son lot de compositions de qualité portées par la voix très agréable de Scott Reeder et exécutées de façon honnête mais sans grande originalité. Certains seront séduits, d’autres crieront à l’hérésie mais personne ne restera indifférent face à ce disque très (trop ?) attendu.

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