Sigiriya est probablement l’un des groupes les moins actifs depuis leur début de carrière, il y a un peu plus de dix ans de cela. Un groupe discret, donc, et peu (re)connu, en tout cas pas à la hauteur ni de son pédigrée, ni de ses qualités. Car pour rappel, le groupe s’est créé avec 80% des musiciens des extreme-doomeux d’Acrimony (quelques années après le split), gage de qualité s’il en est. Et même si finalement seuls deux musiciens d’Acrimony restent dans la formation actuelle, leur guitariste, Stuart O’Hara, a aussi traîné ses guêtres dans d’autres formations au moins aussi rugueuses (on citera Iron Monkey ou Dukes of Nothing, par exemple). Un beau CV, donc, mais peu d’action ; quelques prestations live éparses, dont quelques festivals, auront maintenu en tension une poignée d’amateurs, mais c’est peu. La perspective d’un nouvel album, leur troisième, plus de six ans après Darkness Died Today, nous a donc mis dans tous nos états.
Maiden Mother Crone est un disque dense et il est difficile d’en percer la coquille en quelques minutes, ni même quelques écoutes. Leur son et style musical n’a pas beaucoup changé avec les années : Sigiriya propose toujours un stoner âpre, pesant et puissant, une sorte d’hybride de sludge, de metal et de stoner. Une passion pour le mid-tempo pénétrant et lugubre, une machine à headbanging calée sur un riffing de premier choix. L’intégration (depuis plusieurs années maintenant) de Matt Williams au chant apporte un vrai facteur différenciant au groupe, qui bénéficie d’un vocaliste puissant et efficace, désormais un marqueur bien établi de l’identité sonore du groupe. Le reste, outre une section rythmique en béton, repose sur les solides épaules du susmentionné O’Hara, véritable guerrier de la 6-cordes, artisan aussi à l’aise dans l’orfèvrerie fine que dans la démolition lourde : le gaillard dresse des ambiances sonores à couper au couteau, qui donnent à l’album et à ses compos une densité remarquable. Il occupe aussi souvent le premier plan à travers des leads jamais démonstratifs mais toujours bien sentis (les soli sur « Cwn Annwn », les leads de « Arise »). Il est aussi responsable d’une série de riffs et mélodies remarquables (« Mantis », « Piece of my Mind »). Intégré dans un travail d’écriture d’une grande finesse (!), mêlant intelligence et efficacité, le talent de O’Hara se greffe à l’inspiration de ses collègues pour produire une série de titres imparables.
L’acte volontaire de se confronter à ce disque un peu rude de premier abord devient progressivement payant, et l’on se félicite vite d’avoir donné sa chance au produit. Maiden Mother Crone s’avère être un disque fort et marquant. Un disque qui colle aux pattes, addictif, dont on a du mal à se défaire. Un disque sans temps faible (huit chansons pour 45 minutes, probablement le format le plus efficace), où se mélangent des émotions de toutes natures, des inspirations riches et une somme de talents remarquable. Un disque pas facile, mais le plaisir se mérite.
Un extrait :
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