En 2017, Moonspell a fait couler de l’encre (noire) en sortant 1755, son premier album entièrement chanté en portugais. De nombreux journalistes ont alors vanté la prise de risque et la fraicheur de la démarche, tout en louant les accointances sonores du portugais avec la musique dépressive et métalique. Sinistro pourtant le fait avec talent depuis 2012 et a, en publiant Semante en 2016 chez Season Of Mist, pu diffuser son propos à grande échelle, au Roadburn principalement, puis lors d’une tournée en ouverture de Paradise Lost (dont ils reprennent par ailleurs « Nothing Sacred » en bonus sur ce disque). Débuté en tant que groupe de doom bruyant et instrumental, Sinistro a trouvé son rythme en s’adjoignant les services de Patricia Andrade lors d’une collaboration commune. Cette dernière apporte alors murmures et enchantements à un groupe qui s’adapte et mélodise son propos. La musique de Sinistro s’enrichit alors de samples et autres nappes de claviers discrets, se fait atmosphérique, entre accalmies sensuelles et explosions de distorsions maitrisées.
Sur Sangue Cassia, les lusitaniens reprennent la formule de leur album précédent, oscillant entre un rock atmosphérique à la durée radiophonique et aux refrains susurrés (« Petalas ») et un doom éthéré, symbolisé par la jolie réussite que représente « Lotus ». Le reste de l’album est de cette veine, convoque quelques astuces de production rendant le propos moderne, maîtrisé. « Lotus » donc, ainsi que son morceau d’ouverture « Cosmos Controle » et de clôture « Cravo Carne » sont trois délicieuses raisons de se pencher sur ce disque. Mais hélas, trois fois hélas, Sinistro cède facilement aux sirènes de la mélodie molle et calibrée, rendant son écoute d’une traite assez ennuyeuse lorsque l’on est un tant soit peu habitué à prendre plaisir dans le bruit et la fureur des guitares qui s’entrechoquent. « Vento Sul », « Gardiena » ou « Nuvem » sont de parfaits exemples de ce que « Petalas » promeut et qui ne m’intéresse pas. Pour le reste (on est pas loin de parler d’une petite moitié de disque intéressante au final), l’équilibre fragile entre sensibilité et puissance mérite l’oreille, malheureusement distraite par les complaintes habilement épurées de violence qui permettront sans nul doute au groupe de fédérer de nombreux auditeurs, mais qui me donnent à moi envie de passer au plus vite à autre chose. A vous de voir alors si vous voyez le verre à moitié vide ou à moitié plein.
Point Vinyle :
Classique Season Of Mist, quelques éditions couleurs (100 clear, 100 green dark opaque et 250 en Red Transparent) pour les plus forcenés et une version black facilement disponible. La meilleure configuration possible ? Probable.
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