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Slomosa – Tundra Rock

Le parcours de Slomosa ces dernières années est des plus étonnants : apparus en 2020 par la petite porte via un premier album sorti sur un label norvégien confidentiel (nous étions peu de médias à en parler à sa sortie), leur réputation s’est peu à peu accrue sur l’année suivante. Mais c’est véritablement en 2022 que l’aura du groupe s’est développée, en particulier du fait d’une farouche volonté d’aller sur les routes chercher son public et convaincre : près de 80 concerts seront donnés cette année-là (et une soixantaine en 2023), dans toutes les configurations (headliners en clubs, mais surtout premières parties pertinentes et passages remarqués en festivals, dont le Hellfest). Le groupe n’y aura pas seulement gagné en reconnaissance, mais aussi en assurance scénique, assumant ce choix fort de se construire sur et pour la scène (un choix prégnant aussi sur ce nouveau disque, on va le voir) .

Enregistré depuis de nombreux mois, ce second album, Tundra Rock (d’après le groupe, c’est littéralement leur “desert rock” à la sauce norvégienne…), nous parvient enfin, avec une sacrée pression à gérer pour le groupe, qui va se confronter à des attentes très variées, proportionnelles à l’enthousiasme suscité ces dernières années.

Leur premier album reposait sur une poignée de petites perles de compos à l’efficacité remarquable (« Kevin », « There is Nothing New Under The Sun », « Horses » et quelques autres) qui tiraient le reste des titres ; ces derniers étaient de bonne qualité, mais moins “décisifs”. Sur Tundra Rock, les « locomotives » sont moins marquantes… parce que le niveau général est plus élevé !

Rappelons par ailleurs que plusieurs chansons étaient déjà connues depuis plusieurs mois (“Rice”, « Battling Guns » et « Cabin fever » lâchées en exclu depuis longtemps, « Afghansk Rev », « Red Thundra » et d’autres déjà jouées en live…), rendant l’écoute du disque assez familière, mais aussi un peu décousue. Mais le constat global émerge assez vite, inexorable : l’échantillon proposé se révèle impeccablement ciselé, si bien qu’il est difficile de faire ressortir des titres qui sortent du lot, qualitativement. Quelques chansons se distinguent par leurs traits caractéristiques toutefois : « MJ » et son riff robot-rock trouverait sa place directement entre les deux premiers albums de QOTSA (même le chant de Ben sur le lancement du refrain rappelle Homme). « Monomann » fait directement écho au percutant « Kevin » du premier album, avec son couple “riff 4 étoiles” / “rythmique pied au plancher”. « Dune » développe les (discrètes mais bien présentes) influences orientales du groupe à travers une rythmique toute en percus et des sonorités inédites. Quant au très remarquable « Red Thundra », il démontre une maturité d’écriture difficile à contester : lancé sur le délicat filet de voix de Marie et sa modeste ligne de basse, le titre se densifie au gré de l’adjonction des différentes strates instrumentales. Il installe plusieurs séquences mélodiques très intéressantes, jusqu’à son final mêlant tension et élévation (!)… le tout en à peine plus de cinq minutes. Bluffant.

Chaque chanson mériterait sa propre mise en lumière, mais on préfèrera mentionner un autre élément de diagnostic, qui s’applique à 100% des compos : elles sont toutes parfaitement adaptées à une version live. On peut, pour chaque morceau, se projeter sur les arrangements parfaitement opportuns qu’une transposition live nécessiterait (ou permettrait). La production du disque va dans ce sens, avec une véritable cohérence sonore de tous les instruments sur l’ensemble de la galette. Comme pour assumer cette orientation, consciemment ou pas, Slomosa place « Afghansk Rev » en intro de son disque… comme lors de ses concerts !

Tundra Rock, malgré une approche moins « directe » que son prédécesseur, se révèle être un album d’une qualité remarquable. Riche en titres efficaces (véritables machines à fredonner et/ou headbanguer) il apporte une densité vraiment bluffante, assortie d’une homogénéité stylistique et qualitative que l’on est surpris de retrouver chez un groupe finalement si jeune. Entendre ces chansons en concert devient une attente évidente, qui sera vite satisfaite (le groupe ayant déjà testé bon nombre de ces compos sur les planches, et s’engageant par ailleurs sur un gros rythme de concerts pour les mois à venir…).

Plus largement, Slomosa se révèle en leader d’un mouvement régénérateur du stoner rock, et le fait dans une démarche humble mais intègre : en s’appuyant sur les racines du genre et en s’inspirant de ses groupes emblématiques, le quatuor développe son style basé sur le plaisir musical et l’efficacité. Sans aucune prétention de sa part (loin s’en faut), il devient évident que dans sa dynamique il est en passe de devenir l’un des plus grands groupes du genre… quitte à se heurter au plafond de verre inhérent à ce style musical ? On verra bien dans quelques années, ne boudons pas notre plaisir d’aujourd’hui et écoutons à nouveau ce délicieux Tundra Rock.

 


 

 

Note de Desert-Rock
   (8.5/10)

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