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Sourvein – Will To Mangle

Ouch ! Voilà quatre ricains manifestement très remontés qui semblent extérioriser la somme de leur désespoir sur un disque à la tonalité réellement tragique. Mise en scène particulièrement efficace de la rage qui les ronge, la musique de Sourvein est une célébration de la colère. Scrutateurs d’un monde qui s’obstine à ne bâtir qu’un champ de ruines, ces trois mecs et cette nana (à la guitare) ont élaboré une esthétique de la lacération et de la mutilation (comme l’indique le nom de l’album). Ce disque est un hallucinant rappel à l’ordre pré-apocalyptique à l’adresse d’un monde à la dérive. Alors qu’il devrait instiller la terreur et donc l’évitement, sa force réside cependant dans son pouvoir d’attraction qui conduit à en multiplier les écoutes. Car comment résister au déversement de ces montagnes de riffs monolithiques et tranchants ? Comment ne pas plier de bonheur sous les martèlements pachydermiques de la batterie ? Comment ne pas se soumettre avec extase à ce déluge de hurlements saturés frôlant la démence ? Comment ne pas se laisser enivrer par ces rythmes lents et indolents agrémentés de ci de là de quelques hammer iommiesques et gimmicks winoesques ? Et pour couronner le tout, comment ne pas succomber à la production toute en épaisseur noire de l’incommensurable Billy Anderson (je ne sais plus quel qualificatif utiliser à son propos : sorcier, magicien, pape, dieu, extra-terrestre ?). Sourvein c’est un peu Sleep en plus dur, High On Fire en plus groovy, Electric Wizard en plus sauvage. Tout simplement inouï. Si Sourvein opère dans un périmètre réduit, il n’en est pas moins parvenu à se forger une identité très forte. Le titre « Carveblind » en est probablement la plus belle illustration. Après nous avoir maintenu, pour notre plus grande joie, le nez dans la réalité la plus sombre pendant sept morceaux, « Dirgewine » qui clôt le disque, nous offre la plus belle des conclusions : synthèse des titres précédents (immanence), suivi d’un solo lumineux (transcendance) avant de basculer à nouveau dans la barbarie du monde physique. Un disque dur certes, mais surtout somptueux. Aussi divin que l’enfer.

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