Un son unique, mélange de stoner instrumental et de heavy progressif, des artworks beaux comme des toiles de maître, des concerts mémorables à travers nos contrées mais aussi en Europe : c’est peu dire que les Manceaux de Stone From The Sky ont, depuis 2014, réussi à marquer de leur empreinte la scène stoner hexagonale et européenne. Novembre 2021, voici que déboule la quatrième offrande studio du combo (qui vient de s’attacher les services d’un nouveau batteur), intitulée Songs From The Deepwater. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’artwork est au moins aussi sublime que les précédents, avec cette nuée de murènes protégeant jalousement le logo du groupe. Pour le côté visuel, c’est un sans-faute… Et pour la musique ?
D’emblée, on est plongé dans une ambiance cotonneuse et éthérée avec Godspeed, ses délicats arpèges de guitare, ses percussions qui vous caressent les oreilles, cette ambiance à la fois orientale et vaporeuse, comme au temps des meilleurs méfaits des maîtres du prog des seventies. Mais en un peu plus musclée malgré tout ! Une mise en bouche idéale, d’une part parce qu’elle donne furieusement envie d’en savoir plus et que d’autre part, on sent le groupe au sommet de son art, un art qu’il maîtrise toujours à la perfection. Stone From The Sky navigue désormais dans les eaux du post-rock et délaisse le côté psychédélique de ses compositions pour quelque chose de bien plus lourd, avec un son de basse plus épais, plus présent. Des noms comme Caspian, voire même Russian Circles, viennent à l’esprit. Des pointures du genre, que Stone From The Sky s’amuse à titiller. Pas un vain compliment !
Le Squinfus (drôle de titre !) enfonce le clou et se présente comme le titre le plus costaud de toute la discographie du trio. Préparez-vous à déguster un bon gros pot de rillettes durant six minutes éprouvantes mais grisantes ! Karoshi calme (un peu) le jeu avec un son bien plus apaisé, moins brutal mais tout aussi beau. Un titre qui démontre une fois de plus que SFTS a mûri et a parfaitement apprivoisé ce nouveau line-up (bien que l’ancien batteur Dylan ait participé à l’élaboration des compositions depuis 2018). Et quel son de basse, encore une fois ! The Annapurna Healer (et son final totalement grandiose et épique) poursuit le voyage et démontre un parfait agencement des titres, qui s’enchaînent à la perfection pour offrir une sorte d’entité globale totalement immersive. Ce n’est pas un album concept à proprement parler mais pourtant, c’est un album d’une cohérence absolue, un voyage de 40 minutes, un parcours initiatique, un envol vers des contrées lointaines et jusqu’ici rarement explorées par un groupe hexagonal.
On poursuit avec City I Angst, le premier extrait dévoilé en septembre dernier, qui dévoile des sonorités à la fois atmosphériques et abrasives. Bien plus prog dans son approche avec ses changements de rythmes et d’ambiances, il démontre tout ce qui fait le nouveau virage entrepris par le trio. Puis arrive 49.3 Nuances De Fuzz (!), son riff qui rentre immédiatement dans votre esprit et ses 7 minutes délectables. Et on termine en beauté avec Talweg, parfaite conclusion (et chantée s’il-vous-plaît !) à cet album dont l’écoute aura été un bonheur de chaque instant, un instant bien trop court et qui sera passé à toute vitesse.
L’exercice de l’album de stoner instrumental est bien souvent casse-gueule et beaucoup s’y sont cassé les dents car difficile d’emporter l’auditeur sans le lasser à un moment donné. SFTS y parvient avec les honneurs et les plus réfractaires au genre devraient y trouver leur bonheur. Le trio Manceau nous offre, avec Songs From The Deepwater, l’un des meilleurs albums instrumentaux de l’année. Et pas seulement français, mais bien de l’année 2021. Un incontournable du groupe et du genre.
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