Tout pousse à imaginer un troupeau de bisons fonçant tête baissée et naseau humide dans les grandes étendues américaines, mue qu’il est, par cette irrépressible envie d’aller brouter l’herbe plus grasse du voisin. Mais le bestiau qui nous fait face est allemand, a plutôt tendance à broyer du tympan et, à défaut d’étendues sauvages, fait virevolter son heavy-prog stoner dans toutes les caves humides de Germanie. Sortie en 2013, « Bunch of Bisons » fut ré-édité en 2014, en vinyle, par fuzzmatazz records et étale sur ses 7 titres un stoner virevoltant, aiguisé à la saucisse, parfait mélange entre influences 70s et impact contemporain, petits-fils moustachu de Deep Purple et Elder.
Enfin un groupe qui redonne ses lettres de noblesse à l’orgue ! Véritable pape des années 60/70s et lien nécessaire entre chaque composante d’un groupe, l’orgue ne semblait, depuis, relégué qu’à un rôle de faire-valoir, d’apport vintage pour sonner « comme avant ». Stonehenge le replace au centre des débats, tant au niveau du son, que de sa place dans les compositions. « Artic Brother », morceau d’ouverture le prouve d’emblée, c’est l’orgue qui dirige le quatuor, suscite le débat et fait progresser le titre. Et de progression, il s’agit. Chaque compo vient tutoyer la dizaine de minutes, assise sur de solides riffs, « Pizza Fonkey », de lignes de guitares plus subtiles, « Kaléidoscope », de chœurs conquérants, « Bunch of Bisons » et de moments de blastkrieg tout en violence, « Concrete Krieger ». On pense à Elder pour l’alambic des structures et la technique des musiciens. D’ailleurs, présentons-les ces conquérants chevaliers du prog. Enny à la guitare et au chant, Johannes à l’orgue, Micha à la basse et Ole à la batterie. Les « german fab-four » nous régalent dans ce premier essai où la maîtrise côtoie des instants de pur rock’n’roll. Écoutez donc « Sun on the asphalt » et osez dire que vous n’avez pas headbangué !
Reste qu’au bout de 6 titres, on tourne un peu en rond vis-à-vis de la formule. Mais il s’agit là d’un premier album, souvent plus « compilation » hétéroclite d’anciens et nouveaux morceaux pour un groupe, que véritable album réfléchi dans sa globalité. Et à l’écoute de « Delay », voilà que l’excitation renaît à nouveau. Le chant est plus poussé techniquement et mélodiquement, la composition sonne plus mature et réfléchie. On sent une influence jammesque courir le long des 11minutes-échine du titre, les ambiances se posent faisant éclater les idées au grand jour. Cette fin d’album laisse entrevoir un horizon radieux pour les allemands s’ils s’entêtent dans cette voie, tant « Delay » est costaud et nous colle un large sourire.
Qu’on se rassure, le combo devrait normalement offrir une suite à ce « Bunch of Bisons » frais et prometteur. On l’espère plus grand, plus fat, plus barré que ce premier jet qui reste, au demeurant, une excellente découverte. Il passe très bien la barre de la première écoute, puis de la deuxième, puis de la troi…, bref il passe très bien à n’importe qu’elle heure de la journée et se marie très bien avec n’importe quel alcool. D’ailleurs « Bunch of Bisons » pourrait être le nom d’un cocktail riche en couleur et agressif au palais. A Stonehenge d’en parfaire la composition.
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