On se retrouve aujourd’hui pour la grand-messe obscure ayant lieu presque tous les deux ans désormais ; pour l’érection de ce quatrième pilier soutenant le monument colossal qu’est en train d’offrir au monde Sunnata. Après Climbing the colossus, le surpuissant Zorya, le fabuleux Outlands, c’est cette année à Burning In Heaven, Melting On Earth de nous propulser dans l’univers sombre et mystique du groupe varsovien.
Sans surprise, on retrouve dans cet opus le doom subtil et complexe, imprégné d’énergie brutale et électrique, véhiculant à nos oreilles et jusque dans nos tripes l’essence presque chamanique de la musique du groupe. Oscillant entre chant clair envoutant et cris saturés proche du grunge et parfois bien sludge, la voix de Szymon se marie à une basse toujours aussi crade et à des guitares, tantôt pachydermiques tantôt éthérées, pour narrer les épopées tragiques d’un autre monde. Prenons pour en témoigner l’exemple de « Black Serpent ».
Ce titre intègre comme sur « A Million Lives » une construction rythmique superbe. Construction qui, couplée à la présence de cœurs féminins montant crescendo jusqu’à des hauteurs dangereuses sur ce dernier morceau, donne lieu à un frissonnant climax. Impossible à son écoute de rester immobile. « Völva » arbore pour sa part des atouts plus introspectifs, évoquant à merveille de vastes étendues désertiques s’étendant à perte de vue sous un couple de soleils lointains. Et bien que tout aussi riche et composée avec une mesure exquise, elle ne secouera peut-être pas autant la nuque. Encore que…
L’album s’achève sur le bien nommé « Way Out ». Sixième piste de presque neuf minutes avec un travail de voix servant à nouveau l’immersion dans cet univers hostile et perdu. On y remarque par ailleurs dans les débuts un léger écho à « Planet Caravan » de l’illustre Paranoïd, avec ce son de voix rappelant sans difficulté le mélange de backward reverb, phaser, delay et que sais-je encore, utilisé par le frontman de Black Sabbath pour nous éloigner de mère réalité.
En somme, le nouvel arrivant se montre à la hauteur des prédécesseurs, sans verser dans la puissance burnesque de Zorya ni dans l’hallucinée fresque introspective d’Outlands. Burning In Heaven se forge au contraire sa propre identité, donnant encore un nouveau visage au quatuor polonais. À l’instar d’un Brahma d’une dimension alternative, Sunnata revêt ce masque supplémentaire sans crainte, conscient de son pouvoir sur les mortels et du chemin qu’il trace pour guider leurs âmes vers de versatiles horizons.
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