« Chérie, je répète ce soir et après-demain. Ce week-end je suis pas là, on a des concerts. Me réveille pas en allant au boulot lundi matin, j’ai besoin d’être en forme, on enregistre mardi. Je t’avais dit que je partais pendant quinze jours en studio, non ? ». Voilà résumée la douloureuse histoire des musiciens qui ont réalisé ce disque. Une histoire assez ordinaire pour des musiciens ordinaires qui cohabitent avec une personne du sexe opposé, voire du même sexe. Sauf que là, il s’agit d’anciens membres d’Eyehategod. Qu’on a du mal à imaginer en gens ordinaires. Donc même ces bûcherons là rencontrent des problèmes de couple, qui, comme ils le disent assez justement, tient de la lutte. Au final, ils nous livrent un superbe album ancré dans le quotidien le plus brut de leur vie de cinglés de la Nouvelle-Orléans. C’est gras, c’est lourd, c’est noir, c’est moite. Ça sent vraiment la transpiration des aisselles mêlée à celle des doigts de pieds, sans être grunge pour autant, attention ! A moins que ça ne sente la vase. Ça ne se passe pas au même endroit, mais les images qui me viennent à l’esprit sont celles du film Délivrance. Une ambiance très malsaine accentuée par des passages décalés, quelquefois jazzy, assez oppressants. Du bayou power rock qu’ils appellent ça. Ça me va. La métaphore adhère très bien à la sueur. Les riffs des Suplecs n’ont plus grand chose à voir avec ceux d’Eyehategod. Tout cela est bien plus rock’n’roll à la seventies. Toutefois, il est indéniable qu’ils ont gardé ce goût pour les rythmiques sévèrement plombées. L’impitoyable laminoir s’est fait un peu plus fin, plus aéré (légèrement). En fait les Suplecs sont comme des alligators. Ils glissent dans les eaux saumâtres et opaques du bas Mississipi, toujours prêts à mordre. S’ils vous chopent, ça fait très mal.
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