Il y a peu de temps encore, Troubled Horse était « le groupe des dissidents de Witchcraft » : trois des membres fondateurs du classieux combo suédois (les frangins Jens et Ola Henriksson, avec John Hoyles – même si seul Ola figure toujours dans les effectifs de Witchcraft à l’heure actuelle) ont effectivement formé cette engeance. A noter que Simon Solomon, le guitariste de Witchcraft, a lui aussi occasionnellement joué en live avec le groupe. Ce statut un peu trouble (même si le groupe n’en a pas joué en tant que tel) a opportunément induit une certaine légitimité et un sceau de qualité présumé dont Troubled Horse a largement bénéficié à ses débuts, et ce même si musicalement le groupe n’a jamais complètement versé dans l’ersatz de Witchcraft. Or, ces dernières années, Martin Heppich, l’imposant frontman et vocaliste du cheval perturbé, a progressivement « aménagé » ses effectifs … qui ne comptent désormais plus aucun musicien rattaché de près ou de loin à Witchcraft ! On repart donc d’une page blanche, on laisse de côté les a priori, et on se penche sur ce Revolution On Repeat avec une oreille neutre…
En réalité, dès les premières écoutes les échos de Step Inside (le premier album du groupe, sorti il y a cinq ans déjà, lui aussi chez Rise Above) remontent : on n’est pas partis trop loin musicalement. Avec des atours un peu plus « enjoués » que son grand frère Witchcraft, le quatuor s’appuie toujours sur une base heavy rock / blues rock très typée 70’s, drapée d’une énergie presque power rock dont tant de combos suédois ont pu se faire les porteurs valeureux ces dernières décennies.
Pour le reste, on est dans la nuance… mais ça peut suffire à faire la différence avec la nuée de groupes s’inscrivant dans la même veine musicale. Surtout quand un combo apporte tant de soin à ses compos : 10 titres sans point faible, c’est remarquable en soi, mais 10 titres chacun efficace à sa manière, c’est pas fortuit. Dix titres bien distincts donc, balayant toute la palette de genres à disposition, du très « Kadavar 1ère génération » (« Which Way to the Mob ») au boogie rock vintage à la « Hellacopters dernière génération » (« Peasants » et son accompagnement piano, « Let Bastards know »), en passant par les tempo lents ou mid-tempo mélodiques (« Desperation » ou le très catchy acoustique « My Shit’s fucked up ») voire le heavy-prog-déjanté-WTF (« Track 7 »)… tout y passe ou presque, sans faute de goût, et avec quelques prises de risque rafraîchissantes.
Bref, Troubled Horse a beau s’inscrire totalement dans la mouvance vintage / rock 70’s qui fait tant d’émules ces dernières années, ils parviennent, comme une petite poignée de groupes, à surnager de la masse : en injectant un petit complément d’énergie typique, en variant largement ses compos et en invoquant des genres musicaux complémentaires, le groupe séduit. Revolution On Repeat s’avère une bonne surprise dans un créneau musical à la fois saturé de groupes et très balisé stylistiquement. Les scandinaves prennent leur liberté pour avancer et tracer leur petit chemin, sans prétention et toujours respectueux des codes et de l’héritage, mais avec de bonnes idées et une exécution sans faille. Un cocktail rare ces deniers temps, pour un album très plaisant. Reste à voir si l’énergie ressentie ici se transposera sur les planches à travers ce line-up renouvelé…
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