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Various Artists- -Best of Soundgarden (Redux) & Superunknown (Redux)

Les activistes culturels de Magnetic Eye persistent à faire reconditionner des vieilles rengaines par des formations de la galaxie stoner et de ses environs proches. Après le doublé inspiré par l’oeuvre d’AC/DC, le joyau sale d’Alice In Chains ou le mur de Pink Floyd, c’est au tour de Soundgarden de passer sur la table de remixage. Un choix super judicieux et ultra cohérent vu la proximité évidente entre l’art déployé par la formation de l’Etat de Washington et le style que nous   affectionnons sur ces pages. Alors bien sûr Soundgarden n’a jamais été une formation estampillée stoner, mais il est certain que de nombreux artistes ont grandi sous les rayons de son trou noir soleil. Ce n’est que justice rendue finalement !

Si certains s’interrogent sur la nature de l’exercice de la reprise et de son côté créatif, d’autres considèrent ce prolongement de l’oeuvre comme une revitalisation du patrimoine voire une résurrection (comme Sidney). Le côté figé de notre scène, par rapport à la scène électronique par exemple, s’étiole un peu avec ce genre de productions qui emmènent certains titres à un niveau différent et parfois supérieur. L’héritage musical de Soundgarden sort triplement grandi de cette nouvelle incursion car il se rappelle à notre bon souvenir avec une actualité propice à se replonger dans leur répertoire entier (puisqu’exempt de fausse note), il est sublimé et jamais profané par les acteurs tout au long de ces 30 plages – chaque salve en contenant 15 – et, globalement, il acquiert ainsi une énorme paire de couilles qui fera lever la cornette aux plus lourds d’entre vous !

Pourquoi « Superunknown » ? Parce que c’est un putain d’album ! Parce que c’est une réussite commerciale qui a propulsé la carrière d’un groupe énorme ! Parce qu’il recèle des titres phénoménaux et distordus qui tiennent formidablement bien la route presque 30 piges après avoir atterri dans nos salons sous forme de plaques, de rondelles argentées voire de clips du temps où MTV méritait encore son M. Parce qu’il a confirmé la popularité d’un groupe déjà présent sur le grand écran via la bande originale de « Singles ». Finalement parce que les fans de « Badmotorfinger » trouveront leur compte sur « Best of Soundgarden (Redux) » qui lui fait la part belle (il suffit de sauter quelques paragraphes pour s’y rendre).

L’exploration de ce joyau passe par quelques surprises comme la version éthérée et suspendue dans l’air de « Like Suicide » par Darkher ou le brûlot épique qu’est devenu « The Day I Tried To Live » sous les mauvaises influences de Beastwars. Il voit aussi des réappropriations culturées notamment « Limo Wreck » par Witch Mountain qui déploie du Witch Mountain sans mettre à mal l’original, mais en lui apportant une déclinaison séduisante ou « Half » par nos amis de Dozer que j’attendais au tournant un couteau entre les chagnottes : ils font du Dozer carré et heavy rock en revitaminant le riff originel qui constitue un peu la signature Soundgarden.

Mon radar ciblait en particulier deux compositions qui me sont très cheres et sur lesquelles j’allais me montrer intransigeant comme un jury de l’Eurovision. Le premier c’est « 4th Of July » qui provoqua en moi une énorme turgescence car cet chef-d’oeuvre gagne encore quelques degrés sur l’échelle du malaise, du malêtre et de l’hymne à la toxicomanie pour se rapprocher plus près de la bande-son parfaite pour s’en prendre violemment à soit-sous l’influence de mauvaises influences ! La mine qu’avait placé Thou il y a 10 ans sur le chemin de Marc Urselli’s SteppenDoom en sublimant ce titre était bien présente lorsque je me suis tapé cette plage et je dois conclure qu’entre l’original et les 2 revisites ça rivalise dur dans mon cerveau en vrac. Le second c’est évidemment « Black Hole Sun » qui ressemble à un exercice casse-gueule vu la notoriété du single qui intégra jadis les hit-parades internationaux, mais qui ,contrairement aux hits éphémères servis par la grande distribution musicale, est un putain de titre composé pour durer ! Au final Spotlights s’en sort indemne et même grandi : merci de ne pas avoir tout ruiné !

Si d’aucuns n’ont pas franchement proposé du contenu décoiffant comme High Priest avec « My Wave », d’autres ont délivré des choses intéressantes me touchant pas franchement comme Frayle avec l’enivrant « Head Down » ou me touchant plus comme Ufomammut avec « Let Me Down » dont ils doublent la durée.

Le meilleur de Soundgarden selon certains c’est 15 titres plus ou moins convenus dont sont exclus ceux de leur meilleur album : « Superunknown » qui fait l’objet d’une session spécifique (pour savoir ce que j’en ai pensé il faut lire ce qui précède et pour vous faire une idée, il faut écouter le lien ci-dessous). Question pondération dans le testament musical du quatuor de Seattle, la part est faite belle à « Badmotorfinger » qui constitue l’ossature principale de cette production. Quelques incursions bienvenues viennent jouer les trublions sur cette sortie assez convenue je le concède.

On commence par l’étrangeté question sélection : « Applebite » issu de « Down On The Upside », le successeur de l’album auquel une production entière a été consacrée, Josiah propose une relecture très semblable à l’original qui accentue encore son côté babacool. Un second ovni d’un acabit comparable c’est « Loud Love » de « Louder Than Love » par Freedom Hawk : le groupe effectue une sélection sur un album peu connu, ils ne sont pas les seuls, et la décline avec beaucoup de cohérence par rapport à l’original, la maturité musicale et la technique en plus.

On enchaîne avec deux très bonnes surprises : un extrait de la bande-son de « Singles », « Birth Ritual » par Mirakler qui gagne en style déluré et débridé pour ma plus grande joie. Deuxième miracle au paradis de Soundgarden : la version sludge ainsi que guerrière de « Nothing To Say », issue du court « Streaming Life », mijotée brillamment par Swamp Coffin qui réalise une pépite en sortant des placards un opus généralement au-dessous des radars du grand public (à qui ne s’adresse pas leur art par ailleurs).

Et ça donne quoi alors ce « Badmotorfinger (Redux) » qui constitue plus du tiers de cette sortie ? De la créativité avec « Jesus Christ Pose » déclinée en version indus organique, totalement passable à mon goût, par Spotlights, avec « Rusty Cage » envoyée avec force hargne par Witch Ripper qui aligne les bûches ou avec « Slaves & Bulldozers » transcendée par High Desert Queen qui déploie une rythmique imparable sur ce titre fleuve. Deux belles claques ressortent clairement du lot soit « Outshined » qui se transporte dans un univers plus sludge suite à son passage auprès du laboratoire expérimental de Milana et « Room A Thousand Years Wide » à qui Restless Spirit a injecté force rythmique pour le mouvoir en hit heavy impeccable encore plus distordu et insalubre que l’original. Cette dernière reprise est tellement bonne que j’ai bien failli twerker de joie sous les coups de boutoir qui s’enchaînent durant quatre minutes !

Au final la palme revient à Blue Heron qui transpose « Uncovered », du deuxième album (« Louder Than Love »), en un titre doomesque, terriblement rugueux et progressif dont le riff central déluré vient flirter par moments avec celui de « I Want You (She’s So Heavy) » d’un quatuor quelconque de Liverpool. Un cover généreux, orienté à l’écart de l’exécution plus ou moins fidèle de l’original et upgradé dans tous ses excès en totale cohérence avec le style pratiqué par Soundgarden à la fin de sa carrière ; un vrai hommage quoi…

Pour conclure on zappe, on sélectionne ou on se précipite ? La réponse est binaire : on joue les abstinents si on est réfractaire à l’oeuvre de Soundgarden et si on affectionne que les bonnes vibrations psychédélique de hippie. Si on se remet difficilement du décès du Grand Chris (qui a sifflé la fin de la partie pour les reformations de Soundgarden) ou si on prend un pied énorme avec les plans bien bourrins : on fonce direct sur les deux productions jumelles pour se taper un orgasme musical à base de lenteur, de lourdeur et de nostalgie. Magnetic Eye si tu me lis il reste encore énormément de matière à défricher pour repasser une couche supplémentaire dans la discographie de ce groupe emblématique d’une époque révolue qui aura marqué l’histoire avec du grand hasch ! Gloire à Soundgarden : vous nous manquez terriblement !

Point Vinyle :

Ces deux opus font l’objet d’une sortie digitale pour la consommation d’usage en 2023, en  double cd pour les quidams vintage (dont font partie plusieurs membres de la rédaction) et double vinyles pour les épicuriens que vous savez aussi être (avec téléchargement inclus pour vous balader avec votre smartphone préféré) ! Pour la compilation tapant dans toute la discographie du quatuor il y a du noir standard, du transparent et noir marbré ainsi qu’un jaune assez cohérent avec l’artwork de cette sortie. Pour les nouvelles déclinaisons du point d’orgue de la discographie de la formation de Seattle il y a – toujours – le noir standard, un rouge et noir marbré ainsi qu’une tournée de blanc se référant aussi à l’écrin de cette production. Il y a de quoi lester un peu plus la charge au sol de vos living rooms les enfants : précipitez-vous !

Note de Desert-Rock
   (7.5/10)

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