Pour rappel : Year Long Disaster a été formé par le binôme Rich Mullins, quelques années après la fin des mythiques Karma To Burn (dont il était le bassiste), et Daniel Davies (guitare & chant, fils d’un membre des Kinks). Se greffa au binôme Brad Hargreaves, batteur des immensément populaires (aux USA) Third Eye Blind. Le trio ainsi né, ils se sont mis à jammer, composer et enregistrer rapidement quelques morceaux. Ces morceaux ont rapidement généré autour du groupe un “buzz” grandissant, qui voit son apogée avec la sortie de ce premier album tant attendu.
Pour l’anecdote, cette galette est en fait une resucée d’un album sorti en vinyl quelques semaines plus tôt, avec des titres partiellement identiques, mais dotés d’un mix différent. Par ailleurs, ce vinyl renfermait lui-même une version CD, proposant encore un track listing différent. Faut suivre !
YLD évolue donc sous la forme d’un power trio, et pousse le concept dans ses derniers retranchements : tandis que le duo basse-batterie groove à la perfection, les parties de gratte rythmique sur lesquelles surnagent les vocaux aériens et rocailleux (!!) de Davies se retrouvent magnifiquement complétées de leads et soli divers, parfaitement enlevés. A noter que le jeu de basse permet d’appuyer et renforcer chaque riff, et, lorsque nécessaire, de suppléer à la gratte, trop occupée à s’envoyer en l’air en solo. Magnifique combinaison instrumentale, donc.
Musicalement, les influences de YLD sont diverses mais jouissives. On pourrait qualifier le groupe de croisement bâtard entre Led Zeppelin (pour la guitare maîtresse et les influs rock 70’s) et ZZ Top (ce groove sudiste omniprésent !!!!!), bercé trop près de Karma To Burn (pour les plans instru et la force du riff), ou de Jeff Buckley (pour la subtilité de quelques compos, et le chant élevé au rang de “marque de fabrique”).
L’entâme de l’album se fait par le single de l’album, “Per qualche dollaro di piu”, un brûlot mid-tempo baigné par un riff impeccable. L’un des grands moments de l’album intervient dès la seconde plage avec le délectable “Leda Atomica” : la rythmique sèche et saccadée qui encadre le riff “moteur” ne trompera personne, ce titre aurait pu être composé par le ZZ Top de la grande époque. Le refrain “à tiroirs”, totalement atypique, montre une facette “fil rouge” du groupe : ce sentiment qu’ils ne font rien comme personne. S’enchaînent ensuite, comme si de fait exprès, des titres aux tempi et structures bien différents les uns des autres, de la “presque balade” au sautillant “The fool and you” (mmmmh, ce bottleneck), en passant par le lancinant et groovy “Ain’t it luck”. Les morceaux sont entêtants, s’engramment dans le cervelet à force de riffs vicieux et malins. A noter la prod impeccable de James J. Waters, sommaire et brute lorsque les morceaux se reposent sur les instruments seuls, et chiadée lorsque des arrangements peuvent servir le propos (voir les arrangements de violons/violoncelles qui amènent “Swan on black lake” vers son riff-éléphant).
Au final, cet album devient rapidement prédestiné pour ceux qui aiment la “jouissance musicale” (voir le pont instrumental jouissif de “Galea Aponeurotica”) : écouter un groupe en sentant que ces mecs se font plaisir avec leur instrument, et le maîtrisent assez pour flatter l’ouïe en même temps. Enfin, il ne trompera personne que cette galette, aussi somptueuse et délectable soit-elle, est par nature un prétexte à aller écouter ces riffs en live, tandis que la formule power trio se déchaîne, à force de soli et impros borderline. A mon sens un candidat très sérieux au titre de meilleur album de l’année.
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