Allez, plus qu’une dizaine d’années à patienter avant l’extinction programmée de tous les dinosaures du rock qui nous rabâchent leurs tubes délavés depuis des décennies : au hasard, le duo infernal Jagger / Richards, Robert Plant (que le monde entier déteste depuis qu’il ne veut pas ressusciter Led Zep) ou encore Steven Tyler (qui ressemble de plus en plus à une grand-mère à qui on aurait greffé une moustache), liste non-exhaustive. Bien évidemment, tout cela est à prendre à la plaisanterie mais force est de constater que depuis le grunge (soit trente ans quand même…), le rock vit sur ses acquis, s’inspire des ancêtres, ressasse sans cesse son passé (pas facile à dire, hein!) et ne prend aucun risque.
Mais de temps en temps, une formation sort de la masse: par exemple, Year Of The Cobra. Ils ne sont que deux mais, magie de la technique, sonnent comme trois ou quatre. On l’a dit et répété: le power-trio est sans doute la formation la plus efficace pour monter un groupe de rock. Pourtant, certains pensent que deux personnes suffisent amplement et agissent donc sous la forme d’un power-duo. A l’image de Year Of The Cobra ou des Picturebooks par exemple, ces duos s’amusent à bousculer les codes établis et prouvent que deux personnes peuvent être aussi efficaces et, surtout, produire autant de boucan que trois, voire quatre musiciens.
Justement, on parlait du grunge dont l’épicentre se trouve du côté de Seattle. C’est de cette ville à l’extrême nord-ouest des States (Alaska excepté) qu’est originaire le duo composé du couple Johanes Barrysmith (qui officie derrière les fûts) et sa compagne, la belle et démoniaque Amy Tung (dont le look n’aurait pas dépareillé dans un épisode de Mad Max), qui tient fermement la barre et sa basse. Fort d’un premier EP paru en 2015 (et qui contient l’entêtant « White Wizard »), le duo a crapahuté à travers les States aux côtés de Mos Generator pour promouvoir leur premier long, In The Shadows Below, en 2016. 2019 les voit ouvrir pour les légendaires High On Fire au printemps et puis, il y a quelques jours, Ash & Dust a fait son apparition sous un artwork de toute beauté. Alors, après écoute, il vaut quoi, ce « cendre et poussière » ?
Avec « The Battle Of White Mountain », l’ambiance est immédiatement posée, et elle sera lourde : cette intro de basse, ces claquements sourds de batterie et ces « ouh ouh » balancés par Amy Tung telle une sirène qui vous attire irrémédiablement dans ses filets, quelle entrée en matière ! « The Divine » hausse le ton avec un rythme un peu plus soutenu, avec toujours cette basse puissante, vindicative, autoritaire. Et puis arrive le seul couac de cet album : « Ash And Dust », qui tombe comme un cheveu sur la soupe avec un rythme punk syncopé qui détone après les deux premiers titres et un refrain déclamé avec véhémence. Non, vraiment, je n’accroche pas…
« Demons » enchaîne et ralentit considérablement le rythme. Ce titre est bien plus en phase avec ce qu’on connaît déjà du groupe (batterie chaloupée, voix attirante, basse grondante). Il est déjà temps de retourner la galette pour s’envoyer « Into The Fray », le single lancé en éclaireur quelques jours avant la sortie de l’album. Belle énergie, production léchée, la voix sublime d’Amy Tung… Juste parfait… Mêmes remarques pour « At The Edge » qui suit ainsi que pour le fantomatique « Dark Swan ». Puis il est temps de conclure cet opus avec « In Despair », splendide requiem qui bénéficie de la voix douce et sensuelle d’Amy Tung qui, il faut bien le dire, porte sur ses frêles épaules tout l’album.
Year Of The Cobra a tapé dans le mille avec cet Ash and dust qui frôle le sans faute. Vivement un passage dans nos contrées pour l’apprécier à sa juste valeur en live car, pour avoir fait l’expérience de Year Of The Cobra sur scène il y a quelques années, le duo ne s’économise pas et prend un plaisir non dissimulé sur scène… Je ne peux donc que vous conseiller l’écoute d’Ash and dust, l’un de mes plus grands frissons discographiques de cette année.
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