BLACK BASS FESTIVAL (1000Mods, Hangman’s Chair, etc…) – 01/09/2018 – Braud-et-St-Louis (33)

[Attention, lecteur : cette chronique comporte quelques portions de musique non stoner. Leur innocuité a été prouvée en laboratoire, n’aie crainte, ça devrait bien se passer…]

C’est la deuxième journée du festival girondin, sachant que votre serviteur n’a pas pu assister à la journée de la veille, qui proposait pourtant (d’après les échos que l’on en a eus) d’excellentes prestations de Birth Of Joy, The Psychotic Monks, It It Anita, etc…

La première remarque en rentrant sur le site en ce samedi après-midi est que peu de choses ont changé depuis l’an dernier… Et c’est tant mieux ! Le festival est encapsulé dans un petit coin de verdure, dans un village en bordure du fleuve, adossé à une majestueuse ancienne maison de maître d’un domaine viticole, dans une sorte de petit bois dont les clairières accueillent le public des concerts. Autour, bars, food trucks, disquaire, merchandising, espace jeux,… Tout ce qu’il faut pour passer une bonne soirée, avec un personnel bénévole souriant et accueillant.

 


NEW KIDZ

 

Traditionnellement, le samedi après-midi accueille un concert gratuit pour les enfants. Et aujourd’hui c’est aux New Kidz d’essayer de réveiller les drôles, jusqu’ici plutôt attirés par tous les jeux mis à leur disposition par le festival. Mais le trio du « Nord du Sud Ouest » connaît son affaire et ne tarde pas à faire venir à eux tous les gamins et leurs familles. Imaginez trois mecs balançant des morceaux aux paroles parlant d’instits, des copains de récré, de super héros et de concerts de rock, le tout armé de grosses guitares, sur des sons qui rappelleront aux adultes les grandes heures de Rocket from The Crypt, AC/DC, les Hives, les Ramones, etc… Y’a pire ! Le tout est bien joué, par de vrais musiciens, c’est bienveillant, intelligent, bien écrit, marrant… De quoi bien développer l’éducation musicale des plus jeunes. A tester d’urgence si vous avez ou connaissez des enfants un peu trop réceptifs à Jul et Maître Gims, il n’est pas trop tard pour les remettre sur la voie !

 


I AM STRAMGRAM

 

Une petite heure pour se détendre au frais sous les arbres, la transition avec le « vrai festival » se fait en fin d’après-midi, en douceur : les locaux de I Am Stramgram prennent la grande scène dans la douce torpeur estivale et vont caresser les tympans d’un public encore un peu clairsemé et légèrement apathique, pendant une petite heure de concert. A l’heure de l’apéritif, les sonorités pop-folk du duo (guitare – batterie/samples) sont bienvenues et participent à une ambiance détendue sur l’ensemble du site. Sans représenter un grand intérêt pour l’amateur exclusif de gros décibels saturés, on reconnaît le talent du combo pour la conception de chansons variées, aux sonorités riches et travaillées, leur duo instrumental s’appuyant sur une large variété d’effets (voix, guitare, …) et de samples divers pour enrichir leur mise en son. Une agréable entrée en matière.

 


PAMPLEMOUSSE

 

Symptomatique de la démarche des programmateurs du Black Bass, le trio de Pamplemousse arrive directement de… la Réunion ! Aller-retour uniquement pour cette date ! On apprécie autant l’effort logistique que l’apport bienvenu de saturation qu’ils amènent avec leurs instruments sur la petite scène. Porté par des ambiances plutôt noise rock transpercées de fulgurances hardcore soft, le groupe peut faire penser à un Unsane plus gentil copulant avec les Pixies ou Fugazi pour les plans plus mélodiques. Rien de révolutionnaire sur le plan musical, mais c’est bien fait, et scéniquement c’est bien en place, ça fonctionne très bien et le public semble apprécier. La tension monte progressivement et la fée électricité commence à pointer le bout du nez, tandis que le crépuscule nous offre une ambiance superbe en ce début de soirée…

 

 


LANE

 

Le voilà donc le fameux groupe des « anciens Thugs ». LANE (Love And Noise Experiment) regroupe effectivement les frangins Sourice du groupe angevin culte, ainsi qu’une autre fratrie issue des plus jeunes Daria. Vous complétez le tout du jeune fils de Pierre-Yves Sourice à la gratte et vous obtenez un quintette pour le moins « familial », porteur d’un héritage fortement électrisé et de quelques centaines de concerts dans les jambes… Ça se ressent assez vite dans la maîtrise de la grande scène du festival : c’est solide, c’est pro ! Les trois guitares (!) et la basse nerveuse développent un son noise rock qui devrait rappeler de bons souvenirs aux anciens aficionados des Thugs (le chant toujours impeccable d’Eric Sourice n’est pas étranger à ces réminiscences…). Les mélodies sont bien travaillées, efficaces, et là encore on reconnaît la patte des deux groupes qui se sont « hybridés » autour de ce nouveau groupe/projet. L’ensemble est un peu linéaire sur une heure de concert, mais c’est aussi le genre qui veut ça. La prestation est néanmoins efficace et aura convaincu le public de plus en plus large qui s’est massé dans la fosse.

L’heure qui suit est dédiée au traditionnel et bon enfant concours de « Air Guitar », qui permet aux gratteux de salles de bain de briller devant un public rieur, le tout dans une ambiance décontractée.

 

 


1000MODS

 

Dire que le quatuor grec est attendu ce soir est un euphémisme. Leur montée en régime de ces derniers mois, en support de l’excellent Repeated Exposure to… a culminé au Hellfest en juin par un set coup-de-poing (de nombreux tee-shirts Hellfest dans le public laissent penser que pas mal de victimes consentantes sont venues tendre la deuxième joue ce soir). L’électricité est donc palpable dans la fosse pour la tête d’affiche de ce soir. Le tapis rouge ainsi déroulé, ne restent à nos quatre hellènes préférés qu’à actionner leur machine de destruction massive et faire cracher les amplis Orange. Ce qu’ils font en commençant par un enchaînement bien heavy de « Above 179 » et « Road to Burn ». Bien lancés, le reste roule tout seul ensuite pendant une heure, délivré avec méthode, énergie et talent. Le groupe ne prend pas de risque en piochant dans ses titres les plus efficaces sur ses trois principales production : on constate évidemment une légère inclinaison vers son dernier rejeton (« Electric Carve » et « Loose » auront laissé quelques traces dans le moshpit) mais des brulots de la trempe de « Claws » ou des titres plus groove (« Low », « Vidage ») remportent aussi leur petit succès.

Leur maîtrise scénique impeccable, doublée d’un light show remarquable et d’un son parfait (on ne se croirait pas en plein air) finissent de satisfaire un public exsangue et béat. Biens dans leurs baskets, ils bouffent carrément leur créneau horaire en empiétant de 10 bonnes minutes l’horaire de fin prévue,  en dégainant en conclusion un « Super Van vacation » rallongé, groovy en diable, dont les breaks dévastateurs sont encore prétextes à une déferlante de slammers et même une paire de méchants circle pits ! L’effet de surprise en moins, le groupe a quand même mis ce soir tout le monde d’accord et a confirmé tout le bien que l’on pensait de lui. Il suffit de voir l’état du stand de merch après leur set pour confirmer qu’on n’a pas été les seuls convaincus…

 


TOYBLOID

Deux salles, deux ambiances, comme on dit : les derniers restes de feedback crachés par les amplis encore incandescents de 1000Mods s’éteignent à peine dans la nuit qu’une petite tornade rouge envahit la petite scène de l’autre côté du site : le trio parisien Toybloïd prend tout le monde par surprise en proposant un pop rock punky girly en mode fun. Occupant bien la scène, le duo féminin guitare-basse, en short-maillot de sport-baskets rouge vif, bouge dans tous les sens et dégaine des riffs dynamiques à qui en veut, sur des rythmiques qui ont dû user quelques dance floor ! Une petite bouffée d’air frais, un rafraîchissement salvateur dans cette prog costaud de la fin de soirée, bien appréciés par un public remuant aux hymnes rock acidulés du trio. Des rythmes auxquels même les taciturnes Hangman’s Chair auront du mal à résister, tandis qu’ils font leur balance de l’autre côté du site, un sourire quasiment carnassier au bord des lèvres… Saluons d’ailleurs, encore, l’audace de ces programmateurs à qui rien ne fait peur, qui proposent rien moins que d’enchaîner un groupe de pop punk punchy coloré monté sur ressorts à Hangman’s Chair, rois du mid-tempo sinistre et du riff glauque. Le choc auditif et mental extrême…

 


HANGMAN’S CHAIR

Le quatuor parisien foule les planches dans la pénombre tandis que la bande son de « Banlieue Triste » retentit, et lancent les hostilités sur un « Naive » puissant. Les premiers constats sont rapides : le son est limpide encore une fois, le light show est tout simplement excellent, et nos quatre gaillards sont en grande forme ! Dire que le set est solide est un euphémisme : les musiciens sont carrés, et sont tous les quatre à leur manière à fond dans leur set. Cédric assume son rôle de frontman à la perfection et parvient à retranscrire impeccablement des lignes vocales pourtant de plus en plus exigeantes sur le dernier Banlieue triste ; Mehdi martèle ses futs avec rage et conviction ; Clément comme à son habitude arpente son bout de scène dans tous les sens en donnant l’impression qu’il va bouffer le public ; Julien assure ses leads de guitare impeccablement, sorte de guitar hero non-conventionnel… Bref, les conditions sont réunies pour un super set, et c’est bien ce que l’on a ce soir.

La set list s’appuiera cette fois largement sur leur dernier album (le très bon Banlieue Triste, sorti il y a quelques mois), avec pas moins de deux tiers des titres joués ce soir. Il faut dire que la transition album-scène de titres pourtant très élaborés comme « 04/09/16 » est en fait très réussie, les chansons n’y perdent jamais en impact, et même les longs et complexes « Touch The Razor » ou « Full Ashtray » parviennent à maintenir la tension tangible sur vinyl. This is Not Supposed to be Positive est honoré à travers évidemment ses deux joyaux « Dripping Low » et « Flashback », ainsi que le glauque « Cut up Kids ». Mais au delà de leurs deux dernière productions, seul « The Saddest Call » vient se rappeler à notre souvenir…

Après la paire de sets « high energy » que le public vient d’enquiller (l’enchaînement 1000Mods/Toybloïd) et la nuit bien entamée avec la fatigue qui va avec (le groupe finira son set à 2h du matin) une part de l’assistance quitte petit à petit le site avant la fin de leur concert, mais un large public goute les compos des franciliens jusqu’à la lie, à savoir la bande-son finale (la lecture de Georges Bataille qui clôt aussi l’album) qui voit le groupe quitter la scène dans la pénombre.

 


 

Il est temps de quitter le festival qui cette année encore a tenu toutes ses promesses. Site remarquable, ambiance chaleureuse, organisation sans faute… ce festival à taille humaine a déjà tous les atouts. Mais c’est sa programmation qui le rend plus attrayant et atypique que ses « concurrents » (qui ne le sont pas) : tandis que la plupart des festivals estivaux garnissent à peu de frais leur affiche des mêmes sempiternels artistes saisonniers itinérants, que l’on retrouve tous les week-ends dans tous les recoins de l’hexagone, le Black Bass choisit de se donner les moyens pour les groupes qu’ils VEULENT faire venir. Ça marche au coup de cœur et à l’envie plus que par logique économique. Cette année ils font venir les 1000Mods hors tournée pour un aller-retour Grèce-France exprès (leur seule date dans l’hexagone cette année avec le Hellfest), vont chercher les Birth of Joy dans le même contexte depuis leurs Pays-Bas, font prendre l’avion à Pamplemousse… Des exclus, des coups de cœur, et des choix pointus mais pertinents. Et ça fonctionne, en atteste un public encore au rendez-vous cette année. Autant vous dire qu’on attend déjà la prog de l’an prochain avec impatience…

 

 

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