La journée qui commence s’annonce compliquée : il y a des concerts dans tous les sens, à ne plus savoir où donner la tête, des interviews, etc… Une chose est sûre, on ne va pas s’ennuyer, ce qui nous évitera de ressasser que, ça y est, c’est la dernière journée…
BLUES PILLS
Par contre, mauvais départ, on rate Year Of The Goat sur la Main stage n°2 en “début de matinée” (10h30)… Damned ! On rattrape ce faux pas en assistant au concert des suédois (OK, moitié suédois) de BLUES PILLS sur… la Main stage n°1 !! On savait le groupe en phase de carrière ascendante, et sa récente tournée (prévisionnelle car interrompue au milieu), très ambitieuse, montrait leur envie d’accélérer cet état de fait. Mais nous faire regarder un concert à la lumière du jour, alors qu’on a passé deux jours sous une tente, c’est cruel ! Toujours est-il que Blues Pills… fait du Blues Pills ! Le quatuor d’émanation très 60’s/70’s tendance psyche et blues, déroule des titres carrés, assez longs, à l’exécution impeccable. Difficile donc d’opposer des critiques objectives par rapport à leur musique : obligés de constater que les zicos assurent (ce jeune soliste frenchie est quand même doué), obligés aussi de reconnaître qu’Elin a une voix absolument remarquable. Notons aussi que pour commencer un festival à onze heures du mat, leur musique accompagne parfaitement une montée en pression assez tranquille. Merci pour tout ça, respect. Mais pour le reste, et même si le public semble apprécier (enfin, c’est pas comme si ça pogotait non plus, hein… le public reste assez cool et clairsemé à cette heure…), tout ça manque cruellement d’énergie et de gras : les tempi s’emballent bien trop rarement, le son de gratte est désespérément clair… Allez, même si ce n’est pas très politiquement correct de le dire ouvertement tandis que tous les médias commencent à encenser le groupe, mais on n’a jamais eu peur d’être à contre-courant : on s’ennuie !…
SCORPION CHILD
On se translate de quelques dizaines de mètres sur la Main Stage n°2 (mais qu’est-ce qu’ils ont aujourd’hui avec ces Main stages ?!) pour assister au set de SCORPION CHILD. Bon, on gagne peut-être une petite décennie dans le flash back, par rapport à Blues Pills, mais on est bien en plein dans un trip 100% vintage là aussi. Y’a beaucoup de Led Zep, un peu de Purple et de Free, et une dose de Uriah Heep / Blue Cheer pour le pendant subtilement psyche de tout ça. Rien de mal à ça. Le chanteur aussi sonne un peu comme un ersatz de Plant, les mecs sont dedans, le public apprécie nonchalamment… Mais on ne va pas se voiler la face, c’est pas non plus le feu sacré ! Pas super original, pas le coup de pied au cul attendu (espéré ?), et en plus ce petit crachin et ce ciel nuageux ne fait rien pour améliorer notre humeur… On décide de retourner à la “maison”, notre Valley chérie, après deux titres…
SATAN’S SATYRS
… et grand bien nous fit ! Puisque sur le même créneau horaire (salauds à la prog !) sévissent les excellents SATAN’S SATYRS ! Le combo mené par Clayton Burgess, le nouveau bassiste d’Electric Wizard, anime la Valley depuis quelques minutes déjà, donc, mais il nous faut moins d’une chanson pour confirmer qu’on a fait le bon choix et qu’il vaut mille fois mieux passer le reste de cette petite demi-heure avec nos trois furieux. Look old school, musique old school… Là aussi, la “vague” vintage n’est pas passée complètement à côté du combo, sauf qu’il y a une énergie punk dans le rock de Satan’s Satyrs qui rend le groupe cent fois plus excitant que les dizaines de groupes qui s’embarquent dans cette veine musicale très hypée. Faut voir nos lascars se donner à fond dans leur set pour comprendre qu’ils ne sont pas là pour la représentation ou pour rafler quelques lauriers faciles ; ils auront le public par les tripes ou rien ! Burgess s’affirme en frontman efficace, son chant nasillard fonctionne bien, et les autres ne sont pas en reste, avec un batteur digne d’Animal, le batteur déjanté de Sesame Street avec sa tignasse énorme, et un gratteux plus discret mais bien présent néanmoins, toujours dispo pour croiser le fer (ou le manche) avec son collègue sur des dizaines de soli impeccables. Energie, rock old school, fuzz, authenticité… Fatalement, ça marche. Et du coup, ça a même fait revenir le soleil ! Dommage pour ceux qui appréciaient ce petit rafraîchissement pluvial – c’est reparti pour un cagnard terrible pour tout le reste de la journée…
ZODIAC
Apparemment on est bien enfoncés dans le trip vintage, puisque c’est maintenant aux allemands de ZODIAC de monter sur scène. Et là aussi, c’est du sérieux : ils ont beau avoir l’air souriants, ils sont pas là pour la déconne, ils sont venus pour rentabiliser ces quarante petites minutes en mettant tout ce qu’ils ont sur la table. Du coup le concert est dense, énergique, diversifié… Sacré professionnalisme, on ne s’ennuie pas une minute. Faut dire que sur scène, on n’a pas des guignolos qui se regardent les godasses pendant trois quarts d’heure : menés par un parfait leader charismatique en la personne de Nick van Delft, le groupe est complètement en harmonie et dispense la même énergie, avec une unité qui force le respect. Toutes les facettes du combo y passent, les titres les plus énergiques, les balades bluesy (une bonne version de “Cortez the killer”, le titre de Neil Young, avec quelques soli bien sentis et une belle performance vocale de Van Delft, qui fait montre ici d’une chaleur dans son chant tout à fait remarquable) ou les jams boogie à rallonge, avec quelques connotations sudistes occasionnelles : ainsi, lorsqu’à quelques minutes de la fin du set ils annoncent “this is our last song… but we’re gonna make this fucker long”, on est contents de les voir se lancer dans l’épique “Coming Home”, presque leur “Freebird” à eux en live, un titre lent puis mid tempo qui se termine en machine à jams sur fond de basse ronflante… Carton plein.
CROWBAR
Alors là… le bad trip je pense, je sais pas… Toujours dans l’ambiance de la fin du set de Zodiac, dans l’atmosphère chaleureuse (j’ai failli dire “feutrée”…) de la Valley, on se lance en courant vers la Main Stage n°1 pour ne pas rater CROWBAR sous un soleil de midi déjà étouffant, dans la poussière, avec une barre de son monolithique et sans relief, avec trois gars complètement paumés sur une scène de 80 mètres de large et 60 de haut (trois gars parce qu’autant vous dire que sur une scène surélevée de deux mètres, on voit pas beaucoup Tommy Buckley derrière ses fûts)… Pour je ne sais quelle raison, ça fait quinze fois que Crowbar joue au Hellfest (OK, disons deux ou trois fois…), et à chaque fois ils atterrissent sur la Main Stage. Mais cette fois, la transition est trop rude et ma cervelle se bloque dans un mouvement d’auto-protection qui va malheureusement à l’encontre de mes affinités musicales. Car je me faisais une joie de revoir Crowbar ! Mais je pense que les riffs de Windstein sont faits pour rebondir sur les murs et le plafond d’une salle pour mieux vous écraser la nuque, et que ses lignes de chant vous prennent aux tripes avec dix fois plus d’impact lorsque vous croisez en même temps son regard de trucker maniaque… Du coup, je me cale au fond, et je regarde le set à 700 mètres de la scène, peinard mais résigné, sans y prendre le plaisir escompté… Forcément, entendre le groupe cracher ses classiques glaviots sludge que sont “All I had”, “High Rate Extinction” ou “Planets Collide” fait toujours son petit effet, mais aujourd’hui, entre moi et Crowbar, les étoiles n’étaient pas alignées.
LOWRIDER
Peut-être que l’une des causes de ma déception vis-à-vis du concert de Crowbar trouvait sa source dans mon excitation de revoir LOWRIDER sur scène ? Toujours est-il qu’il ne faut pas me prier pour regagner la Valley après le dernier riff louisianais pour voir les suédois monter tranquillement sur scène. En choisissant de lancer leur set comme commence leur unique album, avec “Caravan”, ils remettent tout de suite les choses en place, là où elles n’auraient jamais dû s’arrêter, il y a plus de dix ans de cela. Sur scène, les gars sont imperturbables, en tout cas la paire de gratteux, Niclas et Ola, décochent difficilement un sourire, même si on a du mal à les prendre en défaut sur l’exécution impeccable des morceaux… A leurs côtés toutefois, Peder, bassiste, vocaliste et leader / frontman du combo kiffe ce trip Hellfest jusqu’au bout des ongles : il ne tient pas en place, il a le sourire vissé aux lèvres, il communique avec le public presque entre chaque titre… Certes, il est un peu à la peine sur certaines lignes vocales (les parties les plus perchées de “Dust Settlin'” sont un peu limites…) mais il emporte le public sur son enthousiasme… et sur les compos du groupe ! La tente est blindée en ce début d’après-midi, et le public est au taquet : ça chante, ça headbangue, ça slamme… Le son sous la Valley est, cette fois encore, excellent, le pied. Surprise, alors que l’ambiance commençait bien à monter et que cette douce chaleur nostalgique commençait à nous faire gentiment planer, le groupe se lance dans l’interprétation de pas moins de deux inédits ! “Leaning Times”, présenté par Peder comme “un nouveau titre, que nous avons écrit il y a dix ans… that’s how we roll !”, donne rapidement l’impression d’être très catchy, même s’il n’emballe pas complètement en première écoute, l’impression d’un manque de “lourdeur” en quelque sorte… A réécouter sur album. “Red River” à ce titre est plus emblématique de ce que l’on connaît et aime chez Lowrider, vocaux, riff, groove… Après ces petites friandises, retour sur le chemin des classiques avec “Lameneshma” qui amène un tunnel de titres issus de leur LP pour conclure ce set. On retiendra surtout “Texas Pts 1-2” et sa conclusion jouissivement Kyussienne, enchaîné à “Convoy”, un des riffs les plus lourds depuis la création de la six-cordes. A la scandinave, les gars sortent de scène à peine expressifs, mais leur sourire en coin ne laisse pas de doute sur leur ressenti : ils ont tué, et ils le savent bien. Maintenant, finie la déconne, va falloir remettre le couvert, et pas dans cinquante ans.
BLACK TUSK
Les mecs de BLACK TUSK se sont chauffés au Whisky bas de gamme tout ce début d’aprem backstage, on commençait à les sentir chauds comme la braise avant leur montée sur scène. Apparemment c’est un bon combustible, parce que le groupe n’a pas fait de quartier durant ses cinquante minutes de set. Une vraie boucherie. Pour ceux qui ne connaissent pas le trio ricain, c’est une sorte de sludge aux rythmiques plutôt rapides, un truc au croisement du thrash et du stoner. Les trois zicos se partagent les vocaux, ce qui est toujours impressionnant en tout cas pour un batteur. Au niveau du public, disons que placer Black Tusk entre l’heure de la digestion et l’heure du thé est sans doute un choix de programmation assez judicieux – ça évite le coup de mou ! Les musiciens sont au taquet, tout sourires, ils sont clairement là pour s’éclater, et ceci décuple l’énergie de leur set, qui se transmet par mimétisme au public, déchaîné. Les premiers (et rares) pogos naissent d’ailleurs sous la Valley durant leur set. Andrew et Jonathan sont complètement dedans, arpentent la scène sans répit, et abattent des riffs cinglants par dizaines. Étonnant d’ailleurs de voir deux musiciens aussi en phase “scéniquement”, ils sont tous les deux souriants, interagissent, vont voir le public… On notera par ailleurs l’efficacité confirmée des titres du dernier album, avec en particulier un doublon “Enemy Of Reason” / “In Days Of Woe” pour conclure un set brutal mais efficace. Exactement ce qu’il fallait pour faire monter la tension dans cette tente jusqu’ici emplie de “cool vibes”… Une tuerie.
HOUSE OF BROKEN PROMISES
Après leur set dévastateur l’an dernier au Desertfest Berlin, on ne va pas se la jouer “surpris” : on sait qu’on va prendre une claque avec le set de HOUSE OF BROKEN PROMISES. Voir Arthur Seay faire les cent pas comme un lion en cage backstage pendant une demi-heure en attendant l’heure du set, en jouant des soli imaginaires non stop, son médiator à la main, on sent le bonhomme prêt à en découdre. Bingo. Quand les gars montent sur scène, ils sont immédiatement à fond dedans. A l’américaine : ils font le show ! On savait Seay excellent (sous-estimé) guitariste, soliste hors pair et gros générateur à riffs. On savait aussi que le frêle Mike Cancino devenait une véritable machine à tuer derrière son kit de batterie minimaliste. On aura désormais la confirmation que le casting de Joe Mora ne doit rien au hasard : bassiste impeccable, il prend en charge désormais sans réserve la plupart des vocaux, et se révèle un chanteur doué, avec une énergie similaire à ses collègues (bref : au taquet). Faut les voir haranguer le public, le prendre à parti, communiquer entre eux… Quant aux poses et grimaces non stop de Artur Seay, c’est un spectacle en soi ! Niveau set list, le trio n’est pas vraiment calculateur et se la joue au feeling : ils n’hésitent pas à coller quatre nouveaux titres en plein milieu de leur set list, des titres inconnus de tout le monde… Pourquoi pas ?! A l’image des autres productions du groupe, ces titres de pur stoner metal sont diversifiés, catchy, et percutants. Ca devrait le faire pour leur prochaine rondelle ! Pour le reste, les classiques sont bien là, entre “Blister” en intro, le heavy “Physco Plex”, ou encore le percutant “Highway Grit”, et même s’ils n’ont pas joué le très attendu “Obey the Snake”, on n’a pas matière à se plaindre. Le groupe choisit l’impeccable “The Hurt (Paid my Dues)” pour clôturer un set haut en couleur, qui aura démontré que HOBP n’est pas que “la pièce rapportée de Unida” : leur set jouissif et généreux aura lessivé et collé le sourire à plusieurs milliers de personnes sous la Valley aujourd’hui.
DOZER
Après le set “over the top” des ricains, on sait par avance que la deuxième livraison suédoise de la soirée sera scéniquement un peu plus austère. On a papoté un peu avec Tommi, le leader de DOZER un peu avant leur set aujourd’hui, un gars posé, calme, gentil… Alors quand on le voit monter sur scène complètement déchaîné, faisant voler sa traditionnelle casquette dès le premier headbang de “Feelgood Formula” qui introduit le concert, on comprend quand même que les scandinaves ne sont pas venus que pour se détendre non plus. A son habitude, la prestation de Dozer sera aujourd’hui encore impeccable : une set list de tueur, une interprétation sans faille, des musiciens en ordre de bataille… La set list, parlons-en : encore une fois le paquet est mis sur l’album “Through The Eyes of Heathens” avec notamment des interprétations énormes de classiques comme “Big Sky Theory”, l’aérien “Until Man Exists No More” ou le brutal “From Fire Fell”. Mais tous les albums seront honorés de quelques extraits (avec un seul extrait de leur dernière production), une sorte de petit best of. Faut dire que le groupe sait ce pour quoi il est attendu, et à ce titre il fait montre d’une belle générosité envers son public. Sur scène, Fredrik assume pleinement son rôle de frontman : même si ses vocaux n’ont pas la profondeur qu’elles ont sur disque, il n’est jamais en difficulté et assure impeccablement toutes ses lig “Fishermnes vocales (est-ce dû au fait que le bonhomme se gave de bonbons “Fisherman’s Wharf”… pendant tout le concert ?!). Rien à dire sur ses rythmiques, épaulées par les lignes de basse robustes de Johan. Quant à Tommi, il est juste à fond, il headbangue come un furieux, virevolte, harangue le public… Bref, le groupe fait tout ce qu’il faut pour assurer un concert impeccable, et mettre à l’honneur la qualité de leurs compos plutôt qu’eux-mêmes en tant qu’individus, se mettant au service d’un collectif parfaitement rôdé. Encore et toujours une machine scénique impressionnante, qui ne laisse rien au hasard. Tandis que le combo termine son set par le vieux classique “Supersoul”, on se dit quand même que la trop rare activité scénique du combo représente un vrai gâchis. On se félicite d’autant d’avoir pu revoir les suédois sur un concert de cette qualité.
SPIRIT CARAVAN
Après avoir été bluffés de la prestation scénique de SPIRIT CARAVAN lors du dernier Desertfest Berlin, on savait que ce set était immanquable. Et apparemment, on n’était pas les seuls à s’être passé le mot, tant le public est bien tassé sous la tente (pas blindée non plus, faute à la concurrence de Black Sabbath qui se prépare sur la Main Stage) et que les bords de scènes sont pleins de la fine fleur des musiciens du week end : l’intégralité de Electric Wizard headbangue en chœur, Witch Mountain, Acid King, Nick Oliveri et Joey Castillo qui sont à fond et connaissent les titres par cœur, etc… Le trio monte sur scène sur le classique “Healing Tongue” et son riff quintessentiel. Sa posture scénique est inchangée : au-delà du charisme tout relatif de chacun (sans manquer de respect pour les deux autres, avouons-le : Wino écrase tout le monde avec un simple battement de cil), chaque musicien adopte une position et un comportement parfaitement équilibré, respectueux du groupe avant ses individus. Wino interprète ses rythmiques et ses leads sans en faire des tonnes, Sherman balance des lignes de basse redoutables et impeccables d’efficacité rythmique (parfois plus proches de la guitare rythmique, d’ailleurs), et intervient même occasionnellement au chant (comme sur le sournois “Fang”), le tout avec une aisance et une autorité naturelle qui intiment le plus grand respect. Quant au p’tit nouveau Henry Vasquez, sa batterie posée en front de scène entre nos deux lascars (sans plateau surélevé, notons-le), son jeu généreux et démonstratif le rendent passionnant à regarder, lui aussi. Du coup, avec trois personnalités de cet acabit, et une set list composée de classiques indémodables, on ne s’ennuie pas une minute et on dévore le concert, cette heure passant à la vitesse de la lumière. Faut voir l’osmose de nos vieux loubards stoner, à l’image du passage instru groovy sur la fin de “Brainwashed”, où Sherman et Wino se retrouvent de part et d’autre du kit de Vasquez pour une jam frénétique… Le groupe termine par le désormais classique “Inside Looking Out” de Grandfunk Railroad, hymne de truckers par essence, efficace en diable. Le trio l’affirme à nouveau comme si c’était nécessaire : Spirit Caravan n’est pas juste un vieux combo culte, né à nouveau de ses cendres dans un trip revival mal assumé… Au contraire, ils se posent en groupe bien vivant, référentiel et culte, certes, mais puissant et complètement ancré dans le présent. Il ne leur reste plus qu’à cracher quelques nouvelles compos et on sera aux anges. Je cite un Nick Oliveri aux anges à la fin du set : “it was so fucking badaaaass”. Pas mieux.
UNIDA
Par acquis de conscience, on va capter une paire de titres du set calamiteux de Black Sabbath: les petits sauts d’enfant de six ans d’Ozzy, sa voix fausse, chevrotante et fébrile, la prestation scénique robotique de Iommi et Butler (hop, je m’avance de cinq pas pour le solo, hop je reviens à ma place, hop je m’avance un peu…), nous confirment que même ce soir c’est sous la Valley que ça va se passer.
L’annonce de UNIDA en tête d’affiche de la journée (et, disons-le entre nous, un peu la tête d’affiche de la Valley sur le week end pour beaucoup d’entre nous…) en a motivé plus d’un à prendre leur ticket pour le festival de l’Enfer cette année. Les voir calés dans le Running Order en synchro parfaite avec Black Sabbath pouvait faire grincer quelques dents… Et alors que l’on traverse une Valley désertique (oui, c’est un peu sa raison d’être, c’est vrai…) à quelques dizaines de minutes du début du set, on se dit que niveau affluence, ça sera pas gagné ce soir… Heureusement, pas mal de monde a fait comme nous, et après quelques titres de Sabbath, le public rejoint progressivement une Valley qui se gonfle d’expectative… A l’heure prévue, les zicos montent sur scène pour lancer le riff jubilatoire de “Wet Pussycat”, ce qui fait vite arriver un John Garcia vers qui, inévitablement, tous les regards se tournent. Faut dire que Cancino et Seay, en purs team players, adoptent une posture bien plus posée et en retrait que durant House Of Broken Promises. C’est Curt Christenson, le bassiste de Dixie Witch, qui prend en charge la quatre-cordes sur cette tournée, et c’est un foutrement bon casting : le bassiste a du groove à revendre, et rappelle furieusement le type de jeu rond et organique de Scott Reeder. Garcia, en revanche, n’est pas à fond dans le set au démarrage. Il part chercher ses lunettes au milieu du premier titre (la chanson continue sans lui !), il bugge sur un couplet de “Thorn” (confronté à un “trou”, il s’interrompt sur une mesure ou deux, reprend en cours de route)… On l’a vu plus à l’aise que sur ce début de concert : même si son professionnalisme cache son inconfort, le gars n’est pas encore bien dedans… Mais petit à petit, il rentre dans le set et les titres suivants sont impeccables. On peut d’ailleurs le remarquer : il se permet des petites impros ou nouveaux aménagements de certaines lignes vocales généralement bien sentis, signe d’un confort grandissant de sa part. La set list enchaîne les perles, pour une large part issues de l’album “fantôme” du groupe, avec toujours vis-à-vis d’un public bouillantissime la même efficacité. Se détacheront de nos souvenirs enfumés “Human Tornado” et son riff redoutable, le langoureux “Summer”, mais aussi les plus anciens “Red”, super efficace, et “Nervous”, propice à une démo riff-esque de Arthur Seay cette fois encore, MVP de la journée. Étonnamment, les titres les plus percutants du “dernier” album, que sont “MFNO” ou “Puppet Man / Coffee Song” ne sont pas ceux qui fonctionnent le mieux sur scène (ils n’ont objectivement ni la même pêche que sur disque, ni le même son non plus, pas de secret…). Tout ça est chaleureux, et alors que le rugissant “Dwarf it” vient amorcer la dernière partie du set, tout le monde est incandescent. A la fin de “Hangman’s Daughter” qui le suit, petit moment surréaliste : Garcia vient voir Arthur Seay et lui dit d’improviser un instrumental, avant de s’échapper discrètement sur le bord de scène. Ni une ni deux, Seay échange deux mots avec Cancino et Christenson, et s’engagent dans une jam au début un peu balbutiante, à base de blues rock classique pour commencer, qui va vite prendre son essor et permettre notamment au guitariste de montrer l’étendue de son potentiel. Cette jam épique dure bien une petite dizaine de minutes, pendant lesquelles Garcia regarde ses copains en fumant une cigarette (si si, mauvaises langues !) sur le bord de scène. A ce moment-là, le public (qui croit que tout ça est prévu !) est complètement rentré dans cette jam complètement hallucinée, et le groupe a emplafonné depuis longtemps le créneau horaire qui lui était attribué (sans conséquence, étant donné qu’ils étaient les derniers à jouer ce soir). Garcia revient enfin sur scène et s’empare du micro devant ce parterre mi béat mi médusé, pour se lancer dans un “Black Woman” absolument jouissif, qui finit de mettre la Valley sur les genoux. On n’aurait pu imaginer meilleure fin de set et de journée…
A l’heure où l’on fait traditionnellement le bilan d’un tel événement, les souvenirs et les sensations s’entrechoquent, et il semble encore tôt pour en faire la synthèse. On sait qu’on aura eu notre lot de découvertes en live, mais aussi une quantité importante de confirmations, sachant qu’aucun groupe n’est passé à côté ou ne nous a foncièrement déçu. Un public de connaisseurs, respectueux, nombreux, une scène parfaitement adaptée (un peu petite désormais), avec un son superbe, des musiciens fous de joie d’être là… Tous les ingrédients d’un festival de haute tenue étaient réunis, et l’alchimie a bien fonctionné. Avec une affiche de cette qualité et les mêmes conditions (on peut le rêver, le soleil tous les ans ?), on signe chaque année sur les dix ans à venir.
Laurent
Salut Laurent ! comme toujours un reportage impeccable et tonique !! pour ceux comme moi qui n’y étaient pas, on a l’impression en lisant les chroniques d’avoir été devant la scène à chaque groupe !! je partage beaucoup de tes coups de coeur mais s’agissant de BLUES PILLS, ne trouves-tu pas que ce qui en fait justement le charme et l’intérêt (hormis la ravissante frontwoman !), c’est le côté totalement oldschool à la Janis Joplin et une musique qui permet de respirer un peu et qui, je trouve, s’enrichit au fil du temps ??? et puis, que diantre, un peu de respect pour les vieux BLACK SABBATH (qu’as tu contre les petits sauts des enfants de 6 ans et les vieux ??? lol mais au final, quel professionnalisme ton report !!
Pour Blues Pills, je ne crois manquer d’éloges sur ce groupe dans la chronique, j’ai juste dit qu’on s’y ennuyait ferme 🙂 Mais j’assume, je crois que tout le monde semble les apprécier, c’est juste un peu désespérément mou pour moi, ça manque d’énergie… Les mid-tempo c’est sympa, mais même Janis Joplin avait des titres bien rock (qui leur manquent désespérément).
Pour Sabbath, tout le public semblait apprécier donc là aussi, pas de soucis, il en faut pour tous ! Respect !
A+