Quelle saloperie cette salle : soi-disant une bonne idée, elle est planquée dans un recoin en haut d’un immense complexe commercial en banlieue de Bilbao, centre commercial qui, un samedi soir, se révèle un enfer pour 4 roues ! Bref, une bonne heure perdue, ça commence mal ! J’arrive donc après le début du set de Nebula. Les boules, toutes oreilles dehors, j’en fais mon deuil et profite de ce qu’il reste, à savoir quand même une bonne demi-heure de concert. Et Nebula en live, ça vaut son pesant de cacahuètes ! Pourtant le jeu de scène du combo se résume à quelques mouvements seulement : quelques balancements pour Tom Davies, les yeux généralement fermés cachés derrière ses cheveux, penché sur sa basse. Quant à Eddie Glass, il n’est pas non plus le frontman le plus locace et déchaîné. Malgré ça, la musique hypnotique du combo fait immédiatement mouche : les riffs pointus de Glass, et la basse vrombissante de Davies font superbement ménage, parfois réveillés par un solo de guitare aérien, le tout bien balancé par la batterie emplie de groove de Rob Oswald. Le régisseur, sans doute hypnotisé par le space-rock du combo, n’y va pas de main morte sur la fumée, qui emplit la scène régulièrement, masquant presque totalement le groupe (à l’image du public d’ailleurs : en Espagne il est toujours autorisé de fumer dans des lieux publics, et les cigarettes qui font rire sont de sortie), mais ceci participe à l’ambiance générale (et force à se concentrer sur la musique !).
Excellent set des californiens, donc, encore une fois impeccables. A revoir vite en tête d’affiche !
A propos de tête d’affiche, Monster Magnet déboule sur scène et, le choc ! Dave Wyndorf, l’arrogant, le fringant chanteur (et occasionnellement guitariste) leader du combo, a pris quelques dizaines de kilos. On l’a toujours connu filiforme, torse nu sous de prétentieuses vestes à manches courtes, pantalons en cuir moulants, etc. Le voir ainsi bouffi par les médocs donne une impression étrange, limite malsaine. Mais ce sentiment est vite remplacé par un respect retrouvé pour le musicien, qui finalement se concentre et se donne à 100% sur son chant et sa gratte, incarnant les hymnes de MM avec probablement plus de conviction que depuis plusieurs années : l’arrogance crasse qui pouvait en offusquer certains a laissé la place à une humilité et une envie bien plus saines, l’occasion enfin de se pencher sur la musique du groupe d’abord, et sur son leader ensuite !
Dont acte, et la set list proposée ce soir parle d’elle-même : un démarrage bien space avec “Dopes To Infinity”, puis les deux premiers titres de “Powertrip”, avant que tous les albums y passent, aléatoirement, composant une set list superbe. Etonnant, la dernière merveilleuse rondelle de MM, “4-Way Diablo”, est complètement exclue ! Un choix étrange pour un groupe en promo Le rappel lui-même pioche dans toutes les périodes du groupe et se termine par un “Spine Of God” définitif (dans tous les sens du terme). Une set list venue de nulle part, dont le manque de “ligne directrice” permet de faire le lien avec toutes les périodes de Monster Magnet, apportant une cohérence insoupçonnée à une carrière placée sous le signe du space rock.
Scéniquement, Monster Magnet assure toujours autant : le discret Ed Mundell balance des soli hallucinants dans son coin, peinard, tandis que Jim Baglino enchaîne les poses rock clichées dont il a le secret (ce qui ne l’empêche pas de dresser une chape de basse bien plombée), porté par un Bob Pantella toujours parfait derrière ses fûts. Le revenant Phil Cavaino, dans son coin, aligne un sourire vicieux, limite carnassier. Et Wyndorf, donc, engoncé dans plusieurs tee shirts, pulls, vestes, a toujours une voix magique, et porte désormais pendant quasiment tout le set sa guitare, dont il use uniquement pour soutenir ses 2 collègues six-cordistes (qui n’en ont pas besoin, finalement). Le chanteur se concentre sur son chant, justement, et limite au strict minimum les speechs démagos entre les morceaux ou les poses de frontman arrogant les-cheveux-portés-par-le-ventilateur. Un excellent point, qui permet à tout le monde de ne se focaliser que sur le groupe au global, et non plus “Wyndorf et ses sbires”.
On quitte ce concert avec le sourire, et la conviction que Monster Magnet ressort grandi du récent drame rencontré par son leader (inutile de vous rappeler la récente overdose de Dave Wyndorf) : humilité et passion de la musique leur permettent de se recentrer sur l’essentiel. Ceci leur permet de re-créer deux liens qui pouvaient jusqu’ici les pénaliser ou les exposer à la critique : le lien entre toutes les périodes de leur carrière, qui voit ici une cohérence retrouvée, de manière presque bluffante, mais aussi le lien entre le groupe et tous les publics, leurs fans, toujours aussi fidèles, mais aussi les fans de stoner au sens large, qui commençaient à se lasser de l’attitude et des frasques de Dave Wyndorf. Fini tout ça, un Monster Magnet nouveau est en train de naître.
Laurent
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