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HELLFEST 2015 – Jour 2 (Orange Goblin, Brant Bjork, Ahab, ASG, etc…) – 20 juin 2015 (Clisson)

Deuxième jour d’envoi de steak dans la Valley des bûcherons et le ciel est un peu voilé en arrivant ce matin : la journée s’annonce bien pour ceux qui boudent la crème solaire. Les furieux ont l’air un tantinet plus glauques quand nous débarquons dans la place. Il y a du lourd aujourd’hui sur scène et quasiment que des formations qui n’ont pas une actu folle au moment de se produire ; les dernières galettes étant sorties depuis quelques mois au mieux.

Les programmateurs de cette scène, que nous chérissons trois jours durant, ont organisé cette journée comme la veille : du bourrin et du planant du milieu de la matinée aux petites heures du lendemain. Des vétérans ayant traversé les frontières du petit monde du stoner et des groupes à l’audience plus confidentielle se succéderont pour le plus grand bonheur de la joyeuse troupe qui passe son week-end de trois jours à l’ombre de cette structure. Nous croiserons dans la soirée un type qui nous demandera si on vient d’arriver, vu nos bronzages pas au top : non Monsieur, nous vivons cachés dans l’underground !

MACHETE

Difficile d’ouvrir une scène lors du deuxième jour de festival. L’effet sensation passé, l’effet cuite encore présent, les groupes de 10h30 doivent se donner plus que de raison pour espérer capter l’attention du festivalier matinal (sic) et embrumé. Machete y parviendra aisément par la grâce graisseuse d’un hardcore brutal et beuglard. Efficace. De quoi ouvrir esgourdes, intestin et gosier.

ELDER

ELDER
ELDER
ELDER
ELDER
ELDER
ELDER
ELDER

La seule frustration du concert de Elder viendra de leur place dans la programmation de la journée. Second du running-order pour  trente minutes de set – trop tôt, trop peu pour le formidable trio américain. Voir les nombreuses personnes se rameuter sous la Valley alors qu’il ne s’agit que des balances vous donne un indice sur la valeur du son proposé. Coupable d’un des meilleurs albums de 2015 avec Lore, Elder va littéralement donner une leçon de savoir-jouer, étalant ses maître-compositions sous une Valley remplie comme jamais pour une matinée. Le groupe jouera la carte de l’assurance en commençant par « Gemini » tiré de Dead Roots Stirring, glissera une nouvelle compo entre « Spirit at Aphelion » et « Compendium » Quatre titres au total pour un show maîtrisé de bout en bout. La section rythmique souriante et cohérente créera l’assise parfaite pour les solos et riffs de Nick di Salvo. Ce dernier n’hésitant pas à rajouter de la dynamique dans le chant, celle-ci faisant un peu défaut sur album. Une démonstration. De technique, de cohérence, d’écriture, la musique d’Elder est un hommage appuyé à ses 70’s références et le public ne s’y trompe pas. Les regards sont impressionnés, les avis positifs et enthousiastes et on n’est pas loin de penser que d’ici deux ans le groupe sera tête d’affiche de cette Valley, disposant du Hellfest, le soumettant par sa technique et sa fraîcheur.

MONARCH!

MONARCH!
MONARCH!
MONARCH!
MONARCH!
MONARCH!
MONARCH!
MONARCH!
MONARCH!

Après ce set bien gras et dégoulinant à l’américaine, il est l’heure de passer au prochain entremet alors qu’il n’est pas encore treize heure et que nombreux sont ceux qui vont se réfugier à l’ombre. Le public de festival c’est plus ce que c’était… Alors donc, ce nouveau plat du menu du jour de la gargote Valley nous provient en direct du Sud-Ouest. Quiconque suit un peu l’actualité des grandes émissions culinaires qui trustent le prime time de la petite lucarne (quoi ? La télé existe encore…), saura que ce terroir fait dans le costaud et le consistant : ça tombe bien on adôôôre ça ! La présentation est des plus soignée : bougies disposées sur le clavier qui est posté à l’avant de la scène et lights lugubres : ça va donner d’entrée de set. La tête de la basse est frappée contre le sol (pourquoi tant de haine ?) tandis que la vocaliste en cheffe – sapée comme une première communiante – se désaltère sous son clavier-autel avant de vociférer telle une folle et de capter instantanément toute l’attention du public alerte. Pour ce qui est du public moins alerte, celui-ci est carrément K.O. dans les cordes, assis assommé par la chaleur et les coups de boutoirs assénés par cette horde de fous. Quarante minutes de déluge sonore au rythme ralenti s’abattent dans la Valley ; les titres à rallonge sont aussi gras que l’humour des festivaliers et certains mâles poilus se produisant dans les tentes dites extrêmes feraient bien de s’inspirer un peu de la petite française à la blonde chevelure. Des titres comme « Blood Seeress » atteignent un niveau de puissance absolument phénoménale sur scène et les gastronomes – ceux qui ne se réfugient pas dans la valley uniquement pour éviter l’astre solaire – s’en paient une sacrée tranche. Au terme d’une déferlante d’une rare violence, Madame Shrek redevient Princesse Fiona pour remercier le public avec une sincérité touchante. On profite de la pause pour vaquer à d’autres occupations parce qu’il y a d’autres groupes qui jouent en d’autres lieux et que les prochains à égayer ze Valley se produiront une heure plus tard.

THE WOUNDED KINGS

THE WOUNDED KINGS
THE WOUNDED KINGS
THE WOUNDED KINGS
THE WOUNDED KINGS
THE WOUNDED KINGS
THE WOUNDED KINGS
THE WOUNDED KINGS

Dire qu’on attend la prestation live des doomeux brittons de The Wounded Kings avec une pointe d’excitation est un lourd euphémisme. D’autant plus qu’on ne sait jamais vraiment qui seront les partenaires du guitariste Steve Mills sur les planches. On savait que la charmante Sharie Neyland avait quitté le groupe l’an dernier (snif) et que George Birch, le chanteur originel, avait dépanné le groupe suite à son départ soudain. On constate que le frontman au cheveu ras est toujours de la partie, officiant désormais aussi en second guitariste (ça fait des économies de personnel !). Un semblant de “vrai” groupe, enfin ? Quoi qu’il en soit, le groupe entame son set dans une Valley remplie (mais pas trop dense) d’un public curieux, mais qui peine un peu à rentrer dans le concert. Il faut dire que le groupe met une bonne dizaine de minutes à se roder, peu expressif, un peu crispé… A moins que nous en attendions trop ? Mais en se rapprochant du milieu de set, la sauce prend enfin, et l’alchimie commence à opérer. Les tempo lents à mourir associés à la torpeur ambiante (le climat de début d’après-midi est déjà lourd) appesantissent l’ambiance, et bien accompagnés d’un light show encore une fois excellent, ils finissent d’embarquer un public petit à petit conquis. La voix atypique (pour ce genre musical) de Birch joue à plein la carte du chant hanté, jouant de son tremolo pour mieux encore appuyer ses effets. Non dénué de charisme, il tient bien la baraque, même si ses collègues instrumentistes sont loin de démériter, qu’il s’agisse d’Alex Kearney, souriant et vif à la basse, ou encore l’impérial Mills, bien sûr, impeccable autant dans sa production de riffs que dans ses soli, avec de redoutables séquences en harmonie avec Birch. Au final, les rois blessés nous auront proposé un excellent set, d’un doom traditionnel baigné de fulgurances instru psyche du meilleur tonneau.

ASG

ASG
ASG
ASG
ASG
ASG
ASG
ASG
ASG
ASG
ASG
ASG

Bing ! Après les rois, place au quatuor de Caroline du Nord qui n’a pas son pareil pour foutre un beau bordel. Il faut dire que le sympathique groupe a acquis, au fil des années, une solide troupe de suiveurs bien au-delà de la scène purement stoner un peu comme d’autres formations dont Red Fang, qui se produiront le lendemain sur l’une des deux grosses structures du festival. Casquette de trucker vissée sur la tête, Jason Shi donne le coup d’envoi du show sur « Mourning On The Earth » balancée avec brio. Brio sera d’ailleurs le maître mot d’une prestation rondement menée par des musiciens (et poètes) aguerris. Le temps accordé à ASG pour s’exprimer est concis, le groupe envoie donc une anthologie de sa discographie en extrayant de son– trop – modeste répertoire les perles que sont « Right Death Before », « Blood Drive » ou « Low End Insight ». Aussi à l’aise dans les plans rapides que dans les ambiances plus ralenties, les Etasuniens foutent la patate aux nombreux spectateurs entassés sous la tente (et pas que pour y trouver de l’ombre) alors que la concurrence est rude question rock’n’roll à l’heure du goûter. « Day’s Work » restera un énorme moment de ce show, d’une rare intensité. A l’heure à laquelle les amplis se sont tus, la communauté de la Valley sourit béatement enchantée qu’elle est de ce concert d’excellente facture.

AHAB

AHAB
AHAB
AHAB
AHAB
AHAB
AHAB

Par l’on-ne-sait quel phénomène (tout à fait louable) on note avec surprise la présence assez haut sur l’affiche du quatuor doomeux teuton Ahab. Le combo de Daniel Droste et Christian Hector compte bien en profiter pour marquer les esprits. Sauf que…oui mais. On attendait beaucoup de ce set, n’ayant jamais eu l’occasion de voir les allemands jouer live. Mais cette rasade de doom léthargique calée entre l’énergie U.S. de ASG et le stoner groovy de Brant Bjork est dure à machouiller. Il faut dire aussi que scéniquement, les gars aiment se regarder jouer et faire la gueule (des allemands, quoi…), et ce n’est pas le charisme de prof d’histoire-géo de Droste qui va changer la donne (désolés, amis enseignants !). Musicalement, le trip Moby Dick n’est pas trop invasif (si ce n’est les bruits de vagues et les cris de mouettes un peu abscons entre les morceaux), et heureusement, les gars jouent impeccablement. Et c’est là que ces petits malins emportent finalement le pompon : derrière une scénographie à l’austérité toute Est-allemande dans son enthousiasme débridé, ils bénéficient d’un son brutal, et les séquences de pure agression doom qui alternent avec les plages plus planantes sont bien percutantes. Le chant subtilement guttural de Droste, en directe provenance d’outre tombe, vient compléter des passages où la dualité des guitares apporte des nuances intéressantes. On attendait de ce set une énorme claque ; musicalement, on n’a pas été très loin, mais on aurait sans doute aimé voir le combo allemand plus enthousiaste, mettre plus de cœur à l’ouvrage, même si l’exécution fut parfaite. Efficace toutefois… oui mais.

BRANT BJORK

BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK
BRANT BJORK

Sans dec’. Y a t’il quelqu’un de plus cool que Mr Cool lui-même ? Autant le sieur nous avait bien scotché moins d’un an auparavant au Up in Smoke, au cours d’un show enlevé et frontal, autant aujourd’hui le Brant va se la jouer posay et chamanique. Mr a mis sa gratte sur « Smooth », catégorie grain tranquilou et va dérouler un set tout en vibes « Jalamantanesques ». Le groupe ouvre d’ailleurs le concert par la doublette « Lazy Bones / Automatic Fantastic », histoire d’annoncer la couleur. Le Low desert punk band envoie un groove chaleureux et limpide qui sent la cohésion et le bonheur de jouer ensemble. Le virus est contagieux. Il suffit d’une petite rotation est/ouest de la tête pour constater un immense sourire collectif. Les titres s’enchaînent de « Buddha Time » à « Boogie Woogie on your Brain » sans qu’une vague de saturation emporte la Valley. Non. Tranquilou on vous dit. L’ancien batteur de Kyuss maîtrise son sujet et dirige le concert comme un chamane guiderait une séance de prise d’Ayahusca. Bienveillant, toujours quelques petits mots bien placés et surtout, le dude croit en sa musique. Voyez ce final sur « Freaks of Nature » faire chavirer le public en une masse de groove poilu et d’amour. Putain de hippies ! Le concert du Bjork Brant ajoutera un peu plus de chaleur à cette journée déjà bien chargée, nous laissant plus serein et apaisé que jamais prêt à en découdre avec le reste du festival.

ORANGE GOBLIN

ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN
ORANGE GOBLIN

Après plusieurs passages sous la Valley ces dernières années, il apparaissait plus que légitime de voir le quatuor anglais parvenir à la tête d’affiche. Un honneur mérité pour un groupe qui ces dernières années n’a pas ménagé ses efforts. Grisé par cette perspective, on imaginait bien le groupe tendu, crispé par la pression. Ce fut tout le contraire ! Et il n’a pas fallu longtemps pour le constater. Voir le père Ben Ward et ses collègues débouler sur scène (après avoir passé la journée à regarder les autres groupes depuis le bord de la scène) avec le sourire jusqu’aux oreilles aurait dû nous mettre la puce à l’oreille… Ils rentrent dans le lard direct avec un “Scorpionica” toujours efficace, qui prend très vite une tournure électrique. Mais dès le pourtant moyen (sur album) “Devil’s Whip”, c’est le public qui devient électrique. Et à partir de là, c’est l’escalade : le groupe s’éclate de plus en plus, gagnant en confiance et en puissance, et le public prend son pied. Deux mondes qui communiquent : sur scène, papa Ward arpente la scène dans tous les sens, s’adresse au public en beuglant, Joe Hoare n’a jamais été aussi souriant et frondeur, Millard est toujours noyé sous cette masse de cheveux blonds, tournoyants non stop, et Chris Turner, dont le set de batterie pas trop loin de la scène le rend enfin visible, participe au show sans réserve. De l’autre côté des barrières, le public, sans trop que l’on comprenne exactement quelle en est la cause (mais on s’en fout), est incandescent, déchaîné : ça slamme, ça gueule, ça chante le poing levé… et le premier rang a la banane, lui aussi. Niveau set list, les gaillards se font plaisir, avec notamment une version de “Saruman’s Wish” qui ne fait même pas redescendre l’ambiance, et quelques petites friandises tel le punkisant “Your World Will Hate This” (issu du sous-estimé Coup de Grâce) ou le vieux “Blue Snow” (Time Traveling Blues). La fin, bien que très traditionnelle (“Quincy The Pigboy” et “Red Tide Rising”… surprise !) ne fait que sonner le glas fatidique d’un set qui aura laissé des traces, sur les corps et dans les têtes. Avouons-le, on a beau adorer Orange Goblin, on ne les pensait pas capables de décrocher ainsi la timbale. Grand.

TRIGGERFINGER

Le trio de dandys belges aura été selon certains l’une des sensations de cette édition du Hellfest. Il est, à notre sens, assez éloigné du style auquel nous consacrons ses pages. Leur rock’n’roll est certes efficace, mais pas franchement stoner avec ses plans popisants. Nous levons donc le camp afin d’aller poursuivre nos pérégrinations amorcées dans d’autres lieux après y avoir pris goût lors du bain de jouvence offert par Faith No More. Ah ouais, après la bande de Mike Patton, nous étions idéalement placés pour admirer le feu d’artifice concocté pour ce dixième anniversaire. La bande originale a d’ailleurs fortement contribué à notre régression. Il se murmure que Desert-Rock était ensuite présent lors des performances d’Obituary et de Venom (c’est bon là ? vous nous croyez quand on vous explique qu’on est retombé en enfance ?).

Nous allons ensuite glander ou nous trémousser (c’est selon) en attendant que tout le monde s’en soit pris suffisamment plein la gueule (et il y avait matière) pour lever le camp. Le temps de monter les désormais traditionnels aperçus visuels de nos tribulations (que vous trouverez en bas de page), de faire chauffer les accus, d’échanger un peu à propos de nos impressions sur des sujets forts vitaux et d’étancher notre soif, nous nous écroulons afin de profiter de quelques heures de sommeil vu la journée de bourrins qui se profile quelques heures plus tard…

Cliquez ici pour voir les photos live de la journée !

 

 

[A SUIVRE…]

 

Chris, Flaux, Laurent