Avec sa mention COMPLET plus d’un mois avant l’événement, il gravitait autour de cette soirée une aura de convoitise intrigante. Une affiche 100% cocorico avec au programme le trio rouennais Servo, suivi de l’équipe des frères Fossat, j’ai nommé Slift. Armés de leur très réussi dernier album, Ilion, le trio Toulousain s’est embarqué sur une tournée qui semble fédérer les foules. C’est donc avec un mélange d’impatience et de curiosité que l’on s’est dirigé ce vendredi soir au Stéréolux de Nantes pour assister à la date tant attendue.
Ouverture des hostilités à 20h30 avec Servo, trio ayant aussi fait ses débuts en 2016 et pourvu d’un dernier opus tout frais sorti de décembre dernier. Devant un parterre de spectateurs s’amassant déjà de manière admirable, l’équipe rouennaise déploie progressivement sa musicalité noise-rock sombre mêlée d’éléments post-punk. Cette musique nous est présentée comme « avant tout au service du live », et il est vrai que l’on ne peut nier cette assertion. Sur la basse ronronnante de Louis, le groove immersif d’Hugo et les nappes envoutantes promulguées par la guitare, ce sont les voix des trois lurons qui nous emportent. Les têtes commencent à doucement s’agiter, les regards semblent captivés et très vite nous sommes tous happés dans l’univers onirique et étrange du groupe, hypnotisé par la voix planante et aux accents New Wave d’Arthur. Les morceaux s’enchaînent si bien que l’on en perd le fil, livrés que nous sommes aux caprices de ce doux trio. Un spectacle magnifié par le rendu du Stéréolux, qui même avec sa salle « micro » nous offre une qualité d’écoute incroyable.
S’en suis un interlude éclair où l’armée de techos du lieu s’affairèrent à préparer le plateau suivant. Le temps pour nous d’une pause aux tireuses avant de vite se replacer devant, histoire d’éviter la masse toujours plus grandissante de convives ralliant l’événement. Puis Slift entre en scène. Le light show bleu rêve de Servo se soustrait ici à un jeu de clair obscure, entre lumière directe et vidéoprojecteur, effaçant par intermittence les musiciens derrière des effets cisaillés. Un contraste renforcé par leurs tenus noirs en opposition au clair criard de leurs instruments.
Très vite les perceptions se confondent et les murs de son commencent à nous balayer comme des bateaux de noix dans la tempête. L’énergie du groupe est stupéfiante, à l’image de son guitariste Jean Fossat effectuant de frénétiques aller-retour entre micro et ampli, ne lâchant sa Gibson SG que pour poser les doigts sur son clavier. La basse de son frangin Rémi ne s’arrête pas non plus, en atteste les frasés exaltés d’« Ilion ». Et que dire du batteur, capable d’enchaîner de longs staccatos entraînants avec de puissantes séquences à déchausser les dents. Côté foule, la réponse est au rendez-vous : dès l’arrivée d’« Ummon », joué pour l’occasion plus rapide que sur l’album, les passions se déchainent et explosent aussitôt en pogo. Plus tard, des slams se succèdent même sur ce monument à briser des nuques « Weavers’ Weft » et sur « Altitude Lake ». Bien évidemment, ces déchainements perdraient de leur superbe sans les découpages planants qui les séparent, permettant ainsi à l’auditoire de reprendre son souffle, et dans le même temps de reculer pour mieux sauter.
Déterminé à nous partager leur dernière création, les titres du dernier album sont à l’honneur et le moins que l’on puisse dire c’est que cela fonctionne en live. La montée se fait progressivement jusqu’aux trois derniers titres qui se présenteront comme le bouquet final, une ultime gifle, un panache coloré et explosif qui viendra nous lessiver, inscrivant dans nos mémoires de pauvre mortel le souvenir de Slift comme un groupe maître de la scène, et qui justifie sans peine l’engouement que lui porte son public.
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