Voilà quelques temps que je m’étais promis de profiter du prochain passage à Nantes des Manceaux de Stone From The Sky pour aller découvrir ce que donne leur prestation live. Donc, voyant se dérouler l’affiche de leur mini tournée de ce début d’année et leur passage à Nantes, j’en ai profité pour aller jeter une oreille sur ces gaillards ainsi que sur Wormsand dont on m’avait dit le plus grand bien. Pourquoi se priver d’une soirée sous les auspices de l’association Erato qui se décarcasse si bien pour faire émerger les talents parfois confidentiels de notre scène ou trop souvent les mastodontes règnent sans partage?
Nous voici donc encore une fois à la scène Michelet et ce soir c’est Black Horns qui a pour tâche d’ouvrir le bal. Cet étonnant duo Rennais a déjà à son actif un EP et un LP et les deux bonshommes ne sont pas venus faire autre chose que jouer. Ils associent l’art minimaliste du duo à un je-m’en-foutisme salutaire. Les gars produisent un son qui appartient à beaucoup d’autres groupes sans pour autant en être la copie conforme.
Black Horns tire une originalité délicieuse de la base du genre. La gratte exhale une haleine pas nette où suinte un fond d’ordure. Mais derrière la crasse faussement étalée il y a une réelle maîtrise. Le public ne s’y trompe pas et tends la joue pour se faire tarter comme dans un concours de baffe du fin fond de la Sibérie. C’est sludgy, muddy et alcoolisé comme il faut. La nonchalance d’Adri à la gratte est porteuse. Sa voix du fond du bayou ajoutée au swing de Tom derrière ses fûts offrent une palette de jeu virant du blues au doom en passant par le sludge. Carton plein pour Black Horn qui conquiert la salle et fini le préchauffage de la machine avec une efficacité remarquable.
Wormsand étant de Menton, ville à la réputation gériatrique, on aurait pu croire que le temps ne nous était pas compté et pourtant, à peine le temps de s’offrir quelques mondanités houblonnées et le trio vient se cramer la plante des pieds sur les planches encore chaudes du précédent set.
Une énergie juvénile déborde de ces gars un brin poseurs mais séduisants de fougue. Wormsand met quelques minutes à convaincre son auditoire mais pour des raisons techniques où le guitariste frôle la colère. Heureusement le public est bienveillant et les gesticulations énergiques ainsi que les idées prometteuses de la musique ont tôt fait d’enthousiasmer la salle. Les efforts musicaux naviguent dans une nappe continue d’un même gruau quasi doom l’ensemble est pesant à souhait. Emerge de la masse le chant qui touche plus au cri rauque qu’à l’angélus. Ce doom sombre ou pointe (poutre?) parfois la lumière fait bien son office ce soir même si une respiration de temps en temps n’aurait pas nuit il est indéniable que les accords qui séduisent l’oreille feront de Wormsand un groupe à suivre toujours plus attentivement et à revoir sur les planches avec (encore) quelques bornes de plus au compteur pour savourer pleinement leur musique et y trouver les tanins propres aux vieux routards sludge qu’ils promettent de devenir.
Voici venu enfin la prestation qui m’a décidé à venir ce soir. Stone From The Sky avait récolté quelques lauriers l’an passé au sein de notre rédaction et sur ce sujet mon insistance sur la qualité du groupe a dû déplacer hors du cadre le concept d’objectivité. Pour autant le trio va immédiatement démontrer la qualité de ses compositions en ouvrant avec “Inside the Dalek” et poursuivant avec “Vena Cava”.
Du côté de de la basse et de la guitare les mecs assurent le show, rien de trop excessif, juste la démonstration de la volonté d’exister sur scène. Le public entre dans la transe et le set défile à une vitesse folle. L’atmosphère dégagée par le trio vaut bien celle de ces albums et on sent que le set s’est bien rodé au cours de ces derniers mois. Impeccable SFTS assomme toute la salle avec sont titre “Animal” flirtant entre post et psych. Les montées pleines de puissance et de beauté du morceau sont une preuve de plus du talent d’écriture de ce groupe.
“Welcome To Trentor” et sa mise en scène musicale parfaite va clôturer la soirée, les accents orientalisants balayent ce qui aurait pu rester d’objection. La batterie va crescendo et l’envie de plus monte à chaque instant. Les cordes se déchainent et font souffler la tempête dans la petite salle où le plancher toujours prompt à vibrer semble se soulever en vagues. Stone From The Sky joue le passage de balle d’un instrumentiste à l’autre et finit le set dans la frustration la plus totale car le temps manque pour un rappel.
C’est un peu déçu de n’avoir pas pu en prendre plus plein les oreilles que le public quitte la salle. Frustration sans trop de gravité pourtant, le sentiment d’avoir passé un excellent moment domine. Chacun trace donc sa route pour se rendre soit au bar, soit sauter sur l’occasion pour acquérir la réédition par More Fuzz Records de Fuck The Sun de Stone From The Sky et compenser le rappel manquant.
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