Après la sortie de “Universe”, leur dernier album pour le moins audacieux (et réussi), on a voulu intercepter les Truckfighters entre deux tournées pour parler du disque, de la carrière du groupe, de leur actu, etc… C’est Ozo, le bassiste et vocaliste du trio, qui s’y est collé !
Il y a eu cinq ans entre votre album précédent et “Universe”. Qu’avez-vous fait tout ce temps ?
On a surtout tourné, tourné, et encore tourné… Mais il y a aussi le fait que l’on a eu trois batteurs différents sur cette période ! L’air de rien, ça freine pas mal le processus d’enregistrement : à chaque fois qu’il nous fallait accueillir un nouveau batteur, on devait passer beaucoup de temps à répéter des “vieux” morceaux, ce qui prend du temps, mais ça ralentit aussi la dynamique créative… Mais il y a aussi le fait que nous nous étions dit dès le début que nous souhaitions prendre tout le temps nécessaire pour réaliser le meilleur album possible, on ne voulait pas faire la même erreur que certains groupes font parfois, à savoir se forcer à sortir un disque trop tôt pour répondre à la demande des fans, de leur label ou autre.
On a le sentiment que votre renommée a pris un coup d’accélérateur ces dernières années. On vous a notamment vus tourner dans des endroits où vous n’aviez jamais été encore. A quoi attribues-tu ce changement de voilure ?
Concernant nos tournées, tu as raison, nous avons pu aller dans des endroits où nous n’avions jamais pu aller jusqu’ici. Cela fait plusieurs années que nous recevons plus de demandes de concerts que nous ne pouvons en effectuer, donc naturellement c’est plus cool pour nous de jouer dans des endroits où l’on nous demande. Tu vois, on n’a pas la farouche volonté de jouer dans telle ville ou tel pays juste pour le principe. Et donc il y a des pays où nous allions moins, car on ne nous proposait que rarement d’y jouer. J’imagine juste que des pays comme l’Espagne ou la France ont juste été un peu longs à capter la “hype Truckfighters” [Rires]. En fait depuis quelques années, on a reçu plein de demandes en provenance d’Espagne et de France, donc nous avons enfin pu y aligner quelques séries de dates. Ce n’est pas plus compliqué ! Pour revenir à ta question, je fais la même observation que toi : nous aussi on sent que notre carrière accélère un peu plus chaque année depuis nos débuts, mais en fait de notre point de vue ça a toujours été ainsi, ce qui est très excitant comme situation ! On construit notre carrière lentement mais sûrement, en enchaînant les concerts surtout… Je pense qu’on en a fait environ 600 jusqu’ici !
Vous avez effectué plusieurs tournées aux USA et avez encore des dates prévues sur mars, mai, etc… C’est assez rare pour les groupes européens d’être aussi actifs sur le continent américain, comment l’expliques-tu ?
C’est vrai que nous partons sur notre troisième tournée là-bas en mars, puis une quatrième en mai plus tard cette année. Les USA sont toujours un nouveau marché pour nous, et c’est ENORME ! La plupart du temps nous attirons à peu près le même nombre de personnes là-bas pour un concert qu’ici en Europe, même si dans certains états on part de plus loin, c’est dans ce cas plutôt un retour aux “basiques”. Mais c’est ainsi que vont les choses, il nous faut probablement travailler autant aux USA que ce que nous avons fait en Europe pour que “ça arrive”. Avec un peu de chances, ça ne prendra pas dix ans ! [Rires] Mais les choses se présentent bien pour nous sur ce continent, ça serait super que ça marche.
Avec votre recul, comment voyez-vous le public américain par rapport au public européen ?
Et bien ils ne sont pas trop différents en réalité, le public est très similaire, en tout cas ces derniers temps. Je pense que nos fans sont super, et ils sont nombreux à sincèrement apprécier que nous venions jouer dans leur propre ville ou aux environs.
“Universe” est votre second album avec un seul guitariste. Sur l’album, il y a de nombreux plans avec deux guitares simultanées ou plus encore. N’avez-vous pas craint qu’il soit difficile de retranscrire ces plans en live avec la seule gratte de Dango ?
Non, pas vraiment. On n’a jamais voulu être l’un de ces groupes qui sonne sur scène exactement comme si on avait mis le CD dans la platine. Nous avons au contraire la volonté de sonner différemment, donc ça ne nous dérange pas du tout. Nous essayons de faire les meilleurs albums possibles, et pour cela, si nous pensons qu’il est opportun de rajouter un ou deux overdubs de guitare, ou d’ajouter des harmonies sur le chant, nous le faisons, sans nous préoccuper le moins du monde de la façon dont le morceau sonnera en live. Evidemment c’est fun de pouvoir jouer les morceaux en live avec les mêmes effets et arrangements, mais en général, même quand ça apparaît difficile de premier abord on y parvient à peu près avec un peu d’entraînement [Sourire]. Mais ça sonne toujours un peu différemment, et avec un peu de chance les gens apprécient à la fois les versions studio et leur déclinaison live, et le voient comme deux expériences différentes.
La production de “Universe” se focalise beaucoup sur le son de guitare, apportant une richesse et une variété très intéressantes. On peu penser ici ou là à des sonorités que n’auraient pas renié des groupes comme Tool, Mastodon, les premiers Dredg, … Est-ce que vous aviez en tête ces groupes quand vous étiez en studio ?
Hum… En réalité, on ne se préoccupe pas vraiment de ce que font les autres groupes. Nous faisons les choses comme nous le sentons, nous ne nous comparons jamais et nous ne tentons jamais d’obtenir un son proche de quelque chose, ou même de nature à rappeler un groupe ou un autre. En fait, nous faisons quasiment l’inverse : nous essayons de nous nettoyer complètement l’esprit et nous nous concentrons pour créer quelque chose qui vienne de notre corps et de notre âme, plutôt que d’être influencés par d’autres choses.
Qu’en fut-il des lignes de chant ? Là aussi, il semble que pour la première fois sur “Universe” les vocaux ont l’air d’avoir été très travaillés, et que tu aies considéré ton chant comme un instrument à part entière.
Même si ce n’était pas une volonté spécifique en commençant cet album, je voulais effectivement cette fois faire mieux que sur les albums précédents. Je fais partie de ces gens qui ne sont jamais complètement satisfaits. C’est usant parfois, étant donné que tu ne peux jamais être complètement content : tu essayes toujours de faire mieux. C’est probablement l’une des raisons qui font que l’on adore tellement jouer live : nous essayons toujours de nous améliorer, de faire les choses mieux, différemment.
Tu as participé aux deux derniers albums de Greenleaf en tant que “simple” chanteur. Dirais-tu que cette expérience t’a aidé à te focaliser sur le chant seulement, pour t’apporter cette nouvelle approche pour Truckfighters ?
Oui, absolument ! C’était une expérience superbe pour moi. J’adore les morceaux de Greenleaf, j’en tire une énorme fierté.
Pourquoi ne fais-tu plus partie du groupe ?
Greenleaf veut faire des concerts et des tournées, comme tous les groupes, c’est normal, et mon emploi du temps est très contraint rien qu’avec Truckfighters en ce moment. Il ne m’est plus possible de trouver du temps pour faire ça aussi bien que je le voudrais. Même si j’en aurais énormément envie, je n’ai tout simplement aucun temps à y consacrer.
Peux-tu nous dire une bonne fois pour toutes pourquoi vous avez tous ces surnoms ?
Dès nos débuts, Truckfighters a commencé comme un projet pour le fun. On n’avait pas encore cette idée tarée de prendre d’assaut le monde entier [Rires]. Du coup notre objectif était juste de jouer la musique la plus fuzzée et “stonerizz” possible, ce n’était pas fondamentalement sérieux, et il y avait beaucoup d’humour dans notre démarche. Du coup, pour chanter des morceaux qui parlaient de traverser le désert en bagnole pour rejoindre le Mexique,qu’est-ce qui aurait mieux sonné pour ce projet que d’avoir des noms mexicains ? [Rires] C’était le bon vieux temps. Puis nous avons commencé à beaucoup tourner, et le groupe a poursuivi son chemin… mais les surnoms sont restés ! Voilà toute l’histoire. Nous jouons toujours dans Truckfighters parce que c’est le truc le plus fun que tu puisses imaginer. C’est vraiment la chose qui nous motive à continuer : nous pensons toujours que c’est super fun de jouer de la musique !
Tous vos albums sont sortis via votre propre label, Fuzzorama Records. Pourquoi ce choix plutôt que des labels plus traditionnels et bien établis dans le milieu ?
On en a eu marre d’envoyer des démos à plein de labels et de recevoir des réponses pourries. On a donc lancé Fuzzorama… mais on a toujours été très clair sur le fait que Fuzzorama ne serait pas uniquement un label qui permettra à un seul groupe de sortir ses propres chansons. Fuzzorama doit être un “vrai” label, qui sort les disques d’autres groupes, et qui se repose sur une structure robuste en termes de distribution et de promotion. C’est donc ça que nous avons fait ! [Rires]
Cette intention est d’ailleurs confirmée par l’annonce récente de la sortie de Valley Of The Sun sur le label…
Tout à fait. Il s’est passé plusieurs années durant lesquelles nous n’avons pas fait grand-chose sur Fuzzorama, mais l’unique raison était que nous n’avions pas de temps pour cela. Or nous avons désormais un nouveau management, ils nous aident aussi avec le label en tant que consultants. Nous avons donc trois sympathiques personnes de notre management, qui ont travaillé pour des labels comme Sony, Nuclear Blast, etc… qui nous aident désormais avec notre label. C’est une énorme amélioration. Le label nous appartient toujours et on travaille beaucoup dessus, mais on a désormais de l’aide pour le gérer, et ça rend notre vie de musiciens bien plus facile !
Est-ce que je me trompe si je dis que pour vous les prochains mois seront essentiellement dédiés à tourner ?
Non, tu as raison ! [Rires] On va tourner comme des dingues ! On a fait une tournée en Europe en février et mars, puis on part pour les USA pour deux semaines. On y repartira en mai pour quatre semaines. Après ça, on va faire quelques festivals cet été : je crois qu’on en a déjà une quinzaine bookés, et d’autres sont à venir, ça va nous faire un été super chargé… Puis on repartira en tournée en Europe à l’automne. Et au milieu de tout ça, on fera quelques concerts ici ou là… Oui, vraiment, 2014 sera très chargée pour Truckfighters !
Mars 2014 par Laurent