Trois ans écoulés depuis la dernière cérémonie. Comme à chaque fois, les créatures des profondeurs se réveillent et requièrent un sacrifice. Les prêtres du doom metal atmosphérique que sont les gars d’REZN revêtissent donc à nouveau leurs robes rituelles, leurs instruments prophétiques, et s’évertuent à rendormirent ces démons abyssaux d’une nouvelle salve de sonorités grandioses, lourdes et envoutantes. Une messe intitulée Solace et prononcée par le truchement du label Off The Record.
Le quatuor introduit le sermon par « Allured By Feverish Visions ». Une musique qui par sa guitare planante, son synthé aérien et sa basse d’une rondeur délicieusement grasse nous renvoie de suite dans les carcans du doom atmosphérique faisant l’empreinte d’REZN. Après cinq minutes de décollage, le vol s’intensifie, porté par une batterie de plus en plus percutante et une guitare davantage grondante, tel l’orage qui s’approche inexorablement. Néanmoins, aucun coup de foudre, aucun vent violent, l’ambiance redescend finalement en douceur et laisse place à « Possession ». Deuxième titre invoquant pour sa part le chant éthéré de McWilliams, qui après 4 minutes d’ensorcellement nous livre sans pitié à la brutalité d’un groove dévastateur et puissant. La tempête est enfin arrivée…
Ces enchainements de textures musicales et de profondeurs de composition nous permettent par ailleurs de saluer la qualité du mixage, qui on ne va pas se mentir est en grande partie responsable du succès du groupe. La richesse de « Reversal », tiraillée par les hauteurs stratosphériques d’un chant diphonique et les profondeurs insondables d’un lent groove malsain, ne saurait s’épanouir autant sans le secours d’un équilibrage et d’un assemblage d’une telle qualité.
Après ces trois morceaux, une certaine confiance s’installe, atténuant la vigilance au profit du plaisir de se retrouver en terrain connu. L’on secoue naïvement la nuque sur la rythmique entêtante de « Stasis », on ferme les yeux sur les délicats phrasés de guitare qui lui succèdent, non conscient du coup du massue qui vient nous cueillir à la cinquième minute. Ce dernier nous projette sans prévenir dans une dimension nouvelle, dérangeante, pleine de sonorités singulières, et pourtant d’une indéniable beauté. Transformation qui mène donc au majestueux intermède qu’est « Faded and Fleetine », royaume dans lequel siège le fameux saxophone du groupe. Ici, le musicien multidisciplinaire Spencer Ouellette s’en donne à cœur joie sur son cuivre, désormais intégré aux productions d’REZN. Il va mène pousser le vice jusqu’à s’accommoder de la complicité d’une flûte à de rares occasions.
« Webbed Roots » clôture la cérémonie en résumant du haut de ses presque huit minutes toute la complexité structurelle de l’album. Une attaque puissante, mêlant lent groove hypnotique et voix envoutante (Marie Davidson + Rob McWilliams) en une grandiose ascension vers les cieux. Puis survient une rupture implacable, arrachant leurs riffs électriques aux guitares et sa substance psychédélique au clavier. Par la suite, tandis que la tempête semble se calmer, la batterie nous ranime et nous fait poursuivre le voyage. Un trip porté par une voix nouvelle, prophétique, et déterminée à nous guider vers une nouvelle apothéose écrasante.
Au regard de leur précédent opus, l’on pourrait juger Solace un peu court. Et même en oubliant qu’il ne s’agit que de la première partie d’une série qui viendra prochainement se compléter, ce bilan reste nuancé par une richesse d’écriture et une profondeur toujours plus impressionnante de composition. Cet album est plus court, cependant chaque piste recèle plus de mystères, offre plus de relief, davantage de possibilités d’explorer et en définitive peut-être plus de matière à prendre son pied. La dimension atmosphérique est ici portée à son paroxysme, offrant des possibilités infinies dans lesquelles il ne faut pas hésiter à aller se perdre.
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