Il aura fallu à peine plus de deux ans à Djiin pour nous proposer son troisième album, successeur de Meandering Soul. Le quatuor breton aura mis à profit ces quelques mois pour peaufiner son style, densifiant notamment son expérience scénique en jouant sur un maximum de scènes. C’est donc un groupe plus mature, plus sûr qui se présente sur ce Mirrors (qui sort chez Klonosphere), un album exigeant qui nous aura un peu désarçonné.
Stylistiquement, avec 5 titres pour presque 45 minutes de disque, on s’imagine bien que ça ne va pas verser vers le punk rock. Le disque nous prend la main et nous amène au contraire dans un monde où les compos sont élaborées, sinueuses, denses… Il y a beaucoup de choses dans ce disque, et les atours prog rock y sont plus développés que sur ses prédécesseurs. Les amateurs de structures simples, couplet-refrain / couplet-refrain ne s’y retrouveront pas.
Même ses morceaux les plus directs comme « Fish », s’ils développent néanmoins un bon gros riff, emmènent l’auditeur sur une bonne moitié du morceau dans des sphères plus aériennes, pleines de jolis arpèges légers, avant de conclure via un retour de son riff péchu. Même schéma pour « Mirrors », qui en outre développe encore plus ses aspects prog rock, chargé d’harmonies arpèges/chant et de rythmes de batterie décalés, avec aussi une deuxième moitié de morceau tortueuse, parfois aux échos jazz contemporain, avant un retour sur son riff initial. Pfiou…
« In the Aura of my own Sadness” amène ces aspects prog rock dans leurs retranchements, avec des harmonies chant-guitare parfaitement maîtrisés, mais effectivement assez (d)étonnantes ; les sourcils se lèvent souvent sur ces sonorités atypiques, mais l’exécution est encore une fois sans faille. L’occasion de louer le talent de ce quatuor de musiciens doués, tous dans leur discipline, avec une base rythmique redoutable, et des mélodies pilotées aléatoirement par le chant, la guitare, la harpe ou la basse – parfois en simultané ! « Blind » plus loin propose une sorte de parenthèse dark, avec ses mélodies dépressives menant à un break mêlant chant torturé et leads de guitare dissonants, pour aboutir à un final bourré d’énergie rock, mené tambour battant (c’est le cas de le dire). Enfin, un gros morceau – littéralement – vient clôturer la galette, avec ce « Iron Monsters » de 13 minutes, complexe, déchiré de multiples breaks, et son final puissant très réussi.
Vous l’aurez compris, les amateurs de musique d’ambiance à écouter distraitement ne seront pas la clientèle première de ce disque. Sur Mirrors, Djiin pousse fort les curseurs pour poser sur vinyle ce qui se rapproche le plus de son énergie scénique, quelque chose de nerveux, jamais ennuyeux, qui prend le spectateur par surprise plus qu’à son tour – et à rebrousse poil, souvent. Le quatuor ne s’embarrasse pas de dogmes formels, et va un peu partout où il lui chante : psych rock, gros rock qui tâche, prog rock, jazz, blues… Un disque qu’on recommandera à des auditeurs avertis, et la promesse de prestations live probablement toujours plus fiévreuses.
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