Lo-Pan – Get Well Soon


Avec sa vingtaine d’années d’expérience maintenant, Lo-Pan peut être considéré comme un groupe « vétéran » du stoner américain. Né sur les cendres à peine refroidies de cette scène en ébullition sur la fin des années 2000, il ne s’en est toutefois jamais complètement revendiqué, s’inscrivant plutôt dans une veine musicale largement emmenée par le génial label Small Stone records. Constituée de groupes de metal / heavy rock solide et fuzzé, pour la plupart issus de la scène – hérésie – du Nord des U.S.A. (et en particulier Nord-Est), portés par des influences qui couvraient un large éventail : allant du stoner californien jusqu’au grunge en passant par toutes les nuances charpentées du gros rock US, cette vague aura laissé pas mal de cadavres sur le bord de la route sur les deux dernières décennies. S’il est l’un de ses survivants, Lo-Pan n’est pas pour autant un hyper-actif musical, avec une discographie famélique, et des tournées rares. La sortie d’un nouvel opus de leur part est donc en soi un événement.

La recette Lo-Pan est inchangée, et c’est tant mieux : pour simplifier à outrance, ce mélange d’un socle musical puissant avec la voix de Jeff Martin apporte une identité si marquante qu’il est absolument inutile de développer un registre différent. Dans ce cadre Get Well Soon, comme on pouvait s’y attendre, s’inscrit dans une sorte d’amélioration continue de leur style, une maîtrise encore une fois réaffirmée sur ce sixième opus. Pour rentrer un peu plus dans les détails, en particulier pour celles et ceux qui ne connaissent pas le quatuor de Columbus, Ohio, attendez-vous à un ensemble de compos soignées mais costaudes, reposant sur une solide alchimie entre riffs massifs, breaks ambitieux et sens mélodique prépondérant. Mais le facteur X du groupe, l’élément qui émerge inéluctablement dès les premières secondes d’écoute, c’est le chant de Martin : l’imposant vocaliste développe littéralement une voix d’ange dans un environnement (musical) de brute. Son chant, clair, aérien, subtil et puissant à la fois, surnage non seulement dans le spectre musical du disque, mais emmène surtout les compos déjà excellentes du groupe dans des sphères musicales que les autres formations ne peuvent pas atteindre (parce qu’il n’y a qu’un seul Jeff Martin, tout simplement).

La recette Lo-Pan, donc, est inchangée, reste à appréhender cet assemblage de chansons. Les neuf titres proposés ont le bon goût de présenter le quatuor sous toutes ses coutures, avec un échantillon de rythmes et de sons qui, s’ils restent évidemment dans la trame instrumentale du groupe cultivée depuis vingt ans, couvrent l’ensemble de ses « compétences ». On a du refrain mémorable (« The Good Fight » et son petit lick de guitare catchy, « Wormwood » transcendé par Martin), des leads tranchants (impeccable séquence sur « Rogue Wave », « Stay with the Boat »…), des plans accrocheurs (« Ozymandias » et son petit pattern de guitare aux accents sudistes comme les affectionne Clutch)… Quant aux performances de Martin, si l’on devait en rajouter une couche, il suffit de voir ce qu’il apporte à des titres comme « God’s Favorite Victim », « Wormwood » et ses modulations parfaitement efficaces, ou encore « Harpers Ferry », apportant une ligne vocale qui vient se caler tout du long, comme un instrument en tant que tel, développant parfois son propre apport mélodique en complément de celui de la chanson. Et côté riffs, on est (bien) servis aussi (on vous orientera sur un petit échantillon pas piqué des vers avec par exemple “The Good Fight”, “Wormwood”, “Harpers Ferry”, “Stay with the Boat”…). Pièce maîtresse du disque, « Six Bells » vient le clôturer sur huit minutes de séquences aussi intéressantes les unes que les autres, passant de plans sombres et doom lents, à des passages plus rapides et plus dynamiques ; le titre nous prend par la main et nous emmène où il veut sans jamais nous brusquer, ni non plus en faire des tonnes.

Attention toutefois, par sa densité musicale et instrumentale, par ses choix d’écriture atypiques (en termes de structure notamment) ainsi que par son positionnement musical jamais franc (Lo-Pan finalement évolue dans un style qui lui est propre), l’absence de repère rend la digestion du disque plutôt lente : si le style musical séduit assez vite, il faut un bon nombre d’écoutes pour intégrer les compos, les mélodies et cerner les touches de grâce qui émaillent finalement ce disque. Mais l’effort est largement récompensé par la profondeur de ce Get Well Soon qui, sans jamais être prétentieux ni exigeant, vient faire honneur à la discographie du groupe, et au genre musical au sens large.

 


 

Note de Desert-Rock
   (8/10)

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