Elle est là la force du live. J’avais déjà eu l’occasion d’écouter Dot Legacy et, une fois n’est pas coutume, de passer distraitement l’oreille par-dessus, en me disant que, oui, c’était mignon, sympa, sans plus. Que ça manquait de corps et de couilles quand même. Et puis, vlà qu’la horde de bougres débarque en mon fief Rhône-alpin, administrant au passage un set incendiaire, brûlant la scène d’une performance haute en trouvailles, me beuglant ses riches compos à la face. Mea Culpa donc. Merci pour la rouste. Veuillez agréer mes plus plates excuses, blablabla,…
« Dot Legacy » par Dot Legacy, combo parisien, paru en juin 2014 est un album surprenant à plus d’un titre. Premièrement parce que sa production résolument dans l’air du temps, ne lui procure pas un attrait immédiat, pas assez typé peut-être. Pas lisse non plus mais sans imprimer une identité de fait. Un mal pour un bien puisque quand on s’y penche, elle permet de mettre en exergue la qualité d’écriture des compos, la multiplicité et la finesse des influences. « Kennedy » est le premier morceau, le single, la compo clippé sur les internets et disons-le, la belle vitrine du savoir-faire de Dot Legacy. Parce qu’ils n’ont pas peur de faire sonner le son clair des amplis super-Green, de lui administrer de la réverbération grande comme une supernova sans oublier les plans stoner vieux comme l’immonde. Mais réside dans cette bestiole une qualité surprenante qui la dissocie des autres groupes, sa culture musicale. Les jeunes loups ont bouffé de la noise, du post-rock, du math-rock et ça se sent. Les grands espaces, les respirations imprimées comme dans « The Passage » sont infantes du post-rock à la Russian Circle ; les chants scandés hors-micro de « Think of a name » ou « Pyramid » renvoient au ludique maths-rock de la Colonie de Vacances (Marvin, Pneu, Papier Tigre, Electric Electric, feu d’artifice déstructurant en quadriphonie). Mais n’ayez crainte, ça envoie le steak dans les riffs, les parisiens nous gratifiant de missiles-burger au groove suintant. Ecoutez « Rumbera » et sentez vos poings se tendre rageusement en avant pendant que votre fion imprime une danse nuptial à rendre fou/folle n’importe quel(le) prétendant(e).
Un clavier vient régulièrement enrichir le spectre sonore du groupe, rajoutant quelques vertèbres à la colonne déjà bien fournie des parisiens. Il s’inscrit comme une composante à part entière et non comme un instrument additionnel et mériterait peut-être encore plus d’espace quand le Dot fait décoller son stoner de la terre. L’autre bon point de l’album est la place laissée au chant et à la mélodie, ces derniers étant trop souvent délaissés au profit de beuglantes, certes salvatrices, mais Ô combien faciles. Non, pas ici. On prend le temps de composer et de vouloir marquer les esprits par de la ritournelle réfléchie. Et je dis oui.
Quel paradoxe que cet album ! Car passée la première impression de grand tout unique on se retrouve avec une fourmilière d’idées, de breaks bien sentis, de chants inspirés, de mélodies accrocheuses, d’influences à la pelle. Pourtant, Dot Legacy ne s’y noie pas et fait montre d’une identité déjà marquée et unique. Reste pour la suite à épurer l’ensemble et affiner cette personnalité afin qu’elle explose en un monstre album, ce premier essai étant déjà bien structuré. J’ajouterai qu’il ne faut pas manquer les parisiens en live, leurs prestations étant hautement énergiques et communicatives. Pouce en l’air, sourire aux lèvres et fion qui groove pour Dot Legacy !
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