Legions of Doom – The Skull 3


Est-ce qu’on aurait misé 10 euros sur la pérennité de Legions of Doom quand on a commencé à entendre parler du projet, il y a environ deux ans ? Probablement pas. Legions of Doom, pour rappel, c’est une émanation partielle de The Skull… un groupe qui était lui-même une émanation partielle de Trouble ! Le titre du disque, The Skull 3, affiche d’ailleurs autant de clarté sur son intention qu’il ne sème de trouble (jeu de mot involontaire)… Chelou. Sans parler de cet artwork avec un crâne (“skull”) sur lequel poussent de nouvelles fleurs, message peu subtil là aussi…

Résumons : Legions of Doom, donc, est un projet lancé il y a quelques mois sur les cendres de The Skull, le groupe créé en 2012 par Eric Wagner, tandis que le charismatique vocaliste s’était retrouvé vilainement exproprié de son propre groupe, Trouble, quelques années plus tôt. De manière assez logique finalement, la notoriété de Trouble (qui continue sa petite carrière derrière la paire Franklin / Wartell) s’est mécaniquement divisée par deux, apportant finalement assez peu de visibilité à The Skull (par ailleurs le titre du second album de Trouble… vous suivez ?). Même si The Skull a sorti deux disques intéressants, ils restèrent néanmoins un peu sous les radars. Le groupe s’est définitivement éteint avec le décès de son leader Eric Wagner en 2021 (il est mort de complications liées au COVID… tandis qu’il était anti-vaccins…), et l’on pensait l’affaire entendue. Sauf que le duo de l’ombre derrière la formation (le guitariste Lothar Keller et le bassiste Ron Holzner) ne l’ont pas entendu ainsi : ils ont récupéré des paroles qu’avait rédigées Wagner pour un supputatif nouvel album de The Skull, et en ont composé la musique (pour rappel Keller était le principal compositeur de The Skull). Quel vocaliste choisir pour donner une véritable ampleur doom au projet ? Scott Reagers, évidemment, le légendaire chanteur de Saint Vitus. De manière saugrenue, le duo va aussi chercher un second chanteur, Karl Agell, dont le principal fait d’arme est d’avoir chanté sur le Blind de Corrosion of Conformity (un bon album, certes, mais dont la seule chanson culte qui en est ressortie, “Vote with a Bullet”, est aussi ironiquement la seule qui n’est pas chantée par lui…).

Dans les faits, à l’image de leur mode de fonctionnement en live, les chansons du disque sont affectées à l’un ou l’autre des vocalistes : sur huit chansons, quatre sont chantées par Agell, trois par Reagers… et une par Eric Wagner ! « Heaven » est effectivement issue d’une bande enregistrée par le chanteur avant son décès. Évidemment, la personnalité de Reagers, son timbre et sa capacité à retranscrire cette ambiance doom « creepy » font une vraie différence pour les titres sur lesquels il intervient (voir en particulier les rampants « Lost Soul » et « Hallow By All Means », glauques et doomy à souhait). Pour autant, soyons objectifs, Agell, probablement poussé dans ses retranchements, s’en sort assez bien en servant honnêtement les autres compos.

Globalement, le disque fonctionne très bien, les compos sont solides et efficaces. On ne s’attendait pas à moins pour un projet reposant sur des musiciens si expérimentés, et en particulier un duo ayant fait ses preuves en termes de composition. Les riffs sont massifs et bien ciselés et les arrangements pertinents (la production, sobre et sans chichi, est de très bon niveau). Côté inspiration, on peut sans problème tracer la lignée de la plupart des compos qui peuvent être rattachées à Trouble (milieu / fin de carrière), en particulier sur des titres comme « All Good Things » ou « Between Darkness and Dawn » dans des styles différents. Toutefois, le spectre musical couvert, s’il reste bien ancré dans le doom metal classique, est assez large, en proposant des titres assez rapides et nerveux (« Insectiside » par exemple), autant que des titres plus lents et malsains (« Between Darkness and Dawn », le pachydermique « Hallow By All means », etc…), avec en plus cette « parenthèse » que représente le « Heaven » susmentionné, un mid-tempo légèrement électrisé emmené par le chant de Wagner.

Au final, The Skull 3 est constitué d’un ensemble de compos de très bon niveau : riffs accrocheurs, rythmiques variées, interprétation sans faille, intégrité stylistique… Tout fan de doom metal classique y retrouvera largement son compte. En tant qu’album (et que groupe), on pourra néanmoins déplorer cette impression de « discontinuité » au fil de l’écoute, liée au changement perpétuel de chanteur : trois vocalistes sur ce disque, et vraiment trois tonalités radicalement différentes apportées aux compos. On peut avoir ses préférences pour l’un ou pour l’autre – tel n’est pas le propos – on ressort invariablement de ce disque avec ce sentiment un peu confus de ne pas trop savoir ce qu’est ce projet, et surtout… pourquoi diable ne peuvent-ils pas se fixer sur un seul chanteur ?! C’est rationnellement incompréhensible. Mais cela n’obère rien à la qualité de ce disque, qui est excellent (sans transcender le genre non plus).

Note de Desert-Rock
   (8/10)

Note des visiteurs
   (9/10 - 1 vote)

(Pour donner votre note,
cliquez sur le nombre de cactus voulus)

Laisser un commentaire

You can use these HTML tags

<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

  

  

  

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.


Se connecter