Avec le sentiment d’avoir mal entamé ma relation avec Lonely Kamel (jamais eu l’occasion de les écouter ces dernières années, et un concert vu dans des conditions moyennes au Desertfest Berlin), j’étais résolu à me faire une opinion plus factuelle en faisant l’acquisition de leur dernier album en date, le pourtant “vieux” Dust Devil (2011). Bien m’en prit ! Ce constat positif, c’est rare, était évident dès la première écoute de l’album : compos chiadées, rythmiques variées, son impeccable… On sait qu’on est entre de bonnes mains et que l’on peut se plonger dans cette galette corps et âme pour quelques heures en bonne compagnie…
Musicalement, Lonely Kamel fait du bon stoner, dans le sens le plus pur du terme, c’est-à-dire du gros hard rock sous influences 60s-70s, tendance psyché/blues, doté d’un son massif que l’on dirait propre aux meilleurs groupes scandinaves. Ce postulat ne suffit pas à caractériser un bon disque, et c’est là que le talent du quatuor suédois intervient : après plusieurs écoutes à essayer d’identifier le “petit truc en plus”, la touche qui rend ce disque si attachant, on finit bredouille. Pas de secret, si ce n’est un talent de composition manifestement rôdé par des musiciens qui ont fait de la scène leur terrain de prédilection (rarement un combo aura traîné une réputation scénique aussi flatteuse) : on peut sans peine imaginer que cette compétence confirmée sur le terrain du live enrichit leurs compositions dans une sorte de cercle vertueux. Efficacité, concision, plaisir de jeu… On trouve de tout dans cet album : des riffs acérés, des plages propices à de potentiels jams en live, des soli, etc… On est rassasié. Et cette accumulation de bons moments ne suffit toujours pas à expliquer la qualité de la chose. Il y a une sorte d’alchimie inexplicable qui détache ce disque de la plus grosse part de la production contemporaine. En gros, ce n’est pas le meilleur album de tous les temps, mais on y sent de la passion, de la sueur, de l’envie, de la fougue… De la vie quoi !
Parlons des compos quand même, qui méritent leur pesant de cacahouètes. On est d’abord cueilli par la superbe intro toute en bottleneck bien grassouillet de “Grim Reefer”, qui s’emballe à mi-morceau dans une petite tornade groovy. Le point d’orgue de ce disque est enquillé juste après, avec un “Evil Man” qui porte à lui seul toute la grace furieuse de ce disque : un riff taillé dans le marbre de Carrare, une structure simplissime (2 couplets-refrains, 1 pont, 1 couplet-refrain), un son monolithique impeccable (les deux guitares dans un même mouvement), un solo complètement jouissif (tout en simplicité), un gimmick vocal impeccable (“wouhou”)… Tout est là, sur trois minutes. Le titre suivant est un subtil mélange entre doom et blues, typique musicalement des premiers Sabbath. Plus loin, “Rotten Seed” nous déduit avec ses grattes fuzzées au délicieux son presque croustillant… Plus loin encore, “The prophet” nous cueille avec son riff enjoué en début de morceau, pou nous amener sur une fin de morceau lourde, lente, portées par des lamentations de Thomas Brenna, qui n’en est pas à sa première prouesse vocale sur ce disque, tant sa tessiture vocale chaude et rocailleuse à souhait sied parfaitement à la musique du combo. Bref, la suite est à l’avenant : déluges de grattes, rythmiques de charpentier, groove…
Même si ce disque ne changera pas la face du monde, il est là pour (dé)montrer si besoin était qu’il est possible aujourd’hui de produire une musique sacrément excitante dans un cadre musical “balisé”, dans un spectre d’influences vaste mais déjà pratiqué par d’autres. Mérite grandement d’être découvert, si ce n’est déjà fait.
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