Aujourd’hui leçon d’archéologie avec le professeur Heavy Psych Sounds. Le label a exhumé pour vous des fragments de la civilisation Sonic Flower. Les fouilles ont permis d’en dater l’origine à 2001, HPS a ressorti cette année leur premier opus et nos lecteurs les plus assidus n’auront pas manqué de lire ce qu’en pense le Professeur Laurent. Par effet d’aubaine sans doute, sortent à quelques jours d’intervalle des enregistrements inédits de 2005 que des soucis des membres de la formation avaient obligé à reléguer aux oubliettes malgré un titre revanchard, Rides Again.
Jouissif sera le terme conducteur de la seconde production des japonais. Rides Again était resté dans les placards, oublié après une séparation du groupe et ces morceaux fonctionnaient comme une machine à remonter dans le temps. Aborder Rides Again c’est comme avoir affaire à un enregistrement qui aurait eu lieu dans un baril d’huile, produisant un son aussi crasseux que saturé sur lequel on n’aurait pas pris la peine de passer un coup de dégraissant. Pas net donc, mais jouissif tout de même.
A embrasser l’intégralité de l’album, j’en viens à me demander si le projet n’aurait pas été de s’appuyer sur “Moby Dick” de Led Zep (en atteste le joyeux bordel de “Captain Frost”) et d’en tirer la quintessence pour réaliser sept titres donnant dans la même inspiration. Comme toute œuvre archéologique, il faut souffler sur la poussière des ans pour dénicher le travail de l’orfèvre qui œuvra jadis. Les parties de gratte s’en donnent à cœur joie sur des boucles rythmiques bondissantes et la jam qui en résulte semble ne jamais vouloir s’arrêter d’exposer sa virtuosité.
Sous des dehors d’antiquité Sonic Flower avait créé une musique organique, un son vivant, une ivresse totale. Une musique qui n’oublie pas de s’appuyer sur les fondamentaux d’où elle est sortie avec deux covers, “Stay Away” de The Meters (Le titre est d’ailleurs sublimé, il faut bien l’avouer) et “Earthquake” de Graham Central Station qui permet de comprendre d’où vient toute l’énergie de l’album, il y a du funk dans tout ça et du bon!
Oui mais… car il y a un mais. Malgré toute la joie dont l’album dégouline, malgré le professionnalisme du quartet à délivrer un disque pur jam de 28 mn sans un bout de Church of Misery dedans, Sonic Flower tourne en rond. L’album certes nous entraîne dans sa sarabande antédiluvienne, il fascine par son cachet désuet dès la première écoute. A tel point que lorsque j’ai voulu rebooter mon lecteur MP3, rien à faire, j’ai perdu tout contrôle sur la liste de lecture et l’intensité du son, le système a continué de jouer Rides Again. L’album est possédé, détenteur d’une secrète magie du fond des âges. Mais y revenir de soi n’est pas si évident. L’album est bon oui, il est entraînant certes, mais voilà il ne marque pas l’esprit par sa superbe, il n’imprime pas sa signature de façon durable. Une belle pièce, finement ouvragée mais à laquelle il manque un souffle de génie.
Rides Again est un de ces albums assez surnaturels, il provoque une intense satisfaction très immédiate mais ne tient pas vraiment dans le temps sans qu’on arrive à lui en vouloir. On se laissera tenter par l’acquisition de l’objet et sans doute y reviendra-t-on à l’occasion comme une pièce de collection chaleureuse. Fait notable, il semblerait que l’expédition HPS n’ait pas fait qu’exhumer deux anciens temples stoner en exposant deux galettes de Sonic Flower en ce début d’année dans vos collections, elle a réveillé quelque chose qui avait été oublié. Préparez-vous donc à entendre résonner encore les notes de Sonic Flower avec un album de plus prévu sous peu.
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