Il ne se passe jamais longtemps avant que la scène polonaise ne vienne nous gratifier d’une belle galette. Spaceslug fait partie de ces petites douceurs très attendues avec son troisième LP en moins de trois ans et une notoriété montante qui ne semble pas vouloir s’arrêter là. Les trois albums de Spaceslug représentent leur parcours au travers de l’espace et ce voyage cosmique n’est pas linéaire, chaque album est une pièce à part, un monde différent, “Eye The Tide” n’y fait pas exception, on s’aperçoit vite que les pistes ont une structure très hétérogène et qu’il faudra plusieurs écoutes pour appréhender totalement leur musique. Fait curieux,cet album, arrive à distordre le temps et l’espace et m’a donné l’impression de ne jamais écouter le même opus d’une fois sur l’autre.
Le trio de chant omniprésent sur la première partie de l’album m’a offert une belle profondeur de spectre,”Obsolith” et “Spaced by One” ouvrent l’opus sur des sons psychés proches parfois d’un Elder avec ce mélange tout à la fois planant et massif, j’y ai trouvé sans surprise des accents Doom et quoi de plus normal pour ce trio qui s’affirme comme un groupe de “Doom Cosmique”. Cette idée est particulièrement valable sur “Eternal Monuments” avec sa basse poussée à fond et son mid-tempo lancinant. Si j’ai navigué en terrain connu avec ces morceaux dans la veine des précédents albums, cette dernière piste se déstructure petit à petit et emmène l’auditeur vers “Words Like Stone”
Césure dans la conception de l’objet avec une composition psych partiellement électro-acoustique qui glisse doucement sur un versant entre Sludge et Post Metal. Il m’apparait évident que ‘Word Like Stone” est la perle de l’album La puissance du trio m’est arrivée en pleine face lorsque le chant devient corrosif (A la limite du Screamo) et que les nappes de sons s’alourdissent. Cet esprit continue de vivre sur “Vialys part I & II”. assemblage de deux morceaux où j’ai trouvé des atmosphères presque contradictoires, j’ai été plongé dans une écoute planante et lumineuse pour qu’au bout de quatre minutes je sois secoué par un esprit bien plus lourd et introspectif à grand renfort de basse et de Wawa. C’est une profonde sensation de déséquilibre qui après plusieurs écoutes renforce un sentiment de délicieuse dichotomie. La jonction est parfaitement assurée pour cette pièce de près de neuf minutes et demies, le cap est affirmé et Spaceslug ne s’échoue jamais avec son vaisseau intersidéral qu’il pilote d’une main de maître.
L’album se clôture sur un “I, The Tide” tout aussi proche du Post Metal que le titre précédent, la basse y sonne lourdement en accompagnement d’une guitare caverneuse au milieu des écho du chant pour un univers déstructuré et plaintif. Les 11 minutes ne sont pas constantes, une fois de plus le morceau peut-être divisé en plusieurs parties avec une conclusion des plus Doom grâce des riffs puissants, basiques et répétés à l’envie.
“Eye The Tide” est un album d’une grande maturité, il est pensé de façon globale sans proposer à chaque titre les mêmes schémas. Il a cette force de pouvoir être écouté d’un tenant comme de permettre une écoute des pistes à la volée. Au final cet album vient confirmer le potentiel de Spaceslug tout en proposant un réel casse-tête aux amateurs de cases. “Eye The Tide” propulse le groupe avec brio au sein de galaxies lointaines dont ils restent les seuls découvreurs.
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