Il y a quelques mois à la sortie de LifeMetal, Greg Anderson nous avait prévenu de la sortie de ce Pyroclasts (cf interview). Pour rappel donc, Pyroclasts n’est pas un véritable album de Sunn O))), il n’était pas prévu, et n’a pas été composé, non plus… En fait, lors de l’enregistrement de LifeMetal, les musiciens “du moment” (les albums du groupe rassemblent souvent plusieurs musiciens invités, qui se croisent en studio tout au long de l’enregistrement) lançaient chaque journée par une séquences musicale expérimentale improvisée, une séance de pur drone où chacun s’exprimait sur l’instrument de son choix, selon l’atmosphère et l’inspiration du moment, et même de l’instant. Chaque jour un enregistrement était donc effectué, avec comme seule contrainte la gamme musicale donnée pour lancer les hostilités. Pyroclasts, donc, le nom donné aux fragments de roches solides éjectés par les volcans en éruption… Sunn 0))) serait donc un magma de créativité, dont ils ont recueilli quatre extraits, les seuls fragments solides qu’ils ont gravé sur disque…
Les quatre plages composant ce disque correspondent donc à quatre sessions respectivement lancées sur les gammes de DO, SOL, MI et LA. Chacune porte un nom, clair mais énigmatique (“Frost”, “Kingdoms”, “Ampliphædies” et “Ascension”…). Énigmatique, la musique l’est aussi. Ne nous voilons pas la face : après des dizaines d’écoutes, même en étant fan du groupe, je cherche encore le sens de l’histoire… concernant Sunn O))), ça en dit long ! Pas de structure ici, pas de parcours, pas d’histoire, pas de travail sur la sensation voire l’émotion… On est sur du drone pur, de la mise en son en directe communion avec les artistes, sans concertation et, donc, sans construction.
Attention, on n’est pas néanmoins sur les délires bruitistes d’un nerd lambda qui lance 3 boucles sur son sampler et fais mumuse avec son synthé et son ordi. On est sur un groupe de musiciens qui interprètent ensemble un ensemble sonore, ce qui apporte une grille de lecture pas inintéressante en soi. Les couches instrumentales se cumulent donc, et chacun trouve sa place dans un tranquille maelstrom qui… ne va nulle part. Car encore une fois, il nous manque le chemin : une intro, une montée, une descente, un pic, un plateau, un virage… Ici tout intervient ensemble ou d’affilée, et, littéralement, les objets n’ont ni queue ni tête. C’est d’ailleurs illustré par ces conclusions calamiteuses et abruptes (le pompon à “Ascension”) qui montrent bien que les extraits ont été “ponctionnés” sans y chercher une quelconque structure plus ou moins “traditionnelle”. Alors “Ampliphædies”, le titre qui propose peut-être le plus de subtilités et d’aspérités, correspond peut-être à ce que l’on assimile plus habituellement à du Sunn O))) “classique” (!) mais on est quand même loin de nos repères…
Au final, donner une note à ce disque serait incongru : le positionner au regard d’une production musicale traditionnelle (même pour Sunn O)))…) serait aussi vain que stérile. Pyroclasts est un disque de Sunn 0))) (plusieurs centaines de personnes ont déjà commandé les multiples éditions vinyliques à la simple lecture de ce début de phrase…) mais peut-être pas réellement un véritable “album” dans leur carrière. Plutôt une parenthèse expérimentale. En tant qu’objet musical, il s’agit d’un ensemble instrumental dense, copieux et déstructuré, qui ne fera ni le job de musique d’ascenseur, ni celui de musique d’ambiance pour le prochain repas dominical en famille. Il s’écoute mais se prête peu à l’étude minutieuse, proposant trop peu d’aspérités ou de repères. Très peu probable dans quelques années de le retrouver dans le top des albums préférés des fans du groupe. Si les disques de Sunn O))) sont déjà des OVNIs pour vous, inutile de vous procurer celui-ci. Si vous aimez Sunn O))) en revanche, vous pourrez apprécier cette production.
(Pour donner votre note,
cliquez sur le nombre de cactus voulus)