En ce week-end de Roadburn le doom ne se pratiquait pas qu’à Tilburg (où il se pratique de moins en moins d’ailleurs ou sous des formes mutantes) mais aussi en Belgique, à Bomal (et pas Durbuy, mais bon c’est à côté on va pas chipoter), où un petit festival s’accroche à flan de roche et de rivière depuis désormais 23 éditions. Un festival doté d’un esprit d’Astérix (franco-belge quoi), coincé à quelques semaines et quelques encablures de gros festivals estivaux. Un festival qui se tient pour moitié dans un gymnase (incroyablement rétro) et sur la pelouse attenante en faisant une sorte de semi plein air. Le Durbuy est l’incarnation du festival familial par excellence. Dans ses bons (enfants friendly, taille humaine, jovialité certaine, proximité des artistes) et mauvais côtés (minimum au niveau des stands, organisation à géométrie variable, speaker qui annonce les groupes avec la verve d’un GO du Club Med). Mais surtout le Durbuy festival a une grande spécificité, qui n’appartient qu’à lui : son livret. Ce petit bijou, entre des dizaines de publicités, est une anthologie de tout ce qu’il ne faut pas faire, se plaignant ouvertement de la concurrence déloyale des grands festivals, justifiant la présence pour la seconde fois d’affilée d’Ultra Vomit en tête d’affiche par un « on s’en fout on fait ce qu’on veut », décrivant les groupes qui passent au festival par des « pas sa meilleure période » ou « en perte de vitesse », bref un bijou d’absence de réalités promotionnelles. Là où le bât blesse dans cette bible noire c’est en matière d’approximation. Mais nous y reviendrons.
Venu principalement pour la triplette Doom Saint Vitus/Paradise Lost/Candlemass, votre serviteur aurait pourquoi pas profité de Vintage Caravan un peu plus tôt dans la journée si la neige (!!!!!!) tombant abondamment dans les Ardennes Belges, à 20 minutes du festival, ne l’avait pas obligé à acheter en urgence de quoi survivre aux températures. Qu’à cela ne tienne je serai à l’heure pour Saint Vitus qui, à 17h15, prendra place sur la scène du gymnase (le… Hall Le Sassin). Si le livret du festival annonce sans complexe la venue de le « légende Wino », c’est bien sûr l’autre Scott, Reagers, qui se présente pour fêter dignement les 40 ans de carrière du groupe (enfin parce que Wino s’est fait lourder pour une sombre histoire de drogue surtout). L’occasion de voir le set s’axer sur les premiers albums de la formation, Vitus ouvrant par « Dark World » puis « White Magic/Black Magic » pour le plus grand bonheur de la petite dizaine de connaisseurs et les grosses centaines de curieux devant la scène. Dave Chandler est en forme, quoi que flinguant pas mal l’équilibre sonore du début de set avec sa guitare bien trop forte (sur scène et dans le mix). Un souci qui se réglera avant que le groupe balance « War Is Your Destiny ». Les membres du groupe se font vieux, et leurs 40 ans de carrière sont des plus chaotiques, mais ils compensent la lose qui leur a toujours collé à la peau par une bonne humeur communicative, comme lorsque Reagers et Chandler s’éclatent à voir voler des préservatifs gonflés dans le public. « Thanks For Remembering Us » lancera Reagers avant que Vitus n’envoie deux nouveaux titres, le classic doom (et néanmoins excellent) « Bloodshed » puis « 12 years in The Tomb » avant de dérouler les hits, dont « Born Too Late », évidemment. Fait notable, c’est Patrick Bruders, bassiste de Down, ex Crowbar et Goatwhore, qui tient la quatre cordes dans Vitus désormais, comme quoi il y en avait des légendes à présenter dans le livret…
Ne nous attardons pas sur les groupes non doom, même s’il est agréable de voir Tyr se produire devant le stand Sea Sheppard sans aucun heurts (je vous renvoie à la grosse polémique autour de la tournée française du groupe), pour se réjouir du set de Paradise Lost, toujours dans le Hall Le Sassin, plus tard dans la soirée. Passons sur le point livret (qui se contente de citer ouvertement un article trouvé sur Radio Metal) pour se concentrer sur l’énorme set best of proposé par les anglais, dans un gymnase plein à craquer. Le moins que l’on puisse dire c’est que le groupe est la vraie tête d’affiche du festival. Tout ce que le coin compte de metalleux est devant la scène, reprenant à gorge déployée les hits « One Second » ou « As I Die ». Sans temps morts (mais un peu en pilote automatique), les anglais déroulent et piochent bien sûr (et heureusement) dans le meilleur de « Medusa ». Nick Holmes, toujours facétieux, présente « Faith Divides Us, Death Unites Us » comme un morceau de death metal old school et use de son flegme pour maintenir la chaleur tout du long du set. Le groupe laissera finalement le public en transe après une grosse heure de show.
Les plus courageux (une petite centaine ?) se retrouvent dehors, sous moins trois degrés (oui moins trois putain de degrés) pour la première sortie de Candlemass en festival avec Johan Längquist, son… premier et dernier chanteur en date. Un évènement donc, d’autant plus que le livret du festival annonce que le groupe va jouer Doomicus Epicus Metallicus en intégralité. Il n’en sera bien évidemment rien et les puristes le savent dès que résonne l’introduction « Marche Funèbre » de Chopin, qui ouvre le disque Nightfall. Les suédois montent sur scène frigorifiés et balancent « The Well Of Souls » (extrait de pas-du-tout Epicus Doomicus Metallicus) en soufflant du givre. La basse de Leif Edling s’enrhume et ne semble pas vouloir marcher, ce qui rend fou cette figure historique du doom que de récurrents problèmes de santé éloignent trop souvent de la scène. Heureusement tout rentre dans l’ordre et le groupe délivre l’un des shows les plus magistraux qu’il m’ait été donné de voir de la part de la formation de Stockholm (et oui j’étais de l’incroyable concert anniversaire au Roadburn 2011 où Epicus a été joué en intégralité pour de vrai). « Mirror Mirror » (extrait lui aussi de pas-du-tout Epicus Doomicus Metallicus) est un moment énorme, et après quelques traits d’esprit (« j’aime la Belgique vous avez même une bière à mon nom » dira par exemple « Leffe » Edling) et leur single Iommiesque du dernier album (qui ne s’appelle pas Epicus… bref vous avez compris), le groupe balance un « Bewitched » ensorcelant puis enfin livre quelques extraits d’Epicus Doomicus Metallicus (« A Sorcerer’s Pledge », « Demon’s Gate », « Solitude »), pour le plus grand bonheur de tous. Une heure quinze de show malgré les éléments et un souvenir impérissable pour ceux qui ont mis le nez dehors. Pas la force de rester voir Ultra Vomit qui pourtant, soyons honnête, déchaine les passions sur la scène du (Hall Le) Sassin ; nous préférons partir sur ce souvenir formidable d’un Candlemass généreux comme jamais.
Merci quand même Durbuy et l’année prochaine ; si tu veux, je veux bien l’écrire moi, ton livret. Ça sera moins drôle mais au moins y aura plus de pubs que d’approximations.
PS : Ne cherchez pas le parking VIP, il n’existe pas. Pas que ce soit grave, mais j’avais quand même payé 30 euros de plus pour ça…
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