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HELLFEST part II – Jour 3 (Kadavar, Monkey3, Converge…) – 25/06/2022 – Clisson

Voilà, la seconde partie du Hellfest 2022 va commencer pour nous. On ne va pas se plaindre, tout étant toujours plutôt bien fait et très bien présenté sur ce festival, on aurait pu se contenter des jours précédents, pour autant cela manquait de consistance, que voulez vous, on nous a toujours habitué à des plateaux du feu de dieu ! Ce jour exaucera nos vœux avec un solide après-midi riche en trips aériens et riffs ravageurs, et même les pieds dans la boue, rien ne nous arrêtera !

Enfin, “rien”… sauf le combo réveil à l’arrache / indications routières contradictoires / parking et navettes aléatoires, qui nous fera manquer Untitled with Drums, qui jouait aux aurores… Tant pis, ce sera le seul groupe de la Valley que nous manquerons de tout le festival.

 


DÄTCHA MANDALA

La journée commence donc pour nous par le set du trio rock français Dätcha Mandala. Les bordelais, connus du “grand public” pour avoir assuré la première partie des Insus (ex-Téléphone) au Stade de France en 2017, traîne aussi une réputation de jolie machine scénique. Ils montent sur scène remontés comme des jouets à ressorts, bien décidés à démontrer leur valeur… et leur légitimité sur cette affiche ! Car la question est largement soulevée, le trio étant connu pour produire un heavy rock bluesy “vintage” nerveux, occasionnellement psych, un peu loin du propos plus incisif pratiqué au Hellfest. Intelligemment, le groupe propose une set list high energy qui, emmenée par un binôme survolté, emporte en un tour de main l’adhésion du public. Celui-ci, même s’il se retrouve assez clairsemé sous la tente, repart avec le sourire et la satisfaction d’avoir assisté à une prestation qui, si elle est assez loin du metal quintessentiel pratiqué sur l’ensemble du festival, se sera avérée enthousiasmante.


MY OWN PRIVATE ALASKA

L’heure du déjeuner (oui, le biorythme est un peu bousculé au Hellfest) nous amène une nouvelle “parenthèse musicale”. Jusqu’ici, à chaque groupe sortant des terres musicales confortables que l’on connaît, nous étions pris soit de surprise, soit d’ennui. C’est plutôt la première option qui s’applique ici, et il avait suffi de lire l’étiquette musicale proposée par le combo français pour nous en donner l’intuition : le groupe qualifie sa musique de “pianocore”… ce qui s’avère assez juste ! On retrouve les musiciens tous assis sur la scène, deux derrière leur clavier, l’un derrière son kit de batterie, et le dernier derrière… son micro. Drôle de dynamique de voir Matthieu Miegeville (déjà vu derrière le micro de Psykup) chanter (crier plutôt) en se contorsionnant sur son petit tabouret (qu’il quitte parfois néanmoins) ! Musicalement, le contrat est rempli : on a bien des claviers et un assortiment de dynamique et de chant qui font pencher l’ensemble en territoire post-core. Loin de notre zone de confort, mais intéressant.


HÄLLAS

Le début d’après-midi sous la Valley offre l’opportunité d’un voyage : celui qui mène à la cité en or de Semyra. En effet durant 45 minutes, les chevaliers d’Hällas (pronounced Hélas) nous font vivre de belles aventures. Toujours un peu coincé sur scène (il en faudra du temps pour que Tommy Alexandersson, bassiste/chanteur, s’adresse à nous), le groupe est par contre toujours aussi réjouissant. Le mix son fait un peu trop la part belle aux basses au début, nuisant à la composante planante de la musique du quartette,  et il est difficile d’entendre la voix ou les parties de grattes. Une prise de recul salvatrice nous emmène sous les trombes d’eau à l’extérieur de la tente et c’est à ce point précis que tout rentre dans l’ordre : les phrases de gratte se libèrent, le public apparaît dans toute sa joie et, avant que le set ne se termine, les cataractes du ciel se referment et enfin le soleil vient percer le fond de la tente. C’est le point culminant du set, avec l’enchaînement de l’attendu “The Astral Seer” et de “Star Rider”, leur tube absolu. Avec une Valley en symbiose, le reste du set n’en fut pas moins un moment délicieux.


SLIFT

Venu au Hellfest pour démontrer que sa croissance fulgurante est justifiée, Slift déroule impeccablement ses titres à un tempo fait pour le live. La maîtrise est grande car rien ne bave, de la qualité du son au gesticulations forcenées des trois gonzes. L’atmosphère est pleine de bonnes vibrations et les festivaliers, déjà acquis à la cause d’un des groupes les plus médiatisés de la scène, hurlent leur plaisir d’être à bord de cette fusée pour la lune. La set list, évidemment axée principalement autour des morceaux d’Ummon, ne prend que peu de risques, mais il faudrait être fou de le leur reprocher. La beauté des phrases de basse, le booster de la batterie et en pointe une guitare magistrale accompagnée de boucles électroniques venues d’une autre planète rendent la foule totalement hystérique (il fallait voir le public, une fois le set terminé et les musiciens revenant pour ranger leur matos, crier leur amour comme s’ils étaient encore en plein concert…). Non Slift n’est pas hypé, il mérite sa réputation et son ascension.


VILLAGERS OF IOANNINA CITY

Si une heure d’entracte avait suffit pour remettre les pieds sur terre, Villagers of Ioannina City prend 12 minutes, soit le temps d’un titre, pour nous reconduire en orbite. Batterie excentrée à gauche de la scène près du clavier, cordes en façade et tsambouna (cornemuse grecque) en arrière plan. VIC intègre une fois de plus parfaitement ses particularismes ethniques, insérant les respirations des instruments à vent entre les riffs de basse, et y ajoutant une curieuse densité aérienne. Un régal qui ne fait qu’ajouter à l’extase que le public semble ressentir. Définitivement à chaque set que nous avons vus ce dernier mois les Villagers ont fait mouche, et il est certain qu’à partir de maintenant il faudra les compter parmi les évidences de la scène heavy psychédélique.


MONKEY3

Voir Monkey 3 en live revient à retrouver de vieux amis pour une soirée. Ce n’est pas forcement une chose à laquelle on pense des semaines avant, pour lequel on se fait beau, mais au final on y passe les meilleurs moments. Laissez tomber la drogue et le sexe, Le quartette suisse est la réponse à vos besoins d’endorphine. Avec un nouveau bassiste, quelque peu statique au départ mais très vite à l’aise, le groupe est comme chez lui dans une Valley toute acquise à la cause psychédélique. Les Suisses exhalent la fumée de toute part et enveloppent le public physiquement, le kidnappent pour quelque destination hors de ce monde. À la guitare, Boris continue de convoquer inlassablement David Gilmour, dans les ambiances qu’il tisse et les soli lumineux qu’il propose. La set list a des allures de best of et j’en ressors en me promettant de ne plus jamais oublier à quel point les suisses sont magistraux sur scène.


KADAVAR

Avec “Lord of the sky” en intro avec un final assez déstructuré, Kadavar annonce la couleur du set. Ils mettent directement les pieds dans le plat. Étonnamment, encore bon nombre de gens découvrent le nouveau look de Tiger derrière sa batterie, crane rasé iroquoise naissante à l’arrière du crane et imposants favoris souvenir de sa folle barbe. De fait, lorsque “Last Living Dinosaur” retentit, la crinière de Tiger ne s’envole plus mais le showman, d’un seul regard, assomme la foule autant qu’avec ses blasts de batterie. L’enchaînement des titres a été conçu pour le Hellfest pour viser une efficacité optimale, au détriment peut-être de l’originalité : “Into the Worms Hole”, “Doomsday Machine” ou “The Old Man”, qui déclenche l’hystérie du public dès les premières notes et qui dès lors ne lâchera plus rien, frappant dans les mains pour “Black Sun” ou slammant à l’envie sur “Die Baby Die” et “Pale Blue Eyes”. Kadavar mille fois vu se renforce un peu plus à chaque concert et la version de “Helter Skelter” qui clôt le set comme souvent depuis quelques années, est elle même aussi bagarreuse qu’a l’accoutumé, mais sans  pour autant. Le concert de la journée, indubitablement !


CONVERGE : BLOODMOON

 

Pour clôturer cette journée la formation à sept têtes vient déposer sous la Valley ses riffs en verre pilé accompagnés de ponts aériens qui ne font cependant pas le ravitaillement en public : à cette heure tardive, la voix de Chelsea Wolfe ne suffit pas à faire le plein d’admirateurs, même lorsque elle est contrebalancée de post hardcore parfois doom. En outre, la voix de la prêtresse de nuit ne bénéficie pas du meilleur des mixes, et ses aigus agressent les tympans du fond de la tente. Cette dernière restera donc divisée en deux partie : les fans devant qui auront trouvé là de quoi se faire submerger par l’émotion, et les curieux qui derrière passent sans chercher l’immersion. Pour notre part nous oscillons sans passion entre ces deux populations.


Ce troisième jour a épuisé plus d’un festivalier : la pluie a détrempé le sol, la boue a envahi les passages les plus fréquentés, et les queues interminables aux pissotières toutes neuves créent d’usants bouchons entre les scènes. Nous rentrons les pieds couverts d’une croute de boue à laquelle s’agglomère la sciure censée l’absorber, avec au fond de nous la satisfaction d’avoir vécu quand même quelque chose d’un peu incontrôlé. Encore un dodo et ce sera le dernier jour.

 

[A SUIVRE…]

 

Rédacteurs :  Sidney Résurrection (+ Laurent, Iro22)

(Photos : Laurent, Sidney)