Monkey3, Colour Haze, 9 décembre 2006, Sojo, Leuven, Belgique

C’est un Sojo plein à craquer qui accueille ce soir la fine fleur du stoner européen, deux groupes à l’identité bien marquée dont les dernières livraisons ne cessent de générer des louanges amplement méritées. Monkey3 vient de confirmer tout le bien qu’on pense d’eux avec un « 39 laps » tout chaud qui pourrait bien être un des rares albums récents capable de déloger de ma platine le « Tempel » de Colour Haze. L’affiche est alléchante, les aficionados alléchés et comme d’hab’ en cas de grande affluence, cette petite salle va pour quelques heures se transformer en sauna dans lequel les non-fumeurs vont déguster. 

Lorsque j’arrive dans l’enfer de Louvain, les Suisses ont commencé sans m’attendre. Je les excuse, j’ai quelques problèmes de mobilité en ce moment (j’en profite d’ailleurs pour remercier Waco et François pour leur dévouement). Boris en impose dans son marcel, immobile en bord de scène pendant que derrière lui çà s’agite un peu plus. Les projections sur la grosse caisse sont toujours du meilleur effet, ce qui compense un peu l’absence de light-show qui doit rendre les concerts de Monkey3 encore plus hypnotiques. Ce concert s’axe essentiellement sur les morceaux du nouvel album, incluant l’incontournable « Electric Mistress » de leur premier méfait (il devait y en avoir d’autres, je sais plus, un moment je me suis complètement laissé emporter), un titre très électrique justement, qui tranche avec le côté plus atmosphérique des nouvelles compos. Entendez par-là que la guitare, bien qu’omniprésente, ne monopolise pas tout l’espace sonore et la grosse disto vient vous exploser les tympans avec parcimonie pour conclure les montées en puissance, ce qui lui donne d’autant plus d’impact. La plupart du temps, elle tisse des ambiances éthérées soulignées par des synthés dosés à la perfection et entrecoupées de déflagrations sonores à vous faire tomber de votre chaise, ce qui à d’ailleurs faillit m’arriver plusieurs fois au cours de la soirée. La section basse-batterie fait honneur à la légendaire précision suisse, s’emballant à l’occasion mais souvent plus encline à vous lobotomiser par son aspect répétitif qui vire au tribal sur un titre comme « Last Moulinao ». Le son est dense, compacte, c’est un maelström organisé qui vous arrive en pleine tronche et vous happe pour ne plus vous lâcher. Avant d’arriver, je me demandais ce que c’était le psycostoner. Une fois dans la place, j’ai rapidement pigé. C’est un truc qui s’attaque au cortex plutôt qu’aux tripes (même si elles sont aussi mises à contributions, mais c’est peut-être l’effet des liquides ingurgités la veille), servi par des mecs qui parviennent à rendre la complexité des compos avec aisance et maîtrisent parfaitement leur son, bien qu’ils semblent être les premières victimes de l’effet produit par leur musique. Bien sur, il n’y a pas beaucoup de place pour l’improvisation dans un concert de Monkey3, ils jouent hyper-carré, ne dévient jamais de la partition et restituent fidèlement ce qu’ils ont gravé sur album. Ce qui n’empêche pas leurs concerts d’être une expérience unique et confirme leur statut d’électron libre dans la galaxie stoner. 

Colour Haze n’est plus à présenter. Enfin on l’espère pour vous. Le trio allemand revendique la place de leader de la scène heavy-psyché européenne et bien que ce genre d’auto proclamation puisse paraître prétentieux, on est bien forcé d’admettre que peu de groupes soient en position de revendiquer leur couronne. Ce titre, ils l’ont forgé à coup d’albums irréprochables qui les ont vu se dégager progressivement de leurs influences pour créer leur propre style directement identifiable. Mais ce titre, ils l’ont également gagné en arpentant l’Europe inlassablement depuis des années, délivrant au passage des prestations d’une qualité rarement mise en défaut et ce n’est pas celle de ce soir, avoisinant les 2 heures, qui fera mentir leur réputation. Colour Haze dispose désormais d’une impressionnante série de bons titres pour construire leur set et ils ne se priveront pas de revisiter les trois derniers albums pour ne délivrer au final que peu de titres du dernier chef d’œuvre en date. Colour Haze, c’est le power trio dans toute sa beauté, la complémentarité parfaite entre trois musiciens d’exceptions capables de livrer dans le même morceau des passages aériens, un groove obsessionnel et un mur de fuzz en ne se départissent jamais d’un aspect très mélodique séduisant. Après une courte intro, ils rentrent directement dans le vif du sujet avec « I Won’t Stop », un de leur titre les plus direct qui donnera le ton du concert plus placé sous le signe du heavy que du psyché. Stefan Koglek est très en forme et ses qualités de guitariste ne sont plus à démontrer, l’alternance de longues phrases mélodiques et de gros riffs libérateurs atteignant des sommets d’efficacité sur les nouveaux titres comme « Aquamaria » et « Tempel ». Mais celui qui m’impressionne le plus est Manfred Merwald, le batteur au jeu virevoltant exécuté avec une ahurissante débauche d’énergie, laissant le soin à Philipp Rasthoffer, le bassiste impassible, de cimenter l’ensemble par une rythmique rigoureuse. Pour ce mec, un concert se résume à un long solo dont est proscrit tout plan binaire et son endurance rudement mise à l’épreuve ne faiblit jamais. Pour preuve, cette accélération démentielle à la fin de « Peace, Brothers and Sisters !», morceau-fleuve de plus de 20 minutes comportant un clin d’œil au Beatles en incluant le refrain de « Hey Jude » reprit en cœur par un public chauffé à blanc. En guise de rappel, les Allemands nous offre une jam composée de reprises de « American Woman » de Bachman-Turner Overdrive et « Into the Sun » de Grandfunk Railroad exécutées en roue libre par un groupe qui a rapidement su se lâcher pour livrer une prestation parfaite. « Plazmakeks », exécuté en second rappel viendra clôturer une soirée qui aura rempli toutes ses promesses avant de nous rendre à la nuit froide et humide, des images et des sons pleins la tête. 

Jihem

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