Nell’ Ora Blu (“À l’Heure Bleue”, en français) est la nouvelle production de Uncle Acid and the Deadbeats, le groupe de doom psyché malsain qui tourne principalement autour de son frontman et grand manitou Kevin Starrs. Ce dernier, non content d’être musicien, se voit aussi cinéaste et, à défaut de pouvoir produire un film comme il le regrettait dans l’interview qu’il nous avait donnée en 2018 (Lien vers l’interview), il réalise ici une bande son imaginaire dédiée au cinéma de genre italien des années 60 à 80, le Giallo. Starrs promet avec cette production un album qui soit totalement autre chose que du Uncle Acid… prenons tout de même le risque de nous y plonger.
Nell’ Ora Blu est bel et bien une bande son d’un film de style particulier. On retrouve sur ce disque des traces de Cinecittà, des relents de fiction sociale ou encore d’anxieux passages que l’on aurait pu croiser sur les premières heures de Monsieur Argento. Starrs réussit dans les grandes lignes son pari de bande son, utilisant comme fil conducteur de l’œuvre des sonneries de téléphone ou des samples de réponses angoissées au souffle de l’appelant harceleur. L’utilisation variée de l’orgue offre une palette de visions allant de l’angoissant sur “Il Sole Sorge Sempre” à l’étourdissement d’une course haletante sur “Guidando Veloce Verso La Campagna” en passant par la mélancolie d’un plan séquence sur “Cocktail Party”. Il y a donc bien avec ce Nell’ Ora Blu l’aboutissement d’une promesse, celle de faire quelque chose de totalement différent – notamment car l’album de bout en bout nous fait vivre l’inquiétante intrigue d’un film policier sans image (il se dit que Starrs aurait rédigé le script complet du film, mais ça pourrait être une simple légende urbaine…).
Le pari pourtant n’est qu’à moitié tenu. D’une part à cause du choix d’épouser l’image d’un film imaginaire de giallo, un style généralement angoissant voire horrifique, servant une intrigue policière. Or cet horrifique c’est justement la marque de fabrique du groupe depuis ses débuts. D’autre part, il est impossible de ne pas reconnaître la patte de Mister Acid qui voudrait pourtant avec cet album n’être que Docteur Starrs. Ce Mister Acid dont on détecte la présence dès “Vendetta (Thema)” et qui crève l’écran sur “La Morte Te Ammenata”, refaisant surface sur “Il Gato Morto”. Au final, Kevin Starrs n’arrive pas à se départir de son alter ego Uncle Acid & The Deadbeats… et c’est heureux. Ces quelques moments nous offrent à voir le groupe que l’on aime tant et qu’on aurait pu croire disparaître derrière un projet trop grand pour lui.
Alors quoi dire au fond de cet album : réussite ou raté ? De mon point de vue, c’est une grande réussite, la musique est hautement visuelle de bout en bout, on vit pleinement chaque piste comme une scène filmée. On retrouve également les références à l’identité du groupe ce qui permet à l’auditeur de ne pas être complètement perdu. Il est clair que Nell’ Ora Blu ne pourra pas être réellement qualifié de doom psychédélique et que si ce n’était pas l’oeuvre de Uncle Acid, cet album n’aurait probablement pas figuré parmi nos chroniques. Cependant, l’écoute reste une expérience unique et un travail abouti qu’on ne saurait trop recommander à nos lecteurs les plus ouverts d’esprit.
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Un grand album !! Prod énorme
Merciiiii
Sans doute le disque le plus original et le plus personnel du groupe, un vrai tour de force. Les frissons quand les riffs de guitare débarquent sur “Occhi che osservano” !
Chouette chronique pour un excellent album.
[autre remarque éditée –> Merci Moland d’avoir noté l’étourderie, corrigée :-)]