Aboleth – Benthos


Au vu de l’émulation permanente que l’on y constate et du nombre de musiciens qui y résident / jouent / jamment, il y a proportionnellement peu de groupes remarquables qui émergent de Los Angeles. Mais parfois, une perle apparaît, comme par accident. Aboleth est de ces petits trésors cachés, un groupe hors norme, qui propose quelque chose de spécial. Le groupe s’est formé il y a 2 ans à l’initiative de Collyn McCoy, qui est aussi le bassiste du Ultra Electric Mega Galactic de Ed Mundell – et quiconque a vu sur scène le combo monté par l’ancien soliste de Monster Magnet a probablement gardé en mémoire le talent de ce bassiste extraordinaire. Après avoir rencontré la jeune Brigitte Roka, ils décident de monter Aboleth, s’adjoignant les services de plusieurs batteurs plus ou moins dispensables. Après un EP en 2016 (qui leur permet de trouver des dates de concert, en Californie principalement), ils enregistrent l’année suivante un véritable album, ce Benthos, qui sort cette année sur un discret label californien.

Attention cliché : il est peu probable que vous ayez entendu quelque chose comme Aboleth auparavant. Non pas que le style musical du trio soit révolutionnaire : ils évoluent dans un hard rock nerveux et fuzzé, calé sur une bonne base blues racée et fiévreuse. Sauf que les vocaux de Roka apportent au groupe le principal facteur « choc » : la jeune chanteuse a un coffre et une tessiture que peuvent lui envier de grandes vocalistes, dans sa diversité (son chant clair chaleureux, ses montées en tension, ou ses passages rocailleux en diable qui deviennent sa marque de fabrique) mais surtout dans sa puissance ! Toujours sur la brèche, à la limite de la rupture, la chanteuse ne tombe jamais du mauvais côté de la barrière et est l’une des pièces maîtresses de la musique du groupe. Mais comme Aboleth n’est pas « un groupe à chanteuse », l’autre pilier du combo repose sur les épaules de McCoy, qui assure à lui seul toutes les parties « à cordes »… avec un seul instrument ! Armé d’une « baguitar », une sorte d’hybride entre… une basse et une guitare, le bonhomme se la joue one-man band en mode basique : un instrument, deux amplis branchés (un basse et un guitare), et il crache la sauce. Pas d’overdubs, pas de pistes de gratte dans tous les sens, rien : un gros son, de bons riffs, des soli au top, et globalement un superbe doigté. Et côté batteur, pas un manchot non plus : Marco Minnemann, qui a joué avec Satriani ou Steven Wilson, et qui a craqué sur le groupe et proposé ses services (même s’il n’assure pas les tournées, ses autres employeurs étant trop « prenants »).

Les ingrédients sont donc particulièrement bariolés, restait à voir si la cuisine allait être réussie. La réponse est un grand « oui ». On ressort immanquablement séduit par tous les développements proposés à travers les trois quart d’heure de Benthos, il n’y a jamais matière à s’ennuyer. On est d’abord cueilli par ce son gras bien particulier dès l’intro de « Wovenloaf », leur titre le plus représentatif probablement (avec un impeccable solo de slide). Après le mid-tempo catchy « Fork in the road » on rentre sur une autre pièce maîtresse, « No Good », portée par un son copieusement saturé et fuzzé, et une performance vocale toute en feeling. Et ça continue ainsi, on passe de titres plus lents à des morceaux sanguins comme ce nerveux « Glass Cutter », en passant par le fluet blues acoustique « Shark Town Blues » ou encore la balade « The Devil », deux titres où la voix éraillée de Roka file presque le frisson.

Le duo/trio contourne avec grâce et talent le piège du « groupe à gimmick », en se concentrant sur sa musique, ses compos, et en se rodant en live dès qu’un bout de scène miteux leur est proposé. Là où d’autres passent plus de temps à réfléchir stratégie marketing, look, et études de marché, cette approche assure au groupe des fondations robustes et saines. Espérons maintenant que ce premier effort, porteur de beaucoup d’espoir, permette au groupe de prendre une dimension suffisante pour que non seulement on ait l’opportunité de les voir jouer sur nos scènes, mais aussi pouvoir entendre encore d’autres albums du groupe. On croise les doigts.

Note de Desert-Rock
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