La frontière entre l’autoproduction et l’album signé est parfois très mince. Aujourd’hui des albums soutenus par labels et producteurs ne sonnent pas forcément mieux que ce premier effort de Bull Terrier. Les strasbourgeois l’ont bien compris, pour sortir du lot et caresser l’espoir d’une certaine reconnaissance dans une scène en perpétuelle expansion, il faut envoyer du lourd. Dès les premières notes de « Resurrection Mary », le lourd, le groupe l’envoie ! Voilà un manifeste de stoner pur jus de cuisson, qui suinte et qui graisse les conduits auditifs. En France aussi on peut faire des productions dignes des meilleurs artilleurs suédois, maîtres du riff sabbathien et de son massivement fuzzé. C’est ce que nous démontre le quintet alsacien au fil des 6 titres de ce premier EP « Be Like Water ».
Après les près de 10 minutes du premier morceau, qui allie stoner épais à une deuxième partie plus doom, Bull Terrier varie les tempos et les ambiances. Tantôt plus sudiste dans son hard-rock, lorgnant sur du grunge gras sur certains plans, les références et clins d’œil défilent en tête sans prendre le dessus sur la sincérité du groupe. Depuis 2011 on sent que les influences communes transpirent dans chaque arrangement et riff, et le plaisir est communicatif. Surtout quand c’est fait avec autant de qualité instrumentale et avec une production aussi puissante que précise. Paru en 2014 ces 39 minutes de stoner-rock haute volée témoigne de tout l’intérêt que l’on a à porter au groupe.
Classique mais bigrement efficace, reste à affirmer cette identité propre qui semble parfois contrainte de rentrer dans un cahier des charges trop défini. Les grattes en ont sous le pied et aimeraient titiller les cieux mais trop souvent s’en reviennent à l’efficacité du riff plus qu’à son envolée. La section rythmique joue et groove, et saurait se permettre de sortir des sentiers martelés. Ces morceaux méritaient d’être enregistrés parce qu’ils sont sacrément bons et bien foutus, plus stoner-métal finalement. Attention à ne pas vouloir enfoncer trop de portes déjà trop souvent ouvertes. La voix au même titre que les instruments méritent de parfois moins essayer d’en faire ou au contraire de creuser ses aspects les plus originaux. Super base pour un avenir prometteur si le groupe explose le cadre dans lequel il s’enferme parfois. Et quand bien même, on prend son pied dans ce cadre !
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