A la croisée des chemins.
C’est un immense tout. Multiple. Un être complexe et simple. Le huitième jour musical qui marche sur cette putain de route. Linéaire, longue, quasi sans fin. L’Effondras c’est l’idée fixe d’un mouvement mutin mais contenu, c’est savoir que deux guitares et une batterie seront à jamais plus forts que n’importe quelle autre formation musicale.
Il est difficile et inutile d’inscrire L’Effondras dans un courant particulier. D’aucuns les trouveraient noise, d’autres drone, ceux-là pencheraient pour du post-rock. En ce qui nous concerne, le trio nous intéresse parce qu’il tire aussi bien vers les grandes étendues de psychédélisme froid que de la Bresse poisseuse. Mais finalement la terminologie, on s’en branle un peu quand un groupe comme L’Effondras nous assaille. Les gens tiraillés le sont parce qu’ils sont intelligents. L’Effondras est un génie. Et sa musique sent la remise en cause et le pourquoi incisif. Toujours sur le fil, à naviguer entre l’équilibre et le chaos, les compositions des bressans sont une ode à l’attente et à la frustration.
Prenez « La Fille aux yeux orange » par exemple. L’Effondras nous balade pendant près de 10 minutes sur ce mantra, l’accompagnant de quelques dissonances, de montées progressives puis de remises à plat pour finir par un enchevêtrement de notes piquées, mon pêché mignon, de quelques notes de piano croque-mort. Chaque compo de l’album véhicule cette tension mais apporte son lot d’inattendu, de trouvailles, bottleneck, E-bow, wah-wah la gueule ouverte. Autant d’inspirations accompagnant la technique irréprochable des trois zicos. Ecoutez cette batterie, son inventivité, cette façon de « rentrer » dans les fûts, dans les cymbales, cette rythmique hypnotique au tom basse sur « Amrha ». Ecoutez cette batterie, dis-je, vous prouver qu’elle est un instrument soliste à part entière.
L’Effondras, l’album sonne direct, il suffit de se coller un casque sur les oreilles, d’écouter les deux parties de « Caput Corvi » pour se retrouver au milieu du trio, d’entendre le médiator sur les cordes, de sentir les balais caresser autant la peau de la caisse claire que celle de nos bras frissonnant. On passe ces 22 minutes orgiaques les yeux fermés, à ralentir notre respiration, à souhaiter que ce western mental ne s’arrête jamais.
Mention plus plus au mixage de la galette qui respecte parfaitement la place et les idées de chaque musicien faisant de cet album une pépite atypique et réjouissante, un pont cubiste, complémentaire et total entre différents genres.
Je serai tenté de dire que L’Effondras par L’Effondras est un album nécessaire pour toute personne curieuse et souhaitant s’affranchir de quelques carcans et idées musicalement ethnocentrés. Il brasse tellement d’influences sans jamais perdre son propos, qu’il en devient une référence concernant le travail de composition et de réflexion autour de l’identité musicale. Nécessaire, urgent, triturant le corps et l’esprit. Prenez donc un casque, vous verrez.
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