Auteur d’un vague EP publié discrétos il y a un peu plus de deux ans, on ne peut pas dire que Smoke Mountain bénéficie d’une renommée énorme dans nos contrées. C’est l’excellent label italien Argonauta qui propose à ces jeunes floridiens de mettre le pied à l’étrier avec ce premier album. Le groupe propose une configuration un peu atypique – il s’agit en l’occurrence d’une sorte de trio-fratrie (la frangine Pitt au chant, les frangins à la guitare et la batterie…) – ce qui a rajouté à notre curiosité au moment de découvrir leur première vraie production.
Dès les premiers tours de pistes, le son du groupe aura laissé de côté une partie des auditeurs : proposant une mise en son rêche et brute de décoffrage, pour une sorte de garage-doom old school, ils ne séduiront probablement pas les amateurs de productions léchées. En revanche, les amateurs de son gras et sale, où la guitare sur-fuzzée baveuse à souhait occupe 80% du spectre sonore, avec en sus des lignes de chant que l’on croirait enregistrées dans la salle de bain, seront séduits d’emblée – ce fut le cas de votre serviteur.
Composante primordiale de ce son bien caractéristique, la guitare se taille la part du lion, en particulier en l’absence de basse ! Il faut toutefois modérer cette hypothèse : on entend distinctement des lignes de basse (ou assimilables) à de nombreuses reprises, probablement exécutées à travers une “baguitar” ((c) Collyn Mc Coy) ou équivalent de guitare avec 2 cordes de basse, voire simplement à l’enregistrement (une piste basse et une piste gratte). En tous les cas, le juge de paix sera le live…
L’enchantement sonore ayant opéré, reste au groupe à maintenir son pouvoir de séduction à travers un ensemble de compos qualitatives. Proposant un disque aux caractéristiques peu éloignées du nombre d’or musical (8 pistes, 35 min, pas loin de la divine proportion d’un album doom old school classique), le groupe ne se disperse pas et concentre son effort sur huit morceaux solides, efficaces et accrocheurs. Ça commence fort avec un morceau-titre au riff nonchalant absolument délectable, déroulant à l’envie pendant cinq grosses minutes, avec des vocaux à la Acid King. Le titre ne décroche pas une seule seconde de sa trame, pour le plus grand plaisir de nos cervicales. “The Master Serpent” démontre immédiatement que le groupe s’y entend aussi dès qu’il faut faire parler la poudre à travers un mid-tempo plus nerveux. Et plus loin, “I Walk Alone” complète le panorama du potentiel du trio via un titre plus mélodique mais aussi intéressant. L’un des titres les plus recommandables du disque est aussi son plus décalé : “Deathproof” rend un hommage inconscient (!!) au “Big Bang Baby” des Stone Temple Pilots (une chanson génialement catchy d’un groupe alors en pure perdition artistique). Le résultat est une sorte de glaviot doom qui vous fera headbanguer avec un rictus malin pendant des heures… Globalement, la proportion de riffs démonte-nuques est juste redoutable, on vous renvoie aux premières secondes de “Midnight Woman”, “Touch of the Sun” ou “Devil Woman” pour en prendre la juste mesure. Ça se termine sous un tombereau de goudron avec le somptueusement vicieux “End of Days”.
Avec ce Queen of Sin, Smoke Mountain propose une petite perle doom vintage mêlant hommage aux grands classiques (le son, les compos sans chichis), efficacité (compos redoutables, instrumentation a minima) et modernisme dans l’écriture. Un vrai nectar pour les oreilles du doomeux, et un groupe à surveiller.
(Pour donner votre note,
cliquez sur le nombre de cactus voulus)
Laisser un commentaire